Une soeur
de Bastien Vivès

critiqué par Hervé28, le 14 octobre 2017
(Chartres - 55 ans)


La note:  étoiles
chronique de vacances
Cela fait des années que je suis le travail de Bastien Vivès. Certains de ses albums m'ont franchement laissé de marbre, comme "Le goût du chlore" ou "Dans mes yeux", d'autres ont contraire m'ont enchanté comme "Polina" titre étrangement absent des albums de Vivès cités en fin d'ouvrage.
Dans ce one shot, Bastien Vivès nous livre une histoire douce amère d'adolescents, une belle chronique de vacances relatant la découverte de la sexualité par un adolescent de 13 ans.(mais bien loin du style des "melons de la colère") Le tout, en évitant le côté "histoire à l'eau de rose" dans lequel il aurait pu tomber.
C'est drôle comme l'on se retrouve dans cette atmosphère de vacances, on sent presque le vécu (les fêtes sur la plages, les bals)
Mais ce qui fait la force de cet album réside dans le dessin épuré de Vivès (où seuls , parfois,les contours du visage sont esquissés).
Bref, une œuvre tout en délicatesse, avec une dernière case toute empreinte de nostalgie.
Superbe.
Quand à l’adolescence s’éveillent les sens 8 étoiles

Le thème des premières amours dans le cadre des vacances familiales à Chmolduc-Plage est un sujet rebattu mille fois, le plus souvent au cinéma. Pourtant, à chaque fois, il y a toujours ce je-ne-sais-quoi d’irrésistiblement charmant, même lorsque le scénario ne vole pas bien haut, comme un goût de Madeleine de Proust sans doute. Bastien Vivès s’est-il replongé dans ses souvenirs - le jeune héros étant la plupart du temps affairé à griffonner dans son carnet de croquis - pour nous livrer cette histoire ? Dans « Une sœur », non seulement on retrouve tout cela, mais en plus, l’auteur parvient à susciter une belle émotion, évitant de tomber dans le romantisme teenager un peu niais. Vivès y a mis beaucoup de sensibilité et de tendresse, montrant davantage par son dessin épuré les corps, les gestes et les postures, que les regards, les yeux n’étant représentés que lorsqu’ils ont quelque chose à exprimer. Par exemple, l’insondable mélancolie adolescente d’Antoine.

C’est donc dès le moment où il fait connaissance avec Hélène, jolie jeune fille de deux ans son aînée, que l’adolescent va peu à peu s’éveiller à la sensualité et au langage du corps. Entre cette dernière et lui-même va s’instaurer une intimité particulière, du fait d’une certaine ressemblance physique et de la timidité d’Antoine, dont la sensibilité à fleur de peau et l’aspect frêle en font presque un être androgyne. Les rôles vont alors en quelque sorte s’inverser. Hélène, intriguée et touchée par cette singularité, rare chez les garçons du même âge qui souvent préfèrent jouer les coqs, va prendre les commandes et l’accompagner de façon troublante, telle une grande sœur un peu incestueuse, vers les choses de l’amour. A ce « petit frère » lunaire et rêveur, elle fera un double cadeau. L’un marquera Antoine pour la vie, celui qu’elle n’aura jamais fait à tous les petits frimeurs qui lui tournaient autour et dont l’arrogance leur coûtera la vie... L’autre sera de sauver celle du jeune garçon, justement en lui interdisant de les suivre en traversant la baie à la nage…

La façon dont Bastien Vivès amène son sujet est d’une intelligence rare et tout en retenue. Sans verbiage inutile, l’émotion, toujours suggérée, n’en est que plus forte. L’auteur, disposant de cette capacité à ne garder que l’essentiel, fait véritablement figure de dessinateur des sentiments et des émotions. Et nous offre ainsi une histoire que l’on quitte à regret, un peu comme l’amour de vacances à qui l’on dut dire adieu quand on était ado…

Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 29 octobre 2018


Des adolescents en vacances ... 9 étoiles

Ce sont les vacances ! Une famille se rend dans une belle maison pas loin de la mer pour deux mois de détente. Une amie de la famille vient de faire une fausse couche et rejoint cette petite famille avec sa fille de 16 ans Hélène pour une petite semaine afin de se ressourcer. Le jeune Antoine de 13 ans va se rapprocher de cette jeune fille, plus dégourdie et qui meurt d'envie de sortir et de faire la fête. Cette semaine va être un véritable apprentissage pour Antoine qui vivra intensément durant ces quelques jours, un condensé de l'adolescence.

