La route du lilas
de Éric Dupont

critiqué par ARL, le 11 novembre 2018
(Montréal - 39 ans)


La note:  étoiles
Des lilas au Brésil
Un gros tapage médiatique et une avalanche promotionnelle entourent ce nouveau roman d'Éric Dupont, auteur primé de "La fiancée américaine". Je suis toujours un peu prudent quand on essaie de me vendre un livre aussi agressivement, mais d'un autre côté je ne peux qu'applaudir l'efficacité de l'éditeur Marchand de feuilles, difficile à égaler en terme de marketing littéraire. Mais en fin de compte, c'est toujours le roman qui parle, et cette œuvre polyphonique de 592 pages parle beaucoup. Un texte ambitieux, une structure intéressante, parfois une leçon d'histoire, parfois un drame familial... "La route du lilas" promène le lecteur de l'Autriche au Brésil, puis le transporte à Paris, revient à Montréal, à travers les époques et suivant une galerie de personnages féminins forts et la plupart du temps convaincants. L'écriture de Dupont est tantôt comique, tantôt grinçante, sarcastique, légère et pesante, toujours très agréable. Une voix incontournable dans le paysage littéraire québécois.

Dans l'ensemble, j'ai beaucoup de bien à dire de ce roman, que j'ai trouvé excellent aux trois quarts. La seule critique négative de cet ouvrage sur laquelle je sois tombé venait d'une dame qui n'avait pas apprécié les ruptures de tons et les changements fréquents de points de vue. Je suppose que ça dépend des préférences de chacun, mais cette méthode narrative ne m'a pas dérangé. Tant que c'est bon et bien ficelé, je suis preneur. Ce qui m'amène à ma plus grande déception. Le dernier quart, pour une raison qui m'échappe tout à fait, marque une baisse de qualité significative et une déviation tonale mal exécutée. Le roman, jusqu'ici plutôt réaliste, bascule dans une dystopie ridicule qui prive le lecteur d'une catharsis longtemps attendue. L'écriture de Dupont devient badine, le récit s'enchaîne de façon précipitée, comme si l'auteur avait hâte d'en finir. C'est toujours embêtant de terminer un roman dans lequel on s'est autant investi, et qui nous a apporté de beaux moments de lecture, sur une finale en queue-de-poisson aux relents de bâclé.

Ça ne m'empêchera pas de recommander "La route du lilas", ni d'avoir envie de lire les autres Dupont, mais disons que j'attendais mieux d'un texte qui était jusque-là si bien construit. Eh bin, on ne peut pas toujours gagner.