Le maître de Céans (Journal d'un collectionneur de paysages)
de Jacques Goijen

critiqué par Alceste, le 6 avril 2018
(Liège - 63 ans)


La note:  étoiles
En mode paysage
De son amour de la nature, Jack , le héros de ce roman - allusion transparente à l’auteur -, a tiré deux passions : la peinture de paysage et la chasse.
L’une et l’autre lui permettent de s’imprégner de l’univers naturel, qu’il a épousé dès son enfance, lors de joyeuses escapades avec ses camarades. C’est au cours de l’une d’elles qu’un événement fondateur va le marquer à tout jamais : la découverte d’une propriété nichée dans un coin de nature, et la vision fugitive du maître de céans retrouvant sa demeure.
Toute sa vie d’adulte, consacrée à la collection et au commerce de tableaux de paysage, et vouée à des grandioses parties de chasse, tendra à retrouver cette vision, et à y jouer le premier rôle.
Se dessine donc la figure de l’homme solitaire, dans un éloignement hautain de la vie sociale, cultivant une haute estime de soi et un orgueil bien placé.
Mais ce qui frappe surtout dans ce roman, pour qui connait un peu la peinture dont Jacques Goijen se fait le défenseur depuis de nombreuses années, notamment par la publication d’un précieux et considérable « Dictionnaire des Peintres de l’École liégeoise du paysage », c’est combien l’art pictural est premier pour l’auteur, tandis que la nature semble n’être là que pour l’imiter. Au rebours de ce que fait Woody Allen quand il montre un personnage de cinéma sortir de l’écran et vivre sa vie propre, ici l’auteur semble s’être immergé dans l’univers de ses tableaux pour vivre une aventure adaptée à ce décor. On a dès lors l’impression de voir ces tableaux vivre, s’animer, se prolonger. Une phrase emblématique selon moi : « Le grand peintre de l’univers avait mis sa touche de rose matinale au levant et le temps s’était figé dans son immobilité d’éternité. » Oui, le monde est une immense toile de maître, qui offre à l’artiste - peintre ou écrivain - un éventail infini de facettes à explorer.