Ronce-Rose de Éric Chevillard
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Ronce-Rose
Le 39e livre d’Éric Chevillard est dans les librairies et nous offre à nouveau de plonger dans cette littérature du rien qui est aussi celle du tout, celle où le langage prévaut sur l’histoire, celle où la recherche du mot juste peut dynamiter le récit.
Après les réflexions post-mortem d’Albert Moindre, spécialiste des ponts transbordeurs dans Juste Ciel, voici celles d’une petite fille baptisée Ronce-Rose. Si l’auteur n’a pas dû aller chercher très loin l’inspiration pour son héroïne, étant lui-même père de deux filles de six et huit ans, il a en revanche construit un scénario entre le roman d’initiation, le polar et le conte philosophique. Belle gageure relevée haut la main, notamment par le choix de laisser la parole à Ronce-Rose et à son journal intime. Car ainsi les trouvailles littéraires, la vision naïve – ou poétique – des choses peuvent éclore en toute liberté. C’est ce qu’il a expliqué à François Caviglioli dans l’Obs, dévoilant par la même occasion son projet: « Beaucoup de gens ne disent rien d'intéressant après huit ans, dit Chevillard. Ils ont eu ce génie, ces trouvailles un peu maladroites, mais l'ont oublié avec la maîtrise. L'écrivain est celui qui ne s'arrête pas à la panoplie des mots suffisants pour traverser la vie tranquillement. Il amène une contre-proposition. Je ne vois pas l'intérêt d'écrire un livre pour répéter ce que tout le monde dit déjà. »
Voici donc ce monde de Ronce-Rose – piquant comme la ronce, beau comme la rose – qui est à la fois le nôtre et, à travers le regard de la petite fille, une sorte de royaume de tous les possibles. À l’exemple de la profession de Mâchefer et de son ami Bruce, qu’elle détaille ainsi : « Quand Bruce vient dîner, ensuite habituellement ils partent sur un coup avec Mâchefer, c'est leur métier. Ils travaillent avec les banques, les bijouteries, les stations-service. Ne me demandez pas exactement ce qu'ils font, mais ils sont responsables d'un large secteur et ils couvrent une large zone géographique, si bien qu'ils restent parfois absents deux ou trois jours. Ils partent avec leur voiture de fonction qui change tout le temps et je ferme à clé derrière eux. Je ne dois ouvrir à personne. Le monde est plein de brutes, dit Bruce. J'ai des provisions. De quoi tenir une semaine, mais il ne leur est jamais arrivé de partir si longtemps et il reste toujours plein de charcuterie quand ils rentrent. Tout est bon dans le cochon, c'est la seule parole d'évangile que j'aie jamais entendue sortir de la bouche de Bruce et elle y entre plus volontiers mais au moins il vit en accord avec sa foi. Il le dévore entier et il ne laisse pas d’orphelins. »
Très libre et beaucoup plus futée qu’on peut le croire de prime abord, Ronce-Rose est une autodidacte curieuse qui se destine à une profession qu’elle a elle-même inventée : Ornithologue étymologiste.
C’est qu’elle aime beaucoup les expressions et les mésanges: « Toutes les expressions que je connais, c’est Mâchefer qui me les a apprises. Les autres choses aussi, parce que nous avons jugé préférable que je n’aille pas à l’école, voyez-vous. Mâchefer trouve que ce n’est pas un endroit pour les enfants. »
Avec une telle éducation, le lecteur va se retrouver confronté à quelques mystères qui ne vont toutefois pas l’empêcher de comprendre qu’une sortie nocturne a mal tourné. Ronce-Rose découvre dans la vitrine d’un vendeur d’électro-ménager un sosie de Mâchefer sur tous les écrans de télévision avec ce titre «fin de cavale sanglante».
