Qui sème le vent
de Marieke Lucas Rijneveld, Daniel Cunin (Traduction)

critiqué par Saule, le 16 septembre 2020
(Bruxelles - 59 ans)


La note:  étoiles
Le mal-être d'une enfant
Ce premier roman d'une jeune hollandaise de 28 ans (elle avait déjà écrit un livre de poésie reconnu), qui vient d'être couronné du prix Booker international, est le genre de livre qui ne laisse pas indifférent : soit on aime beaucoup soit pas du tout. Personnellement j'ai beaucoup aimé, rares sont les livres qui nous transportent autant dans un monde imaginaire, en l’occurrence celui d'une enfant à l'aube de l'adolescence dans une famille de paysans en Hollande.

Le roman nous plonge dans le monde de "Parka", une enfant à l'aube de l'adolescence, dans une famille très religieuse d'agriculteurs dans le nord de la Hollande. Le livre débute à la Noël 2000. Le frère ainé part faire du patin sur le lac et ne reviendra pas. Sa mort bouleverse la famille et en particulier la narratrice. Suite à l'accident celle-ci ne quittera plus sa parka rouge, et tout le monde l'appelle "Parka" ("Jas" en Hollandais et dans la traduction anglaise). La jeune fille - elle a dix ans au début du roman et douze ans à la fin - ressent un sentiment de culpabilité et ne parvient pas à faire le deuil. Ses parents sont anéantis et se détournent involontairement des autres enfants, qui cherchent désespérément leur affection

Suite au décès, la famille est un peu disloquée, les enfants se construisent un monde qui leur est propre. Ainsi ils cherchent le salut "De l'autre côté" (sans qu'on ne précise jamais à quoi ça fasse référence même si la fin donne un éclairage possible). Le livre est parfois cru, car la petite fille qui est à l'aube de l'adolescence est obsédée par des images à connotations sexuelles mais aussi scatologiques et les enfants se livrent à des jeux parfois cruel avec des animaux. Elle est obsédée par un sentiment de culpabilité et la dislocation de la famille lui fait perdre les pédales, ainsi elle fait souvent référence à Hitler et à des juifs qu'elle imagine cachée dans la cave de la ferme. J'ai particulièrement aimé la relation de la jeune fille avec sa petite soeur, Hanna, qui est à l'inverse de Parka une petite fille pleine de vie et qui s'en tire mieux.

J'ai trouvé ce monde imaginaire et plein d'images un miracle de la littérature. J'ai regardé plusieurs interviews de l'auteur sur youtube et elle est très sympathique, ça donne un éclairage différent à son roman qui est par contre fort sombre (même si il y a de l'humour).
... ne récolte que mon avis négatif 2 étoiles

Qui sème le vent engendre une histoire qui n’accroche pas dans une atmosphère tantôt insipide mais aussi glauque

La narratrice est incarnée par une jeune fille de dix ans, censée être l’autrice, qui vit dans une ferme isolée des Pays-Bas. Cette ambiance en apparence très bucolique est décrite plutôt comme le royaume de parents autoritaires, dépressifs ou peu fiables.

La mort du grand frère noyé dans les eaux glaciales alors qu’il était parti patiner provoque la déprime des parents, le délaissement des autres enfants, la culpabilité et les hypocrisies.

Ce roman laisse planer un climat douteux, voire malsain, qui laisse une mauvaise impression. Le style est assez classique, mais ne permet pas de sauver un récit qui ne m’a absolument pas séduit.

Pacmann - Tamise - 59 ans - 2 juin 2023


Dans la Hollande profonde. 6 étoiles

L’auteur(e) a son portrait sur la couverture. Elle a un air de chien battu ; mais quand on a terminé son livre et qu’on revoit son portrait on s’aperçoit qu’elle est gênée de ce qu’elle vient d’écrire… Et ça se comprend ! Certains passages sont carrément porno-scatologiques et on se demande comment une petite jeune-fille de douze ans a pu écrire des histoires aussi répugnantes.

Pourtant on s’accroche à ce récit. Ça se passe dans une ferme isolée de la Hollande profonde. La famille est protestante d’un genre rigoriste comme on n’imagine pas que ça puisse encore exister. Dans cette famille on n’apprend pas à vivre, on se tait, on vit avec le fils aîné qui est mort et qui prend beaucoup de place et, en toutes circonstances, on se récite des sentences tirées de la Bible. Les animaux de la ferme font partie de la famille et les filles font leur éducation sexuelle en observant leur élevage de crapauds… Tout ça nous est raconté sur le ton faussement naïf d’une enfant délurée, obsédée par la mort et dotée d’une imagination franchement déboussolée.

Le bandeau du livre nous dit que ce récit est « la nouvelle sensation littéraire européenne ». A mon avis, c’est un peu exagéré. Il ajoute que c’est « poétique, original, et débordant d’idées ». Pour ça oui je suis d’accord – du moins partiellement parce que je n’ai vu de poésie nulle part – mais, question originalité et débordement d’idées, j’ai été comblé. Je peux même dire que j’ai été complètement bluffé par cette histoire.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 30 juin 2021