Mary Cassatt : Une Américaine chez les impressionnistes
de Isabelle Enaud-Lechien

critiqué par Agnesfl, le 14 mai 2018
(Paris - 60 ans)


La note:  étoiles
Un bel hommage
Mary Cassatt

Isabelle Enaud-Lechien enseignant-chercheur en histoire de l'art contemporain à l'Université Lille-Nord de France nous parle de Mary Cassatt avec un certain charme littéraire. Aucune image, mais un style agréable à lire.
Cette peintre née américaine en 1844 et d'origine française est un peu moins connue que Berthe Morisot mais aussi talentueuse. Toutes deux amies dans la vie, représentent souvent des thèmes communs liés à l'univers féminin : scènes de toilette, portraits de mères et d'enfants. Pour Mary Cassatt qui débute sa carrière artistique en France à l'âge de 22 ans, la peinture ne s'enseigne pas : "On n'a pas besoin de suivre les leçons d'un maître. L'enseignement des musées suffit." Détestant l'art conventionnel, elle est très liée à Edgar Degas qui lui propose de rejoindre le groupe des impressionnistes. Sa première œuvre exposée ? " La joueuse de mandoline".
Choisissant ses motifs particulièrement dans son environnement familial, sa sœur Lydie lui sert de modèle notamment pour " La tasse de thé". La mort de cette-ci la plongera dans une dépression qui la fera arrêter la peinture quelque temps et se consacrer essentiellement à son rôle d'agent des artistes. Admirative de Courbet, Manet, Degas, elle a comme grande amie Louisine Havemeyer collectionneuse d'art ancien et moderne, mécène, qui l'aidera à faire connaître les impressionnistes aux Etats-Unis. Le premier exposé sera Degas avec " La répétition de ballet".
L'auteur de cette biographie se sert d'ailleurs adroitement du témoignage de Louisine Havemayer pour mieux dévoiler la personnalité de cette artiste et notamment son talent d'oratrice qui enchante tout le monde. A la différence des impressionnistes, Mary Cassatt s'intéresse peu à la représentation du cadre urbain. " Le jardin" est une de ses premières oeuvres de plein air. Elle a peu de tableaux de nus à son actif, et n'en peindra pas avant 1890.
Surtout intéressée par les poses statiques longuement étudiées en atelier, elle s'enthousiasme pour l'art japonais. Ses tableaux évoquent peu de personnages masculins. Un reproche qu'on lui adressera et auquel elle répondra ainsi : " Les hommes, je n'en ai aucun doute sont peints dans toute leur vigueur sur les murs des autres bâtiments; pour nous la douceur de l'enfance, le charme des femmes (est important) ; si je n'ai pas réussi à donner une idée de ce charme, en un mot, si je n'ai pas été absolument féminine, alors j'ai échoué."
"Elle s'engagera d'ailleurs dans les causes spécifiquement féminines aux côtés de Louisine Havemeyer. Adepte du spiritisme, cette américaine est connue pour sa générosité envers les personnes défavorisées. Le sort des aveugles la touchait spécifiquement. Peu attirée par les honneurs, elle acceptera malgré tout la légion d'honneur le 31 décembre 1904 : une récompense française pour l'ensemble de son œuvre.
Dans ce livre riche en témoignages, sont citées diverses louanges de personnalités comme Zola, Gauguin, Huysmans, Mirbeau. Une exception cependant, Edmond de Goncourt qui se moque des compliments dans les journaux sur ses eaux-fortes..
Actuellement, au Musée Jacquemart se tient une exposition sur Mary Cassatt, la première en France depuis sa mort, et ce livre vient à point nommé pour compléter cette belle rétrospective. Espérons que ces deux initiatives permettront à cette peintre connue également comme une maîtresse de maison accomplie, d'obtenir la reconnaissance qu'elle mérite…
Agnès Figueras-Lenattier