Khalil de Yasmina Khadra
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Islamisme, Radicalisation et Terrorisme
Yasmina Khadra explore les chemins de traverse où s'est engagé Khalil, jeune Belgo-Marocain, que l'on trouve à Paris le 13 novembre 2015 en compagnie d'autres kamikazes ayant la mission d'ensanglanter la capitale.
Avec ses deux amis Driss et Rayan il avait usé ses fonds de culottes dans un quartier de Molenbeek et au fil des années leur amitié s'était renforcée, même si Rayan suivait une route différente de la leur : élève studieux, il avait poursuivi brillamment des études supérieures en informatique ce qui lui avait permis d'entrer dans le monde du travail par la grande porte. Driss et Khalil, partisans plutôt de l'école buissonnière, se contentaient de vivoter avec des petits boulots. Jusqu'au jour où leurs pas les conduisirent chez les Frères de la Solidarité Fraternelle et où ils rencontrèrent Lyès, un émir qui les prit sous son aile.
Khalil regarde maintenant Rayan avec un prisme, celui de l'islamisme radicalisé que lui ont inculqué les émirs, les cheiks et les imams qui "veillent" sur lui. Vision bien particulière de notre monde… Rayan n'est pas, à ses yeux, "un bon citoyen intégré" mais plutôt "un vulgaire assimilé". Ce qui ne l'empêche pas de lui demander son aide chaque fois qu'il se sent en danger !
Il tourne le dos également à sa famille, jugeant très sévèrement ses parents, "mon géniteur … un homme arrivé au bout du rouleau et qui tardait à se pendre une fois pour toutes", et sa mère n'est à ses yeux qu'une "masse d'infortune et de soumission … s'écrasant comme une bouse de vache devant son époux". Seule sa sœur jumelle trouve grâce à ses yeux.
Avant d'être convaincu du bien-fondé des prêches des imams, Khalil était lucide. Le jugement qu'il portait sur Lyès était sans concession : " l’adolescent Lyès n’avait ni dieu ni prophète. La religion lui était aussi étrangère que ces formules mathématiques qui vous court-circuitent les neurones avant que vous ayez fini de les recopier sur le cahier. Il n’était qu’un mal luné de dix-sept ans qui ne savait rien faire de ses dix doigts, à part mettre son poing dans la figure d’un gars de la cité d’en face ou bien montrer son majeur à un vigile trop curieux. "
Et pourtant, malgré cette clairvoyance, au fil des jours, il a suivi Lyès et les imams intégristes sur la route de la radicalisation.
Il reconnaît "que le combat avait été terrible" mais leurs prêches avaient fini par le convaincre : " J’estimais avoir trop grenouillé dans mon étang avant de me rendre compte qu’on m'avait confisqué mon statut de citoyen pour me refourguer celui d’un cas social, que mon destin dépendait de moi, et non pas de ces marionnettistes qui cherchaient à me faire croire que mon âme ne serait qu’une prise d’air, que j’étais fait de chiffons et de ficelles, et qu’un jour j’échouerais dans un placard parmi les balais et les serpillières."
Khalil devait mourir en tuant. Mais un dysfonctionnement empêche la mise à feu de sa ceinture d'explosifs. Le ciel qu'on lui avait promis lui échappe… il n'a plus qu'un objectif : comprendre les raisons de cet échec, se justifier aux yeux de ceux qui ont pris le pouvoir sur sa raison afin d'obtenir une nouvelle chance de gagner son paradis.
Alors que pour certains analystes politiques la racine de la radicalisation se trouve dans les prisons, Yasmina Khadra n'y croit pas. " Selon lui, il faut chercher autre part : "Elle [la radicalisation, ndlr] commence sous le toit parental. S'il n'y a pas une autorité ou une respectabilité des parents dans un foyer, alors l'enfant est livré à lui-même". (Bernard Lehut et Nassim Aziki. Les livres ont la parole.)
C'est un roman qui nous touche au plus profond de nous-mêmes. Les évènements évoqués sont encore bien présents dans nos esprits et on a souvent tendance à oublier que Khalil, ce terroriste kamikaze n'est que le héros d'une fiction, qu'il n'est pas fait de chair et de sang. Yasmina Khadra a gagné son pari : tenir le lecteur en haleine du début à la fin.
Et c'est sur cette voie que je l'ai suivi tout au long de ces 264 pages.
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Un fou de dieu
Critique de Ardeo (Flémalle, Inscrit le 29 juin 2012, 77 ans) - 29 mai 2020
Khalil est un « fou de dieu » pourtant son « expérience » ultime va avorter alors il va remettre en question d’abord son entourage -comme il avait remis en question son environnement bruxellois- puis il va lui-même se remettre en question.
Encore un court mais grand roman de Yasmina Khadra.
Un autre coin du monde,… Molembeek
Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 17 janvier 2019
Ce dernier, candidat à un attentat suicide, ne parvient pas déclencher la ceinture explosive alors qu’il emprunte le métro plein de supporters après le fameux match du Stade de France. Driss, son ami d’enfance qui était présent au abord du stade est la seule victime de l’explosion de sa propre ceinture. Il se rend compte que d’une certaine manière on lui aurait caché des choses sur le scénario réel prévu par les commanditaires de ces attentats. Tiraillé entre l’échec de sa candidature au martyr et le jugement que porte son entourage sur le caractère ignoble et injustifié de ces actes, Khalil est encore plus déboussolé qu’avant cette terrible soirée. La mort de sa sœur jumelle quelques mois plus tard au cours des attentats de Bruxelles et sa relation avec Rayan, un ami d’enfance qui lui a réussi, le rend encore plus fébrile et en perte absolue de repère.
Yasmina Khadra s’aventure sur un terrain assez particulier puisqu’il s’appuie sur des faits réels pour y greffer des personnages de fiction allant jusqu’à identifier un des auteurs de l’attentat « raté » du stade de France à un belgo-marocain, qui en aurait été la seule victime, alors qu’en réalité, étaient présents trois kamikazes et une seule victime décédée (hormis les trois terroristes), dont aucun n’était belge ou originaire de Molembeek.
Outre ce mélange hasardeux, il évoque aussi la Belgique avec certaines erreurs ( comme déjà souligné dans d'autres critiques) parlant par exemple de « lycée privé » ou de « banlieue pavillonnaire », … concepts purement franco-français qui n’évoquent rien de concret Outre-Quiévrain.
C’est sans doute dans le ressenti et les émotions de ce candidat kamikaze qu’on trouvera le meilleur de ce roman qui laisse tout de même un peu perplexe.
Comprendre le radicalisme
Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 57 ans) - 7 janvier 2019
Avec ce nouveau roman, Yasmina Khadra se lance dans un nouveau plaidoyer contre la violence, le terrorisme et la bêtise aveugle. Il décortique les rouages de l’embrigadement, du recrutement de jeunes sans but, exploitant les frustrations, les blessures, astiquant l’amertume et la rancœur à grands coups de slogans pseudo-religieux. Cette histoire semble très réaliste et à la fois, le personnage principal n’est pas rendu totalement antipathique ; il reste une part d’humain en lui. Heureusement que la fin nous laisse une note d’espoir…
L’histoire se déroule en grande partie en Belgique, mais l’auteur parle de CM2 et de lycée : petites erreurs…
Le style de Yasmina Khadra est toujours un régal !
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