Dès lors quel sort est réservé à la petite fille ? Sa voisine, Scorbella la sorcière, va bien tenter de se transformer en bonne fée, mais cela ne suffira pas à ramener Mâchefer. Voilà donc notre héroïne partant à la recherche de l’homme de sa vie et de ces réponses si difficiles à trouver.
« Les questions les plus intéressantes, on n'a pas le droit de les poser. Mâchefer dit que les réponses me blesseraient, que 'en serais meurtrie comme une pêche dans un panier de coings et qu'il vaut mieux quelquefois ne rien savoir. Mais quand je tâte mon front, c’est dur, plus un coing qu’une pêche, mon pouce ne s’enfonce pas. Je l'ai dit à Mâchefer, que je préférais quand même connaître les réponses. Il m’a expliqué qu’il ne les avait pas toutes, que beaucoup de choses restaient mystérieuses. »
Lire Chevillard est à chaque fois s’offrir une belle récréation. Évadez-vous ! http://urlz.fr/4XKF
Les éditions
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Ronce-Rose [Texte imprimé] Éric Chevillard
de Chevillard, Éric
les Éditions de Minuit
ISBN : 9782707343161 ; 13,80 EUR ; 01/01/2017 ; 1 vol. (139 p.) p.
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Les critiques éclairs (2)
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C'est beau , les choses qu'on voit …...
Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 13 juillet 2023
Si de la rose, elle a la blancheur, la candeur, la pureté ; de la ronce, elle a parfois les épines car elle est délurée, rusée et débrouillarde, la mignonne !
Elle vit en compagnie de Machefer (son père?) dont le « métier » est de « faire des coups ». En compagnie de son associé Bruce , ils travaillent la nuit la laissant seule avec quelques provisions
Un jour, ils ne reviennent pas, elle part à leur recherche en sillonnant la ville , et découvre sur l'écran d'un téléviseur dans une vitrine les images d'un film intitulé « Fin d'une cavale sanglante » interprété par des « sosies » de Bruce et Machefer. Mais sa cavale, à elle, est loin d'être terminée …...
Petite fille candide, elle se sent proche des animaux et ce qu'elle voit de la vie, elle l'interprète au travers des contes qu'elle connaît .
Elle aime les mots et son rêve est de devenir « ornithologue étymologiste ». Machefer la surnomme d'ailleurs : « moulin à paroles » et « raisonneuse » car elle cherche à tout comprendre, en particulier ce qui se cache derrière expressions imagées du genre : rouler quelqu'un dans la farine .
Ce court récit est plein de fraîcheur , vivant, souvent drôle et nourri du comique de l'absurde .
J'ai suivi, le sourire aux lèvres , les pérégrinations de cette petite fille, qui est tantôt une sorte de Zazie , tantôt une sorte d'Alice dont le pays n'est pas toujours celui des merveilles .
Et si elle n'était pas celle que l'on croit ? La note finale de l'éditeur pourrait le laisser supposer .
Une fable ratée, pour moi
Critique de Hervé28 (Chartres, Inscrit(e) le 4 septembre 2011, 55 ans) - 4 avril 2017
J'avoue qu'Eric Chevillard ne m'a pas du tout embarqué dans cette aventure qui oscille entre le conte, la fable et la farce.
Car le livre débute de manière assez bucolique voire poétique mais j'ai fini par décrocher assez rapidement, à partir de la recherche de Mâchefer, à vrai dire.
Cette quête d'une gamine et ces histoires de sorcières et d'unijambiste ne m'ont pas du tout enthousiasmé et m'ont même ennuyé.
Le style, même s'il est assez éloigné d'un langage de "petite fille", est assez simple.
Je ne sais pas si Eric Chevillard a voulu nous livrer une version moderne d' "Alice au pays des Merveilles", en tout cas , c'est à mes yeux, raté.
Sans le jury auquel je participe, pour élire le meilleur roman ou essai de l'année des lecteurs d'une librairie, je n'aurais pas dépassé les 20 premières pages.
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