Le Bureau de l'heure
de Jean-Luc Outers

critiqué par Bernard, le 21 mai 2004
( - 72 ans)


La note:  étoiles
Prenez le temps...
Jean-Luc Outers nous propose ici son cinquième roman.
A nouveau, il nous plonge dans le monde quasi fantastique des fonctionnaires.
Nous accompagnons dans ce roman, un fonctionnaire probablement unique, le préposé à l'heure de l'Observatoire d'Uccle en Belgique.
Gardien de l'heure exacte qu'il transmet chaque jour à l'horloge parlante, à la Radio belge et aux chemins de fer, Celestin est aussi un poète à sa manière, un amoureux éternel, un homme tellement attachant.
Ce livre ne se résume pas.
Jean-Luc Outers, une fois de plus, nous fait découvrir avec tendresse et humour la face cachée d'hommes et de femmes dont la vie semble pourtant réglée comme du papier à musique.
Quelle richesse en chacun d'eux, quelles audaces aussi.
Ce livre dont le temps est le véritable personnage central est un
roman inclassable dont Outers a le secret.
Délectable.
Pour le plaisir du temps qui passe. 8 étoiles

Dans ses remerciements en fin de livre, Jean-Luc Outers nous dit que son personnage doit beaucoup à Jaco Van Dormael, l'auteur du film Toto ce Héros. Et c'est bien vrai qu'il y a une parenté certaine entre Célestin, le gardien de l'heure du roman de Outers, et Toto, le héros du film de Jaco Van Dormael. L'un et l'autre sont des personnages fragiles et attachants, pas du tout des marginaux, ce qui serait trop simpliste ; mais ce sont des êtres qu'on croirait parachutés dans un monde trop dur pour eux et qui dés lors se réfugient volontiers dans le rêve, ou dans les souvenirs.
Tout au long du récit, l'auteur nous fait partager sympathie et compassion pour son Célestin, à travers une intrigue qui vagabonde dans le monde un peu surréaliste de l'imaginaire et des amours passées.
Pour le plaisir du lecteur, Jean-Luc Outers a étayé son récit de touches philosophiques, d'humour, et aussi, de quelques épisodes rocambolesques, tel ce "cambriolage" de la maison d'un ami. Les comparses qui meublent le récit sont l'objet d'une fine observation pleine de verve et d'esprit. Partout ce récit sent le bonheur d'écrire et d'inventer.
Voilà donc un livre subtil sans être compliqué ; amusant sans être loufoque ; attendrissant sans miévries. Tout est en mesure comme la mesure du temps qui passe.
Ce n'est certes pas un chef d'œuvre éternel, mais c'est un bon moment de récréation, intelligent, distrayant, sans prétention et, ce qui ne gâche rien, très bien écrit.
En somme, de quoi passer un très bon temps de plaisir et de bonne humeur.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 11 avril 2006


Un coup de coeur 9 étoiles

Quand j'étais petit j'habitais en face d'un observatoire, parfois on nous laissait entrer dans le bâtiment pour prendre une boisson au distributeur : j'étais chaque fois fasciné par un immense panneau du ciel étoilé sur le mur. D'autre fois on entrais par une porte détournée le soir et on ça nous faisait très peur. Bref j'ai retrouvé un peu de mon enfance dans ce livre dont le héro travaille dans un autre observatoire, celui de Uccle à Bruxelles. Par moment on se croirait dans Tintin d'ailleurs, quand l'auteur décrit le fonctionnement de l'observatoire et du bureau de l'heure, c'est une ambiance particulière assez formidable. Le héro, Célestin, personnage un peu lunatique, est rudement sympathique, ainsi que la plupart des personnages qu'on croise dans ce petit livre : je pense notamment au malchanceux Staelens, le fonctionnaire de la SNCB (chemin de fer belge) et son amour pour son train électrique.

C'est un livre sur le temps, sur les amours adolescents, sur l'administration, sans grandes prétentions mais vraiment très amusant. Le monde de l'administration est décrit avec un humour décalé excellent, il y a un côté un peu surréaliste là-dedans, je pense notamment aux réunions de coordination pour le changement d'heure et aux rapports entre les administrations. On outre comme le dit Sahkti on apprend pas mal de petites choses sur l'heure (sans savoir toutefois ce qui est vrai et pas).

Bref pour moi ce fut un réel coup de coeur.

Saule - Bruxelles - 59 ans - 7 novembre 2005


Célestin compte le temps 6 étoiles

Célestin est le directeur du Bureau de l'Heure à Bruxelles. Il ne gère pas le temps mais l'officialise. Il aime son travail, on pourrait même dire que c'est toute sa vie. Rien de très folichon en apparence, beaucoup d'habitudes et de réflexes, c'est l'administration dans toute sa splendeur, vide d'humanité et d'imprévisibilité. Conscient de la chose, Outers distille ci et là entre les épisodes de la vie d'un fonctionnaire des propos intéressants sur le temps qui passe, sur les étoiles, sur un observatoire, sur la mesure du temps et l'histoire des cadrans solaires. Intéressant mais un peu noyé dans la masse, il faut le reconnaître. Le récit est plaisant mais à l'image de son héros... quelque peu routinier. Il y a bien de ci de là des petites aventures, des péripéties et des rencontres extravagantes, des situations à la limite du rocambolesque (la vaillante Gilda presque venue d'une autre planète, Lydia la veuve qui remplace vite fait le père de ses enfants et puis toutes ces coïncidences avec Marine et Audrey... surréaliste!).
Célestin est depuis toujours amoureux de Marine, amie d'enfance qui hante toute sa vie. Des femmes, il en a connu d'autres mais aucune ne lui est jamais arrivée à la cheville. Un amour de jeunesse platonique qu'il idéalise au point de tout faire pour la retrouver.

Je me sens partagée en refermant ce roman de Jean-Luc Outers. Une impression de lassitude qui se serait installée, comme si l'auteur n'était pas allé aussi loin que ce dont il est capable. Les fonctionnaires, il connaît et en parle plutôt bien. "L'ordre du jour", par exemple, est un morceau de plaisir. Mais ici, c'est ronronnant, prévisible, rien de terrible, pas de mordant ou d'ironie. L'auteur fait pourtant la part belle au Bureau de l'heure et son mode de vie mais il s'en dégage peu de chaleur et d'émotion, la machine est grippée. Reste alors l'histoire d'amour. Elle non plus ne décolle pas vraiment. Le scénario est classique, sans grande surprise, à la limite du vaudeville par moments tant les hasards qui n'en sont pas deviennent lourds.
Un petit sourire tout de même (page 32) quand Outers évoque les archéologues et une grève impossible de leur corporation. La grève des archéologues... Clin d'oeil à un ami? :)
Je reste sur l'impression que l'auteur peut faire mieux, plus vif et plus tranchant. Le prochain peut-être...

Sahkti - Genève - 50 ans - 12 avril 2005