Un fou noir au pays des blancs
de Tshibanda Wamuela Bujitu

critiqué par Cameleona, le 28 février 2001
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Hymne à la tolérance
Les tribulations d’un Zaïrois débarquant à Bruxelles, seul en territoire inconnu, ayant dû laisser derrière lui femme et enfants : voilà ce que raconte Pie Tshibanda, et ce n’est pas triste !
Psychologue de formation, il analyse de façon humoristique mais néanmoins très juste les relations qui régissent immigrés d’Afrique et autochtones " bien-pensants " : à travers des exemples concrets, il pointe du doigt les problèmes de communication.
Pie Tshibanda ne se limite pas à les désigner : il va plus loin en montrant qu'ils sont souvent fondés sur des malentendus, inévitables lorsque deux cultures aussi différentes que l’Africaine et l'Européenne se côtoient journellement.
Ecrit dans un style extrêmement simple le rendant accessible à tous, " Un Fou noir au pays des Blancs " est un petit livre instructif pour les deux parties. Les Belges y apprennent qu’en général on ne s'exile pas sans de bonnes raisons, et que c’est un déchirement que de devoir tout laisser derrière soi, pour un pays où la vie - quoi qu'on en dise - n’est pas une sinécure, surtout si l'on n’a pas la peau blanche.
La communauté africaine quant à elle y découvre que le racisme n'est pas aussi répandu qu’elle le pense, et que certains comportements sont plus souvent dus à l'incompréhension qu’à la xénophobie.
Le lecteur passe du rire aux larmes, il se reconnaît aussi parfois dans un personnage, une réaction, et sort de cette émouvante lecture avec l'esprit plus ouvert.
" Allo, l'Office ! " 8 étoiles

Pie Tshibanda est Congolais de la région du Kassaî, psychologue mais aussi réfugié politique. Il arrive dans notre pays en 1995 pour y demander l’asile et nous raconte sa galère. La galère de tous les demandeurs d’asile. Mais lui, eu égard à son éducation et à son tempérament, il ne se cache pas, ne reste pas passif, préfère signaler à ses voisins belges que lui aussi existe en tant qu’être humain. Il prend la parole, parle à des inconnus, se présente à l’église de son village pré-adoptif à la fin de l’office. Il tente de venir en aide à d’autres que lui qui sont encore plus dans la détresse.
Il est maintenant très connu en Belgique, en France grâce à ses remarquables « one man show » auxquels vous avez peut-être pu assister : « Un fou noir au pays des Blancs « et « Je ne suis pas sorcier « . Il y décrit merveilleusement son pays d’origine, le Congo Kinshasa, les qualités et les travers de deux peuples, la Belgique et son ex-colonie. Par son travail de comédien, il nous offre la possibilité de re-découvrir la face cachée des demandeurs d’asile, leur côté positif.
Excellent texte mais je préfère encore ses spectacles qui sont plus étoffés et où là je fus conquis.

Catinus - Liège - 73 ans - 18 juin 2010


Parcours d'un intellectuel africain en exil 8 étoiles

« Un fou noir au pays des Blancs », c'est d'abord une pièce de théâtre, racontée avec beaucoup de verve par l'auteur en personne, que des conflits d'agenda m'ont toujours empêchée de voir. Je me suis alors rabattue sur son livre. J'y ai retrouvé avec beaucoup de bonheur cette verve, cette finesse et cette intelligence dont les spectateurs de la pièce m'ont parlé.

L'histoire commence par l'atterrissage de Pie Tshibanda à Bruxelles et sa confrontation immédiate avec des fonctionnaires mal lunés et une administration kafkaïenne, assimilant tout demandeur d'asile africain à un menteur en puissance. Au fil de son parcours, il nous présente, avec parfois un humour très grinçant, les aberrations procédurales qui jalonnent sa vie d'exilé. Mais plus encore que ses embuches administratives, c'est son immense solitude qui lui mine le moral et brise peu à peu toute sa volonté. La méfiance des personnes avec lesquelles il tente d'établir un contact, la froideur de son pays d'accueil autant que de ses habitants, mode de vie occidental où les gens préfèrent la télévision confinés chez eux aux longues palabres sous un arbre avec leurs voisins. Mais l'homme, psychologue de formation, décide d'aller de l'avant et de concevoir ces réactions négatives non pas comme une agression à son égard, mais comme l'indice d'une autre culture qu'il va entreprendre d'explorer et d'assimiler, jusqu'à totalement s'intégrer dans son nouvel environnement.

Toute la force de ce livre, écrit dans un langage très accessible, réside justement dans l'analyse fine à la fois de la culture belge et de la situation de demandeurs d'asile. Loin de dresser un tableau simpliste reléguant les Africains à d'éternels victimes des Blancs forcément racistes, il décrit tout en nuances les relations et les comportements des personnages qu'il est amené à rencontrer. S'il a effectivement été confronté à du racisme, il démontre qu'il n'est pas le fait uniquement de « belges de souche » mais également de personnes de diverses origines, tout en évoquant avec beaucoup d'émotion les amis dont il s'est peu à peu entourés.

Ce livre est avant tout un message d'amour et d'espoir, qui nous fait passer du rire aux larmes, et, surtout, qui nous permet d'aller à la rencontre d'un homme exceptionnel, en attendant de pouvoir enfin le voir sur scène.

Mieke Maaike - Bruxelles - 51 ans - 2 janvier 2010