Ohan de Chiyo Uno
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La double inconstance
Si il y a bien des romans particuliers, c’est ceux mettant en scène un personnage principal qui n’a rien pour provoquer l’empathie du lecteur, ou tout du moins son identification. Je pense ainsi par exemple à Humbert Humbert de Lolita ou encore au nazi Rudolf Lang dans La Mort est mon métier. Ces récits provoquent une sorte de malaise, du fait en particulier d’utilisation à la première personne du singulier, qui fait qu’on accède directement aux pensées de ces personnages.
Ohan, toute proportion gardée s’inscrit quand même je dirais dans cette approche narrative. Ici pas de pédophile ni de bourreau: c’est un homme dans toute sa splendide faiblesse, mais qui provoquera quand-même le mal, qui nous livre son témoignage. Oisif et versatile, le narrateur a quitté Ohan, sa femme alors enceinte, sept ans auparavant, pour aller vivre aux crochets de Okayo, une geisha du quartier. Un soir sa route croise à nouveau par hasard celle d’Ohan. Il lui demande des nouvelles de leur fils. Petit peu à petit l’idée de refaire sa vie avec son épouse faite son chemin, mais il ne parvient pas à prendre de décisions définitives.
On ne trouve décidément pas beaucoup d’excuse au narrateur, qui fait naître de faux espoirs dans l’esprit de Ohnan. Il est au fond de lui-même incapable de savoir ce qu’il veut. Paresseux, « bon à rien » comme il le précise, cédant facilement à la chair, ses bonnes résolutions du jour ne tenant pas longtemps face à sa paresse. « Tout de même, il n’y a rien de plus inconstant que le cœur de l’homme », avoue-t-il à nouveau dans son témoignage. Cette lucidité envers lui-même le rend quand même d’une extraordinaire humanité, et exclut, je pense, que Chiyo Uno, qui fut une féministe à la pointe dans les années mille-neuf-cent au Japon, en fasse un réquisitoire contre l’homme en tant que représentant de la masculinité.
C’est plutôt me semble-t-il la peinture très juste de notre condition humaine, ballottée au gré des événements, incapable de triompher de son destin. Il faut reconnaitre en outre que les deux femmes du roman ne sont guère plus épargnées finalement par notre jugement, entre Ohan, qui incarne la sage mais naïve épouse traditionnelle, fidèle jusqu’à l’absurde à son époux, et Okayo, qui figure plutôt une « entrepreneuse »: on se demande bien en effet ce que Ohan et Okayo trouvent au narrateur pour y être autant attachées !
Il faut rajouter aussi que si Ohnan prends parfois des airs de Vaudeville au triangle amoureux inversé (un homme voit son épouse légitime en cachette de sa maîtresse !) ce court mais très riche roman ne relève pas moins plutôt d’une tragédie. Les petits mécanismes du quotidien qui font déraper les choses de manière imperceptibles tout d’abord, comme cela peut se faire dans la vraie vie, sont décrits avec beaucoup de précision. La complexité des décisions à prendre, l’inextricabilité des situations, que nous pouvons nous-même rencontrer, vont amener le drame final, implacable, en l’espace d’un an, dans l’espace limité d’un quartier urbain. Il en ressort du livre alors une grande force, ainsi que le constat résigné ou apitoyé de la fragilité de nos sentiments.
Les éditions
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Ohan [Texte imprimé], récit Uno Chiyo traduit du japonais par Dominique Palmé et Kyôko Satô
de Uno, Chiyo Palmé, Dominique (Traducteur) Sato, Kyoko (Traducteur)
Editions Philippe Picquier
ISBN : 9782809710052 ; EUR 12,00 ; 06/05/2014 ; 128 p. ; Broché
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Appréciable !
Critique de Catinus (Liège, Inscrit le 28 février 2003, 73 ans) - 3 septembre 2019
Tout au long de cette centaine de pages, nous découvrons le parcours récent de Kanô. A la japônaise.
Chiyo Uno (28 novembre 1897 – 10 juin 1996) est une écrivaine japonaise, également créatrice de kimonos. Elle exerce une influence significative sur la mode, le cinéma et la littérature japonaise.
Extrait :
* - Il m’a dit qu’il n’y avait pas de fille mieux que moi à Kajiya. Tu sais, papa, les hommes, je les embobinerai tous pour leur soutirer de l’argent. Je vais devenir riche, ça je te le jure.
- Ça te paît, de devenir geisha ?
- Bien sûr … Toi aussi, elles te plaisent les geishas.
* Vous savez, dans ce quartier, tous les enfants profitent des grandes vacances pur apprendre à nager, et au retour, ils ont l’habitude de se promener presque nus, une simple bande de tissu nouée autour de leurs hanches frêles.
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