Un monde à portée de main de Maylis de Kerangal
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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La vie d'une copiste de décors
Paula Karst pratique la copie de textures minérales et de bois pour concevoir décors et oeuvres d'art. Pour cela, elle a étudiée dans une école sélective basée à Bruxelles, avec ses deux colocataires Jonas et Kate, sous la férule de l'impressionnante "dame au col roulé noir", dont jamais le nom n'est énoncé, mais qui sait insuffler la rigueur nécessaire à l'acquisition de ce savoir-faire.
Après un flash-back retraçant ces années passées à Bruxelles pour évoquer les rencontres régulières avec Kate et Jonas, il est décrit son expérience professionnelle. Elle passe de projets en chantiers, dans le cadre d'une expectative aussi précaire qu'excitante. Elle conçoit ainsi une chambre d'enfants, des halls d'immeubles, avant de passer à des travaux de plus grande envergure, comme le tournage d'Habemus Papam de Nanni Moretti, à Cinecittà, où elle participe à la reconstitution de la basilique Saint-Pierre et de la chapelle Sixtine, avant de se tourner vers le Périgord pour l'élaboration de Lascaux IV.
Les rencontres qu'elles effectue s'avèrent toujours enrichissantes, ses expériences ne se ressemblent que rarement et représentent presque toujours des moments heureux qui apportent quelque chose. Une apparence particulière qui attire l'oeil et une personnalité adaptable, malgré un stress chronique, lui permettent de rebondir, d'appréhender les situations perpétuellement nouvelles.
Ce roman reste assez descriptif et psychologique. Il présente une grande fraicheur et incite à l'ouverture d'esprit, en vue de découvrir un monde très particulier, non dénué de charmes et de singularités. Il ressemble à un bijou beau et discret. Il est intéressant et instructif.
Les éditions
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Un monde à portée de main
de de Kerangal, Maylis
Verticales
ISBN : 9782072790522 ; EUR 20,00 ; 16/08/2018 ; 288 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (3)
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De Bruxelles à Lascaux
Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 20 décembre 2019
Paula et d’autres jeunes gens se retrouvent dans une célèbre école bruxelloise, pour vivre quelques mois d’immersion totale dans un monde de peintures, de solvants, moments d’une incroyable densité, qu’ils auront du mal à quitter la formation terminée.
Car ensuite vient la "vraie vie" ; celle qui est susceptible de dérouter ceux qui sortent d’études aussi intenses ; plus de pression, plus de consignes à respecter, il faut maintenant se débrouiller seule (ou presque), trouver ses chantiers...
Paula doit retourner dans l’appartement de ses parents où, devenue adulte, elle ne trouve plus sa place auprès de ce couple fusionnel.
Et surtout elle est séparée de ses deux amis Kate Malone et Jonas Roetjens.
C’est le temps des chantiers éphémères, des brèves relations.
Paula se retrouve en Italie, où après plusieurs missions, elle intègre les célèbres studios de Cinecittà, la fascination de ses immenses décors, la découverte des films qui ont marqué l’histoire du cinéma.
L’auteure plongera ensuite le lecteur et Paula dans l’art pariétal à Montignac pour la reconstitution en 3D de la célèbre grotte de Lascaux.
L’attendrissante Paula est un prétexte à une présentation complète et technique de lieux mondialement connus de la reproduction, l’école de la Rue du Métal, les studios de Cinecitta, la grotte de Lascaux, avec souvent cette impression de lire un documentaire, très instructif mais parfois frustrant tant les personnages sont attachants et d’une grande justesse.
"Un monde à portée de main" de Maylis de Kerangal : que faire après Réparer les vivants ?
Critique de Lettres it be (, Inscrit le 7 mai 2017, 30 ans) - 17 février 2019
# La bande-annonce
« Paula s’avance lentement vers les plaques de marbre, pose sa paume à plat sur la paroi, mais au lieu du froid glacial de la pierre, c’est le grain de la peinture qu’elle éprouve. Elle s’approche tout près, regarde : c’est bien une image. Étonnée, elle se tourne vers les boiseries et recommence, recule puis avance, touche, comme si elle jouait à faire disparaître puis à faire revenir l’illusion initiale, progresse le long du mur, de plus en plus troublée tandis qu’elle passe les colonnes de pierre, les arches sculptées, les chapiteaux et les moulures, les stucs, atteint la fenêtre, prête à se pencher au-dehors, certaine qu’un autre monde se tient là, juste derrière, à portée de main, et partout son tâtonnement lui renvoie de la peinture. Une fois parvenue devant la mésange arrêtée sur sa branche, elle s’immobilise, allonge le bras dans l’aube rose, glisse ses doigts entre les plumes de l’oiseau, et tend l’oreille dans le feuillage. »
# L’avis de Lettres it be
A ce stade de la nuit discrètement publié en 2014 aux éditions Guérin ou encore Un chemin de table en 2016 chez Stock… Un monde à portée de main n’est pas véritablement le grand retour de Maylis de Kerangal. Et pourtant, les attentes étaient fortes pour ce roman publié lors de la rentrée littéraire 2018 au côté d’autres grands noms. Tout le monde attendait en effet la nouvelle consécration d’une auteure qui compte désormais parmi les grandes plumes françaises contemporaines. Et la voilà qui revient avec un récit articulé autour d’une jeune fille réservée et pourtant pleine de douces surprises, la jeune Paula…
