La cigale du huitième jour de Mitsuyo Kakuta

La cigale du huitième jour de Mitsuyo Kakuta
(Yôkame no seni)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Mimi62, le 15 octobre 2020 (Plaisance-du-Touch (31), Inscrit le 20 décembre 2013, 71 ans)
La note : 8 étoiles
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Un livre que l'on ne referme pas dans l'indifférence

Le thème du roman se révèle dès les premiers mots : Kiwako, jeune femme mal dans sa peau, voisine d'une famille avec un bébé (Erina) , famille dont elle a épié le fonctionnement, profite de ce que le couple laisse le bébé seul pendant un petit moment, pour s'introduire dans l'appartement et regarder cet enfant. En mal d'enfant, elle se laisse submerger par l'émotion, se sentant investie de la nécessité de mieux protéger cet enfant. Leur destin bascule alors : elle prend le bébé dans ses bras et ne sachant le reposer, elle l'emmène avec elle.
C'est alors le début d'une fuite qui durera quatre ans avant qu'elle ne soit arrêtée et que l'enfant regagne sa famille naturelle.

Au cours de cette fuite, elle devra changer de lieux, d'hébergement. Elle côtoiera des personnes différentes qui, à défaut de l'aider activement, ne la dénonceront pas ou alors l'accepteront en ignorant son histoire ou en trouvant un intérêt propre à vouloir ignorer ce passé. Voyage dans un Japon actuel prisonnier de traditions.

Le dernier tiers de l'ouvrage est consacré à Erina. Kiwako est arrêtée et Erina retrouve sa famille.



Un livre à deux aspects
La fuite, conséquence du rapt, est bien menée, avec ses rebondissements, ses errances. ses angoisses, ses doutes, ses incertitudes, ses inquiétudes perpétuelles du lendemain. La fuite avec ses rencontres, ses lieux, ses structures diverses, véritable voyage dans une société japonaise encore bien engoncée dans ses traditions. Elle passera ainsi de la personne marginale à un groupement d'accueil voisinant l'esprit secte. Elle arrivera dans un île où elle trouvera un travail et une vie sociale, l'île pouvant peut-être être considérée comme une symbolique de la vie en dehors d'une société, isolée et protégée de celle-ci.

Le ressenti des protagonistes : la ravisseuse, les parents, l'enfant.
Au dernier tiers du livre, le narrateur change et donc, avec lui, le point de vue. Alors que cela arrive parfois de façon tout à fait artificielle, c'est ici tout à fait naturel. La ravisseuse ayant été arrêtée, pour elle l'espace, le temps, la société s'arrêtent.
La petite fille enlevée est devenue adulte et se retrouve à gérer tous ces événements, son passé, son ,présent et son futur.

Il ressort de tout cela des interrogations sur le vécu des parents, leur responsabilité, la motivation de la ravisseuse, la place de l'enfant enlevé lors de son retour auprès d'une soeur née après l'enlèvement, sa relation à la ravisseuse, la place de l'enfant adopté et indirectement de l'enfant abandonné, la place de celle qui a pris la place de la mère (et donc son image) pendant ses premières années de vie, l'importance de la famille naturelle ou de la famille de coeur, l'importance d'un nom, d'un prénom, la façon de se projeter, comment fera-t-elle si elle devient mère à son tour...


L'écriture est alerte, soutenue. Alors qu'habituellement je m'arrête pour noter tel ou tel passage plus marquant, dans cette lecture, je ne me suis arrêté sur rien, non pas parce que cela n'en valait pas la peine mais parce que la narration, tant par sa construction, sa rédaction que par le sujet était très prenant, Rien ne venait arrêter ce déroulement.

Pas un page turner mais un livre prenant et riche que l'on ne referme pas dans l'indifférence, quelque chose résonnera en soi, chacun ayant son propre écho.

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