Mamie Luger de Benoit Philippon

Mamie Luger de Benoit Philippon
(Mamie Luger)

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Killing79, le 30 janvier 2019 (Chamalieres, Inscrit le 28 octobre 2010, 45 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (43 201ème position).
Visites : 3 146 

Berthe dégaine!

Présentation de l'éditeur
Six heures du matin, Berthe, cent deux ans, canarde l’escouade de flics qui a pris d’assaut sa chaumière auvergnate. Huit heures, l’inspecteur Ventura entame la garde à vue la plus ahurissante de sa carrière. La grand-mère au Luger passe aux aveux et le récit de sa vie est un feu d’artifice. Il y est question de meurtriers en cavale, de veuve noire et de nazi enterré dans sa cave. Alors aveux, confession ou règlement de comptes ? Ventura ne sait pas à quel jeu de dupes joue la vieille édentée mais il sent qu’il va falloir creuser. Et pas qu’un peu.


Mon avis:
Une nouvelle collection « Equinox » initiée par Aurélien Masson himself, un sous-titre ronflant « Centenaire, féministe…et serial killeuse ! », autant dire que j’étais impatient de me jeter dans cette aventure atypique. Et la Mamie Luger ne m’a pas déçu !
Suite à un grave incident, Berthe se remémore les péripéties qui ont jalonné son existence. Le récit est parsemé de flashbacks et on traverse avec elle toutes les étapes de sa vie. Les époques se succèdent et les hommes aussi. Chaque nouveau souvenir dévoile son lot de surprises et de rebondissements. La vie de la centenaire n’a pas été de tout repos et le lecteur en a pour son argent.
En effet, Berthe Gavignol est un phénomène. C’est une vieille dame de caractère qui a essayé de s’imposer dans un monde organisé par les hommes. Elle a constamment combattu contre les injustices de la société envers le sexe faible et a tenté de faire valoir la place des femmes. Mais plus qu’un plaidoyer pour le féminisme, le roman est une attaque frontale contre la gent masculine. Les réactions excessives de Berthe ont été conditionnées par les comportements souverains de ses maris. Ces attitudes dominatrices n’ont pas vraiment varié au fil du temps et la grand-mère a trouvé une manière assez expéditive de régler les conflits.
Mais ne vous détrompez pas, rien n’est sérieux dans tout ça. Benoît Philippon nous offre juste un pur divertissement. Et comme moi, les adeptes d’humour noir vont se régaler. Les épisodes sont racontés grâce à des scènes, toutes plus truculentes les unes que les autres. Les échanges verbaux entre Berthe et l’inspecteur sont des grands moments de réparties et de facéties. Le sourire a donc été de mise tout le roman.
En conclusion, j’ai trouvé jouissif d’assister aux exploits plutôt musclés de cette petite dame touchante. Sous ses airs de farce, « Mamie Luger » est un sacré roman noir !

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Approche humoristique de phénomènes de société sous forme de caricature

8 étoiles

Critique de Mimi62 (Plaisance-du-Touch (31), Inscrit le 20 décembre 2013, 71 ans) - 13 décembre 2024

Un livre délicieusement immoral, tout au moins si l'on en reste au stade de la lecture de surface;
L'ensemble est présenté comme une sorte de farce.

J'ai lu par ailleurs que plusieurs personnes reprochaient des erreurs historiques. Après vérification, il est bien indiqué qu'il s'agit d'un roman et non d'un essai historique, les libertés sont donc permises, d'autant plus que cela porte bien souvent sur des détails n'ayant aucun impact sur l'histoire. Pour d'autres, c'est du pinaillage où le critique s'emmêle lui-même les pinceaux.
Ce que j'exprime n'est que mon ressenti et non pas, comme pour certains une vérité absolue décrétant que tel ou tel livre est bon ou pas.

J'ai donc beaucoup apprécié le récit d'abord où cette vieille dame, qui a quand même quelques cadavres sur les mains, a un côté touchant voire émouvant, ce que ressent d'ailleurs le personnage de l'inspecteur.
Son langage fleuri apparaît au final comme une sorte de voile. C'est sa façon de cacher sa peine, sa douleur, à tel point que par moment ce voile se déchire et la Mamie laisse apparaître son humanité.
L'écriture est plaisante, souple, sans prétention, sans snobisme littéraire.
Le partage en chapitres plutôt courts participe au plaisir de lecture, plaçant les jalons de cette longue vie difficile.

Après la lecture de surface, c'est bien ce voile qu'il faut soulever. On découvre alors un personne à laquelle la vie n'a pas fait de cadeau. Ce long parcours permet de croiser tous les divers problèmes de société rencontrés par les femmes. Là où certains n'y voient que du féminisme exacerbé, pour ma part, j'y vois le difficile parcours de l'émancipation de la femme.
Là où certains voient une revendication LGB etc... j'y vois la dénonciation de la liberté sexuelle (masculine comme féminine d'ailleurs : être homosexuel dans les année 30 et être femme c'était cumuler deux tares rédhibitoires !). On y aborde aussi la façon dont le viol était perçu par la société, d'autant plus en période de guerre, il est évident, pour parodier Coluche qu'il ne peut y avoir viol vu que l'homme est consentant.
Sans tout énumérer, on rencontre le droit de la femme au travail, la position de dépendance au mari, les violences conjugales et d'autres thèmes très douloureux.