Il était difficile pour Maylis de Kerangal de faire mieux. Difficile de dépasser et même égaler la puissance contenue de Réparer les vivants, une puissance transposable attestée depuis sur les planches et le grand écran. Avec Un monde à portée de main, l’auteure toulonnaise renoue avec la normalité, avec un roman « normal ». On suit les pérégrinations de Paula en espérant à chaque page apercevoir l’étincelle, le brusque virage pour donner à la lecture une autre dimension. Entre rencontres hasardeuses et vocations tardives, on regarde le fil de ce récit se dérouler sous nos yeux sans croiser le chemin de la surprise. De guerre lasse, on reste sur notre faim devant ce récit un brin convenu, emmêlé dans une initiation artistique qui peine à se faire comprendre. Pas de déception cependant : on pourrait (presque) tout pardonner à l’une des femmes de lettres contemporaines les plus en verve dans l’Hexagone actuellement. Juste un petit coup de moins bien. Mais avec Réparer les vivants, le magnifique était déjà à portée de main…
Retrouvez la chronique en intégralité sur Lettres it be : https://lettres-it-be.fr/critiques-de-romans/…
Un monde à portée de main
Critique de Nathavh (, Inscrite le 22 novembre 2016, 60 ans) - 8 novembre 2018
J'avoue avoir eu des difficultés à rentrer dans cette lecture, le sujet m'intéresse pourtant mais je pense que les longues envolées lyriques décrivant de manière magistrale et somptueuse le monde de la peinture; ustensiles, tons, nuances, couleurs, matières .... n'ont pas réussi à me toucher.
Peut-être est-ce un peu trop documenté , un peu trop précis pour la non initiée que je suis.
Je l'ignore, la fatigue peut-être aussi mais ce fut un début laborieux.
Voici le sujet. Paula Karst (son nom prendra tout son sens en cours de récit), Jonas et Kate sont amis. Ils ont étudié ensemble d'octobre 2007 à mars 2008 à l'institut de peinture, rue du Métal à Bruxelles, le monde du trompe l'oeil, de l'illusion.
C'est principalement le parcours de Paula Karst que nous allons suivre. Elle surprend ses parents en voulant s'inscrire dans cette voie, elle s'immergera corps et âme dans l'apprentissage de cet art. On peut en effet parler d'un art car c'est une discipline exigeante demandant de s'investir complètement, c'est physique et mental à la fois. Il faut véritablement s'imprégner du sujet, se fondre en lui pour pouvoir reproduire par exemple l'effet du bois, du marbre. Il faut observer, rendre la patine, le poids du temps, les défauts.. Reproduire et non créer.
On suivra le parcours des étudiants avec leurs doutes, leurs joies mais aussi une grande solitude, il n'y a place pour rien d'autre que l'apprentissage et le travail.
Ensuite Paula travaillera commençant par de petits boulots, partant pour l'Italie, un travail pour une expo, chez un coiffeur puis de fil en aiguille à Portofino, restaurant tantôt une résidence, un hôtel particulier pour arriver à Cineccita, c'est le monde du cinéma, le haut lieu de l'illusion, de la tromperie, du factice.. Elle y découvrira d'autres techniques puis passera par Moscou avant en 2015 de participer au projet du fac similé de Lascaux 4, passage qui m'a vraiment réconciliée avec le roman.
L'écriture de Maylis de Kerangal est virtuose, elle manie la langue et les mots à merveille. Un vocabulaire riche, des mots choisis, un travail très bien documenté. Les phrases sont longues, parfois trop longues pour moi mais il en reste du moins une véritable performance.
L'art du trompe-l'oeil, l'approche de la création peut aussi je le pense être en parallèle, l'art de l'écriture, l'art d'avoir un monde à portée de main.
Ma note : 7/10
Les jolies phrases
Le trompe-l'oeil est la rencontre d'une peinture et d'un regard, il est conçu pour un point de vue particulier et se définit par l'effet qu'il est censé produire.
Elle s'aime d'avance en apprentie manches retroussées prête à en découdre, en artisane bûcheuse ayant choisi une voie modeste pour pénétrer au coeur de la peinture - apprendre le dessin, acquérir une parfaite connaissance des techniques et des produits, commencer par le commencement -; elle aime raconter qu'il faut en passer par là pour se placer ensuite devant une toile, un mur, n'importe quel support, et que ce qui importe arrivera plus tard, ailleurs, dans un autre monde, celui des artistes - et c'est là qu'elle se trompe, et de belle manière.
...l'idée que le trompe-l'oeil est bien autre chose qu'un exercice technique, bien autre chose qu'une simple expérience optique, c'est une aventure sensible qui vient agiter la pensée, interroger la nature et l'illusion, et peut-être même - c'est le credo de l'école - l'essence de la peinture.
Je croyais que je voulais être peintre. Paula sursaute ; je veux peindre, c'est tout!
Il y a des formes d'absences aussi intenses que des présences, c'est ce qu'elle a éprouvé en pressant son front sur le grillage, tendue vers ce monde qui s'ouvrait là, occulte, à moins de dix mètres, une grotte où l'on avait situé rien de moins que la naissance de l'art.
Paula s'est demandé si les peintures continuaient d'exister quand il n'y avait plus personne pour les regarder.
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