Bastien Vivès prend son temps pour installer une atmosphère et permettre au lecteur d'entrer doucement dans son univers. Cette façon de planter un cadre peut rappeler certains films d'auteur français qui parviennent à emporter le spectateur-lecteur avec des scènes banales, donc universelles. De plus le ton est très juste. Certaines scènes sont empreintes de réel et parlent à tout le monde. Les simples discussions entre les personnages sonnent juste, comme cette scène de repas où le père parle pendant que les enfants mangent et la mère regarde son portable, chacun concentré sur son sujet.

L'éveil sexuel adolescent est bien dépeint. C'est un sujet qui pourrait être délicat mais qui est mené avec talent par Bastien Vivès. Les enfants et adolescents sont touchants et ont des réactions qui parlent à chacun d'entre nous. Les vacances d'été et les rencontres estivales permettent aux jeunes de se révéler et de découvrir certains désirs. La découverte de son propre corps et de celui de l'autre est évoquée avec justesse.

Les dessins vont à l'essentiel et sont pourtant très expressifs. Les traits du visage ne sont pas toujours dessinés, ce qui ne gêne absolument pas la compréhension ni la sympathie que l'on développe pour les protagonistes. On ne s'y ennuie pas une seule seconde, sans doute car cette période de l'existence nous est familière. La façon qu'a l'artiste de narrer des vacances a forcément aussi une résonance en nous. On se souvient de nos propres vacances,des ambiances familiales, des discussions légères et du rythme de ces moments. Lorsque les personnages jouent au puzzle ou décident de sortir pour s'aérer, l'on se souvient de nos techniques personnelles pour vaincre l'ennui, pas bien éloignées des leurs.

Une histoire simple, juste et intime.

Pucksimberg - Toulon - 44 ans - 21 janvier 2018


Il est fort ce petit jeune... Dix ans que je le dis !!!! 10 étoiles

C’est l’histoire d’Antoine qui par certains côtés ressemble peut-être un peu à Bastien Vivès lui-même… Allez savoir ! D’ailleurs, estivale ne signifie pas légère et cette histoire a sa dose de profondeur, d’humanité et même de drame…

Comme bien souvent avec Bastien Vivès, l’histoire est simple presque basique : un été, deux frères vont avec leur famille dans une maison de vacances, sur une île du Golfe du Morbihan et ils s’apprêtent à vivre un été comme les autres… banalement ! Simplement !

Antoine aime dessiner, que dis-je, il dessine presque tout le temps et il approche de cet âge où l’on ne sait plus très bien si on est encore un enfant ou déjà un adulte… Suite à un accident de vie que vous découvrirez en lisant cette bande dessinée – ce roman graphique comme diraient certains – une jeune fille, Hélène, à peine plus vieille, va venir passer un temps de vacances dans la famille…

Les jours de l’été se succèdent comme d’habitude ou presque avec plage, baignade, soleil, dessin, glace, soleil, plage… Puis arrive le 14 juillet qui normalement symbolisait pour les deux garçons la joie du feu d’artifice le soir… enfin, à la nuit tombante !

Cette année, il y aura une petite modification avec un peu de bal populaire et beaucoup d’alcool… Jour après jour, Antoine, fasciné par Hélène et son aisance dans certaines situations, se met à évoluer et à regarder le monde d’une autre façon…

Finalement, une certaine proximité et intimité se met en place entre Hélène et Antoine mais pas sous forme de « baise » comme on dirait aujourd’hui. Tout est en délicatesse, découverte, hésitation, apprentissage, doute, pudeur… du moins pour Antoine car on a bien compris que l’auteur, Bastien Vivès, se place résolument à la place de son personnage Antoine…

Bon, il ne va pas falloir que je vous en dise plus pour vous laisser le bonheur de la lecture, de la découverte, de l’évolution dans ce monde estival. Ce qui est certain, c’est que l’issue en surprendra plus d’un…

Pour ce qui est de la narration graphique, Bastien Vivès reste pour moi un grand, voire un très grand. En quelques coups de crayon – que ce soit d’ailleurs un véritable crayon, un pinceau ou un outil numérique – il transmet de l’émotion, du mouvement, de la vie… et c’est tout simplement magnifique. Il ne fait presque rien sur les visages et, pourtant, ses personnages rient, pleurent, doutent, découvrent, vivent… C’est un peu magique et beau !

Shelton - Chalon-sur-Saône - 68 ans - 14 octobre 2017