Anatole
de Arthur Schnitzler

critiqué par Pucksimberg, le 6 octobre 2019
(Toulon - 45 ans)


La note:  étoiles
Anatole, il est frivole ...
Cette pièce se compose de sept saynètes dont le personnage d’Anatole est le pivot. Ce protagoniste accumule les conquêtes et semble incapable de construire une relation amoureuse qui dure alors même qu’il s’interroge au début de la pièce sur la fidélité des femmes. Certains soupçons sur la nature féminine naissaient mais la nature masculine n’est pas plus fiable dans cette œuvre. A travers ces diverses séquences, il éprouve la jalousie, séduit, officialise une séparation … Les femmes auxquelles il est confronté sont différentes, de la bourgeoise à celle de basse extraction sociale, de la femme mariée à l’artiste, toutes sont liées à lui par une rencontre amoureuse, une histoire éphémère ou une relation sérieuse comme cette femme qu’il doit épouser.

Arthur Schnitzler ne s’interroge même plus sur les relations amoureuses, elles sont clairement marquées par le sceau de l’inconstance. Etre en communion totale avec l’être aimé semble bien difficile et les personnages ne semblent jamais heureux de posséder ce qu’ils ont, puis c’est parfois quand tout est terminé que l’on se rend compte de la valeur d’une personne. Il n’y a pas de relations enviables dans cette pièce qui nous confronte à des situations que nous avons sans doute tous vécues. Anatole accumule les relations et ne semble pas pour autant heureux, comme s’il était toujours condamné à recommencer, indéfiniment. Un peu comme Don Juan …

L’écrivain décrit à merveille certaines scènes. Les saynètes sont suffisamment détaillées pour que le lecteur soit remué par certaines situations. Dans les conflits amoureux, les mots sont durs parfois et l’on se plaît à faire mal à l’être aimé pour se venger. Les sentiments forts et contradictoires s’entremêlent. Gabriele semble crever de jalousie alors même que son histoire avec Anatole est terminée depuis un certain temps. Emilie doit supporter des vœux excessifs d’Anatole alors que ça n’a plus lieu d’être. Se dégage aussi une impression que les histoires d’amour ou les passades ne se terminent vraiment jamais. L’on est capable d’être jaloux d’une personne dont on est séparé. A force de n’être plus fidèles, on en vient à dépendre de plusieurs êtres et à devenir quelque peu irrationnels. De nombreuses situations auraient pu alimenter l’œuvre de Freud.

Je préfère l’œuvre narrative d’Arthur Schnitzler, mais son œuvre dramatique ne manque pas de charme et d’intérêt. Il propose souvent des saynètes, qui ne sont conçues pour faire avancer une intrigue en particulier. L’ensemble de ces séquences donne une unité davantage thématique, celle du sentiment amoureux et de son inconstance. Ce sont des variations sur ce motif.