La tanche
de Inge Schilperoord

critiqué par Monocle, le 21 décembre 2019
(tournai - 64 ans)


La note:  étoiles
Un coup de poing
Un coup de poing !

Couronné par le Bronze Owl, nommé cinq fois livre de l'année par la presse, finaliste des plus grands prix littéraires, un premier roman qui a semé le trouble aux Pays-Bas en s'attaquant à un thème tabou : entrer dans la tête d'un homme en lutte contre lui-même et contre ses pulsions pédophiles. Sombre et captivante, une lecture choc et pourtant nécessaire qui parvient à ne pas sombrer dans le voyeurisme.

Notre société ne se remet toujours pas de l'affaire Dutroux, relayée avec ferveur par la presse de l'hexagone trop contente de faire oublier Michel Fourniret (sept meurtres avérés et d'autres non encore élucidés). En Belgique l'incroyable "marche blanche" en 1996 et en France la pitoyable affaire d'Outreau en 1997 ont créé un mouvement de pensées radicales.
Sujet sensible qui provoque des attitudes extrêmes, ce livre publié dans le pudibond pays batave a soulevé un halo de mépris. Chez nous tentez de le chercher dans le catalogue des bibliothèques et il vous faudra autant de perspicacité que pour les "versets sataniques". Le succès de cette édition a été pour le moins timide,
J'ai souvenir de la période où chacun suspectait son voisin des pires abus, des horreurs pratiquées par des notables dans des souterrains et chacun y allait de sa plus belle version. Un climat de médisance collective.
Un jour à la radio j'entendis un témoignage émouvant, anonyme, à contre-courant (j'allais écrire à "contre-coran") de l'immense vague. il s'agissait d'un homme, marié, père de famille qui décrivait son attirance irrésistible envers les enfants. Il disait n'être jamais passé à l'acte mais il parlait de sa souffrance. Je repense souvent à cette séquence radiophonique en me disant que finalement il est bon de ne pas se muer en juge, même si l'acte en soi doit être réprimé.

Je n'irai pas plus avant dans un résumé d'un roman qui ne se résume pas. Si vous vous sentez la force de lire un texte dur malgré la bouffée de sentiments contradictoires qu'il inspire tentez cette curieuse expérience.
Oppression mentale 9 étoiles

Atmosphère déstabilisante dans le sens où l'on veut prendre ses distances avec le pédophile mais il nous entraîne dans sa tête. Ce qui est "carrément " dérangeant, oppressant et déstabilisant.
On a l'impression qu'à tout moment la nature du pédophile peut ressurgir.
On s'attend à ce que Jonathan dérape à chaque instant passé en compagnie de Elke, la petite fille.
Livre très bien écrit dans un style clair et qui s'ajuste bien au thème de la pédophilie.
Là où l'autrice est selon moi très habile dans l'écriture c'est que l'on est dans la tête de ce personnage, odieux par ses pensées et ses actes, jusqu'à la fin.
On referme le livre en conservant un certain malaise.

Jordanévie - - 49 ans - 19 juin 2024