La grande épopée des chevaliers de la Table Ronde, Tome 1 : Arthur et Merlin
de Sophie Lamoureux, Olivier Charpentier (Dessin)

critiqué par Fanou03, le 13 novembre 2020
(* - 49 ans)


La note:  étoiles
Belle adaptation pour la jeunesse
Ce premier tome de la La grande épopée des Chevaliers de la Table Ronde, qui aborde l’enfance du roi Arthur et son accession au trône de Bretagne, offre une version à la fois exigeante et adaptée au jeune public (aux alentours d’une dizaine d’année je dirais). L’ouvrage est en effet constitué de cinquante courts chapitres (de quatre à cinq pages chacun) permettant de faire respirer et de rythmer le récit. Cette structure se prête également bien à la lecture à voix haute (comme le suggère d’ailleurs le quatrième de couverture) par un adulte en particulier.

L’intérêt que je vois à l’ouvrage est qu’il s’avère beaucoup plus riche que les péripéties arthuriennes bien connues de tous, qui étaient à peu près ma culture générale en la matière. On y voit par exemple le jeune roi partir à l’aventure avant son sacre et en profiter moult redoutables adversaires (le Chevalier Poisson, le géant Rithon, le géant Dinabuc), épisodes qui m’étaient inconnus. Sophie Lamoureux a apparemment mixé fort intelligemment plusieurs textes de référence, tout en donnant à son adaptation une touche d’originalité, avec ce fameux « Papegau » (sorte de perroquet) qui accompagne Arthur et chante ses exploits, tradition issue d’un récit anonyme du quatorzième siècle, Le Chevalier au Papegau.

Un point important à souligner est la dimension tragique de cette version. Bien sûr les faits de Chevalerie et la partie purement épique sont exaltants et raviront le jeune public auxquels ils sont destinés : mais l’ambiance générale est quand même assez sombre. Sophie Lamoureux a fait le choix de ne pas édulcorer la cruauté des légendes arthuriennes. Les combats sont sanglants (voir la bataille contre les Saxons au cours de laquelle « le fleuve Glen se transforme en mer de sang »). Les innocents ne sont pas épargnés par les coups du destin (Arthur ne parvient pas à sauver Hélène, la nièce du Duc d’Armorique, tuée par Dinabuc ; Viviane enlève Lancelot à ses parents dans une scène déchirante). Et je ne parle pas des relations familiales troubles de Arthur (les circonstances de la conception de Arthur ; le jeu ambiguë de Morgane qui a eu une relation sexuelle avec son demi-frère). Avec tout ça on comprends que Arthur perd petit à petit peu ses illusions. Bref, nous ne sommes pas chez Merlin l’Enchanteur de Disney. Selon l’âge de l’enfant auquel vous destinez le livre, la médiation d’un adulte ne sera peut-être pas inutile.

L’ouvrage ouvre plusieurs réflexion, tel les relations entre le Bien et le Mal, intimement imbriqués (à l’image de la figure à la fois paternelle et inquiétante de Merlin), ou sur le sens à donner à la vie (« Le Graal est la réponse à toutes les questions que se posent les Hommes depuis la création : quel est le sens de la Vie ? Pourquoi sommes-nous sur cette Terre ? Pourquoi devons-nous mourir? »). Le livre est donc remarquable par son ambition, par sa volonté de rendre accessible la légende arthurienne tout en ne la déflorant pas. Les illustrations d’Olivier Charpentier, basées sur une modernisation de l’iconographie des miniatures médiévales sont quant à elles également très réussies et donnent beaucoup de chair et de poésie aux aventures du roi Arthur.