A la lumière des étoiles
de Thomas Hardy

critiqué par Fanou03, le 21 mars 2019
(* - 49 ans)


La note:  étoiles
Les abîmes des cieux, les abîmes des âmes
Dans la campagne anglaise à l’ère victorienne, un jeune homme, Swithin St Cleeve, revient habiter chez sa grand-mère. Dévoré par sa passion, l’astronomie, il demande l’autorisation d’utiliser une tour abandonnée pour y déposer ses instruments d’observation. La tour appartient à la belle Lady Viviette Constantine, qui n’a plus de nouvelles de son mari, un homme violent et grossier, parti en Afrique quelques mois auparavant. Lady Viviette va accepter la demande de Swithin. A force de le côtoyer elle va commencer à éprouver, à son corps défendant, des sentiments de plus en plus forts à l’égard du bel astronome amateur. Mais elle est mariée et beaucoup plus âgée que lui...

De Thomas Hardy C’est le deuxième roman que je lis, après le remarquable Tess d'Urberville. Bon j’avoue que j’ai beaucoup peiné à me plonger dans le récit de A la clarté des étoiles, tout d’abord parce qu’il est assez long à se mettre en train et ensuite parce que les deux personnages principaux, Swithin et Lady Viviette, m’ont paru à première vue un tantinet mièvres, avec leur histoire d’amour qui ne cesse de tergiverser. Et effectivement, je dois dire que j’ai bien retrouvé dans ce roman (qui passe pour mineur dans l’œuvre du romancier anglais) les caractéristiques qui m’avaient agacé dans Tess, à la fois cette sorte d’innocence des protagonistes et cette théâtralité qui peut paraît parfois un peu excessive.

Mais comme dans Tess aussi, la densité de l’écriture de Thomas Hardy et l’immense humanité des figures du livre compensent largement ces reproches, qui s’avèrent être finalement des particularités plutôt attachantes. Il faut dire que Thomas Hardy possède l’art subtil et cruel d’exprimer le flux et le reflux des sentiments chez ses personnages. À ce jeu-là il est très fort : la naïveté de Lady Viviette qui sent bien qu’elle est en faute en s’amourachant de Swithin, l’inconstance de Swithin et l’obsession qu’il a de l’astronomie (au point de ne pas voir que la jeune femme lui tourne autour : je lui aurais donné des claques à ce nigaud de Swithin !), la description des différents transports que l’Amour peut faire subir (l’impatience, la mélancolie, la fièvre…) : tout est réussi, surtout que la pression sociale des bienséances et l’implacable malignité du destin vient enrayer le bel élan de deux cœurs qui s’aiment. L’écriture de Thomas Hardy, quant à elle, nous vaut de superbes scènes, tant par leur composition que par leur délicatesse.

Quelques rebondissements et des passages plus ou moins mélodramatiques, la place centrale prise par l’expression des sentiments : A la clarté des étoiles est aussi, et surtout, vous l’avez compris, une œuvre terriblement romantique, avec cette belle thématique des étoiles qui nourrit tout le livre (les comètes annonciatrices d'évènement, les métaphores célestes, la tour abandonnée au milieu de la campagne, transformée en observatoire astronomique où se retrouvent, clandestins, nos deux tourtereaux, les saisons immuables qui passent dans la campagne anglaise...). La nature est ainsi omniprésente, les abîmes des cieux reflétant les abîmes des âmes, et nous rappelant que sous sommes bien peu de chose face aux coups bas de l’existence et à l’immensité de l’univers.