Au-delà de ces situations, les crimes de Mamie Luger, sous une forme caricaturale, expliquent voire justifient pour Mamie Luger, l'absence totale de prise en compte de ces situations par la société et la justice. La caricature se trouve dans ces crimes, ils expriment le ressenti de ces femmes face à l'inaction de la société et de sa justice.

Ces crimes, commis de façon légère, les opportunités qui ont permis de les commettre, l'absence de poursuites judiciaires peuvent apparaître comme irréalistes mais nous sommes dans un roman et dans uns sorte de satire.
Curieusement, la façon dont ces moments qui se devraient d'être tragiques, de par la façon dont cela se passe, permettent d'alléger le propos.

J'ai lu également plusieurs fois, des remarques acrimonieuses sur le fait que cela se déroule à la campagne, qu'il s'agit de stéréotypes. Il faut quand même savoir qu'à l'époque où débute cette histoire la population vivait majoritairement à la campagne. Ensuite, il me semble difficile d'enterrer un corps sous la dalle du séjour de son appartement ou de pendre quelqu'un à son balcon. L'action globale ne pourrait pas se passer en ville. Je n'y vois nulle stigmatisation de la campagne, juste un cadre permettant le déroulement des divers épisodes. Cette Mamie Luger a d'ailleurs une attitude qui ressemble plus aux combattantes de divers mouvements urbains qu'à l'image d'Epinal de la fermière de la France dite profonde.

Je ne me permettrai nullement de donner des conseils de lecture ou d'écriture, je ne détiens pas de vérité universelle mais, il me semble bien que cet ouvrage mérite d'être lu au-delà de son côté loufoque, qu'il traite de problèmes qui, à ce jour, ne sont pas encore résolus.

Adieu Berthe...

2 étoiles

Critique de Homo.Libris (Paris, Inscrit le 17 avril 2011, 58 ans) - 21 juin 2023

Début laissant augurer un roman déjanté, proche d'une version française de "Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire" (Jonas Jonasson). L'histoire part d'une bonne idée : une vieille qui raconte innocemment à un flic sa vie passée à dégommer des types odieux à la façon d'un Nick Corey (1275 âmes, Jim Thompson). Chouette, chouette, je m'attendais donc à du politiquement incorrect, barré au possible, caustique à souhait, mais voilà … l'auteur tourne rapidement au répétitif faute d'imagination dans le développement de son idée initiale et s'embourbe inéluctablement dans le comique de répétition qui tombe à plat, le manichéisme aveugle, le cliché sommaire, le parisianisme nombriliste, le consensuel bien-pensant, et le wokisme primaire.
Tous les hommes (surtout les bouseux) sont des salauds de première, sauf ce grand GI noir, membré comme pas possible, virtuose du sexe, et prévenant comme pas deux ; pourtant, le gars en question cocufie allègrement sa propre femme qui aura la décence de mourir jeune d'un cancer, et laissera sa progéniture aux USA pour retrouver l'héroïne en France… mais comme il est noir, évidemment, il est absous ! L'héroïne joue de l'aiguille entre les jambes de jeunes filles enceintes, sans aucune notion d'anatomie, d'asepsie, de prophylaxie, … mais ça ne gêne pas, puisque c'est l'héroïne. Que ce soit une faiseuse d'ange, c'est pour le bien de ces "pauvres" filles… Au bout d'un moment, je me suis dit qu'il manquait un passage LGBTQZHWX +++, … bingo …
Côté style, l'écriture plutôt simple et facile à lire sert une narration plate et un humour premier degré. Nous sommes loin de la verve et de la crudité d'un Alphonse Boudard, d'un Léo Mallet, ou d'un Antoine Blondin, loin loin du langage fleuri d'un Michel Audiard ; l'auteur lorgne indubitablement vers l'écriture compulsive, pondue au kilomètre, sans plan, ni maîtrise de construction d'un Frédéric Dard !
Pour conclure, je donnerai deux conseils à l'auteur :
1 - de réviser son Histoire : le 11 juillet 1914, la première guerre mondiale n'était pas déclarée (elle ne commence véritablement que début août), le Luger n'est pas une arme nazie, mais allemande, le modèle existait déjà lors du conflit 14-18, etc.
2 – De lire des auteurs qui parlent de la ruralité française en connaissance de cause : Jean Giono, Henri Vincenot, Martial Chaulanges, Émile Guillaumin, Pierre-Jakez Hélias, Claude Seignolle, etc. Cela lui évitera de déraper dans le cliché facile …

Divertissant

6 étoiles

Critique de Pierraf (Paimpol, Inscrit le 14 août 2012, 67 ans) - 23 août 2020

Idéal livre de plage !
L'histoire de la vie de Berthe est saugrenue, tortueuse et jubilatoire. La lecture est facile, avec de très courts chapitres, rapide et sans prise de tête. Il y a un côté San Antonio dans cette histoire et dans l'écriture de B. Philippon.
Ce n'est pas une œuvre fondamentale, mais un bon moment de lecture.

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