Le paradoxe ambulant : 59 essais
de Gilbert Keith Chesterton

critiqué par Sahkti, le 24 juin 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
La verve ravageuse de Chesterton
"Le philanthrope n'oublie jamais les classes et les métiers. Il dit, en se rengorgeant avec modestie : "J'ai invité vingt-cinq ouvriers à prendre le thé." S'il disait : "J'ai invité vingt-cinq experts-comptables à prendre le thé", l'humour d'une classification aussi simple n'échapperait à personne."


Gilbert Keith Chesterton, quel écrivain fécond… "Le paradoxe ambulant" regroupe 59 essais journalistiques rédigés par GK Chersterton (dont je vous conseille, au passage, "Le Club des Métiers bizarres"). Un choix opéré par Alberto Manguel, qui a malheureusement laissé (et c’est bien dommage) de côté des pans entiers de "Alarms and Discursions" parus en 1910, œuvre pourtant réputée de Chesterton.
Peut-être s’est-il arraché les cheveux devant les choix à faire tant l’œuvre de Chesterton est variée et l’auteur surprenant, alliant avec talent l’ironie et le sens du récit.

Une fois de plus, ces essais confirment l’antipathie portée par Chesterton envers la bourgeoisie bien-pensante et les conventions sociales. Non pas que l’auteur soit réellement un anarchiste, mais il lui plaît de disséquer les petites habitudes de ses contemporains et ce flegme britannique si rigide engoncé dans ses habitudes et ses grands principes.
Chesterton défend un grand principe : ce n’est pas l’imagination ou la fantaisie qui rendent fou, mais un excès de raison, voire de rationalisme. Les intellos et grands penseurs en tous genres qui conservent et mûrissent à vie leurs idées, estimant le peuple incapable de les comprendre ou de les partager, meurent avec celles-ci sans avoir connu le bonheur, si ce n’est le plaisir solitaire de s’être cru au-dessus de la mêlée. C’est féroce et démontré de manière magistrale. Et je ne vous parlerai que très peu, tant je préfèrerais que vous le lisiez, de ce qu’il pense des écrivains, pauvres inspirés de légendes ou histoires existantes qu’ils restituent avec faiblesse et sans grand génie. Pan pour Milton et son Paradis Perdu ou le Faust de Goethe ; seul Shakespeare semble tirer son épingle du jeu. Chesterton n’y va pas par quatre chemins.

Sont également cloués au mur les grands rites charitables de la bourgeoisie ou cette manière de tout classifier, se plaçant judicieusement (et honteusement) au-dessus du lot, s’estimant de ce fait même habilités à donner des leçons de vie à tout le monde alors que quand on regarde ce qui se passe au fond de leurs tiroirs, ce n’est guère reluisant.
Une compilation caustique et riche d’enseignements, beaucoup d’humour et d’ironie, ça fait du bien.
et bien! 7 étoiles

c'est marrant Shakti, je viens de chroniquer un autre livre de Chesterton!!

bon, je vais essayer de trouver celui-ci!

à+
ALF

ALF - Ondres (40) - 44 ans - 24 juin 2004