Les Nouvelles aventures de Bruno Brazil - tome 1 - Black Program
de Laurent-Frédéric Bollée (Scénario), Philippe Aymond (Dessin)

critiqué par Shelton, le 27 janvier 2020
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Une très bonne reprise, ou prolongement mythique... Allez savoir ?
1966… C’était il a bien longtemps et je n’avais alors que dix ans… A la maison, le journal Pilote (Mâtin, quel journal !) arrivait à la maison mais pas le journal de Tintin et, du coup, je lisais les aventures de Blueberry, de Tanguy et Laverdure, de Barbe Rouge… C’est ainsi que je n’ai pas lu, dès sa sortie, les aventures de Bruno Brazil, la bande dessinée de Greg et Vance…

Je vous rassure, très vite, un album de cette série s’est retrouvé dans mes mains et j’ai adoré cette série qui pour l’époque détonnait un peu. Elle avait un côté américain, une odeur de polar noir, d’espionnage violent, de héros pour adultes… Attention, ne vous faites pas des idées, cela restait une série publiée dans le journal de Tintin, donc bien lisible par des enfants, enfin des adolescents… Il faut dire que le journal Pilote avait bien secoué le genre BD et que de nombreux jeunes adultes se mettaient à lire de la bédé…

Bruno Brazil est un espion, il appartient aux services américains, il est membre du WSIO. Il prend ses sources du côté de James Bond (certains y verront plus OSS117, tandis que moi je voyais là un prolongement de mon héros de jeunesse Bob Morane), il est élégant, il porte le costume et la cravate, il a des cheveux blancs… L’équipe qu’il rassemble autour de lui, le commando Caïman, est constituée de véritables gueules, d’agents hors normes… Et ils auront l’occasion, ces agents, ces caïmans, de se confronter à des ennemis d’une violence incroyable (du moins pour l’époque !)…

La série va cesser en 1977 mais ce ne sera pas dans la douceur… En effet, Greg et Vance se lancent dans un carnage incroyable pour l’époque… Ils vont faire mourir plusieurs membres du commando, en mutiler d’autres… Les lecteurs du journal Tintin manifestent leur mécontentement, menacent de se désabonner… Bref, on s’en souvient encore… Et la série cesse, faute de combattant, en quelque sorte.

Beaucoup plus tard, en 2019, à la surprise générale ou presque, Bruno Brazil revient dans la bande dessinée. Il a un peu vieilli et, surtout, il est animé par deux nouveaux auteurs, Bollée et Aymond. Il faut dire que Greg est décédé en 1999, Vance beaucoup plus récemment en 2018, et il fallait quand même une petite dose d’inconscience pour prétendre se glisser dans la tête du scénariste Greg pour faire revivre ce personnage mythique. Laurent-Frédéric Bollée s’y colle donc avec un talent certain mais ceux qui le lisent depuis longtemps ne sont pas étonnés. Il faut dire qu’il est le scénariste de nombreuses bandes dessinées et pour faire simple on va retenir le roman graphique Terra Australis (et son prolongement Terra Doloris) parce que c’est grandiose et Apocalypse Mania parce que ce fut une des premières collaborations Bollée-Aymond, Philippe Aymond réalisant les couleurs de cette série… avant d’en devenir le dessinateur !

Très naturellement, Philippe Aymond est le dessinateur de cette série Les nouvelles aventures de Bruno Brazil, il faut dire que le genre lui convient parfaitement et que son travail de qualité sur la série Lady S lui a donné l’occasion de démontrer que le genre espionnage lui allait comme un gant !

Reste à savoir s’il fallait sortir Bruno Brazil de la poussière et l’oubli ? En fait, il ne va pas s’agir de reprendre la série en glissant des épisodes entre ceux de Greg et Vance (non, ce n’est pas la reprise classique façon Blake et Mortimer) mais on retrouve Bruno Brazil vieilli – plus exactement marqué par les évènements tragiques vécus car il n’y a que sept mois qui se sont écoulés dans la vie des personnages – qui, poussé par son colonel, reconstitue un groupe de travail en retrouvant ceux des caïmans qui vivent encore même s’ils ne sont plus aussi vaillants qu’autrefois… Du coup, il y a une note humaine qui domine, Bruno Brazil a des problèmes pour éduquer son fils adoptif, il suit une thérapie pour ne pas sombrer… et je ne vous dis rien d’autre sur les commandos que l’on va retrouver…

Quant à l’histoire, elle est surprenante mais on adhère très vite… Les anciens ennemis des caïmans disparaissent (parfois avec sadisme et cruauté) et on plonge dans un mystère très bien construit par Bollée… Les coups de théâtre sont maitrisés et on attend le volume suivant avec beaucoup d’impatience… Car qui est réellement ce Wordling que l’on recherche avec beaucoup d’énergie et qui inquiète tant le gouvernement américain ?

Comme j’ai beaucoup aimé le dessin et la narration graphique, je suis assez impatient de rencontrer le dessinateur Philippe Aymond et ce sera, bien sûr, dans quelques jours lors du festival international de la bande dessinée d’Angoulême !