Mon ami Robespierre de Henri Béraud

Mon ami Robespierre de Henri Béraud

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire

Critiqué par Saint Jean-Baptiste, le 13 mai 2020 (Ottignies, Inscrit le 23 juillet 2003, 88 ans)
La note : 10 étoiles
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Un enfer pavé de bonnes intentions.

Robespierre a eu deux amis : Camille Desmoulins et Henri Béraud, l’auteur de ce livre. Henri Béraud a été son ami d’enfance. Il était né, comme Robespierre, à Arras. Leurs pères étaient des amis qui fréquentaient le même tribunal de Justice. Maximilien et Henri avaient fréquenté les mêmes écoles ; ils étaient des amis d’enfance inséparables.
Trente ans après la Révolution, le 29 janvier 1825, Henri Béraud vit à Paris, il est magistrat, et il appartient à la justice Royale. Il entreprend d’écrire ses mémoires et raconte sa vie avec son ami Robespierre, d’abord à Arras quand ils étaient enfants, puis à Paris pendant la Révolution.

Les deux amis ont été séparés pendant leur adolescence : Robespierre va étudier au collège Louis-le-Grand à Paris, où il se lie d’amitié avec Camille Desmoulins – qu’il enverra à la guillotine quelques années plus tard – tandis que Henri Béraud obtient son diplôme de docteur en Droit à Arras. Quand Robespierre revient au pays, il est transformé. Lors de ses promenades avec son ami, il lui confie son admiration pour Jean-Jacques Rousseau – qu’il a rencontré en vrai ; c’est devenu son maître à penser ; Jean-Jacques lui a mis dans la tête un projet de société idéale qui sera son credo pendant toute sa vie.

Quand arrivent les États Généraux Robespierre s’établit à Paris et y attirera son ami ; il lui donnera le poste intéressant de juge de paix au tribunal de Justice. Les deux amis redeviennent des inséparables ; ils habitent dans la même famille, chez le menuisier Duplay. Ils passent leurs soirées ensemble, ils sont comme deux frères. Robespierre voulait l’avoir constamment à ses côtés. Quand il a fondé le comité de Salut Public il y a nommé son ami, chef adjoint à la surveillance des lois.

Mais un jour arrive le drame : sous les yeux de Henri Béraud, Robespierre signe le décret illégal qui envoie vingt Girondins à la guillotine. Le législateur avait trahi la loi. C’est la rupture ! L’auteur raconte alors sa dernière rencontre avec Robespierre et c’est dramatique. Le soir même, il s’est rendu dans sa chambre, ils sont seuls, Henri Béraud lui reproche son forfait en face ; Robespierre est de mauvaise foi, il affirme qu’au nom de la Patrie, il a tous les droits. La rupture est consommée. Henri va quitter le foyer des Dupray. Il continue à voir Robespierre au Comité et chez les Jacobins ; leurs regards se croisent, et… Robespierre baisse les yeux. Il a honte mais il persiste dans l’illégalité.

Les mémoires de Henri Béraud deviennent alors pathétiques. Il a gardé son estime et son admiration pour l’Incorruptible mais leur amitié est rompue. Pourtant aux heures les plus difficiles de Robespierre, son ami reviendra à ses côtés, il l’assistera jusqu’à ses derniers moments. Son amitié l’a emporté sur sa répugnance.

J’ai rarement lu un livre aussi émouvant. Il est magnifiquement écrit dans le style du XIXème mais sans la moindre affectation. Il raconte une page dramatique de l’Histoire de France en même temps que l’histoire d’une grande amitié. L’auteur raconte beaucoup de souvenirs, de conversations et de confidences qu’il est le seul à avoir recueillis. Ce livre est un témoignage essentiel pour la connaissance de Robespierre. Il a servi de source à tous les biographes de l’Incorruptible. Et pourtant, Robespierre gardera son mystère à jamais. Il a confié à son ami des confidences sous le sceau du secret et son ami entend respecter sa parole, il ne dira rien.

A la lecture de ces mémoires, on en viendrait presque à aimer Robespierre, ou pour le moins à le respecter, peut-être même à l’admirer. Pourtant il semble bien, qu’à un moment donné, il se soit laissé griser par le pouvoir. Mais ses intentions étaient pures et son amour pour la Patrie était sincère et absolu. Jean-Jacques Rousseau lui avait dit que l’homme était bon par nature et hélas ! il l’avait cru. Son utopie a été de vouloir établir un régime vertueux peuplé d’hommes vertueux. L’enfer est pavé de bonnes intentions ; et c’est bien avec les meilleures intentions du monde que Robespierre aura précipité la France dans un enfer.

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Les éditions

  • Mon ami Robespierre
    de Béraud, Henri
    Plon / Le roman des grandes existences
    ISBN : SANS000057816 ; 01/01/1927 ; 285 p. ; 12 X 19 X 2
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  Henri Béraud 22 Alceste 11 juin 2020 @ 14:41

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