Le temps gagné
de Raphaël Enthoven

critiqué par Blue Cat, le 3 janvier 2021
( - 60 ans)


La note:  étoiles
Règlement de comptes chez les bobos
En terminant ce livre, un peu sidérée, j'en conclus que sa seule raison d'être est la vengeance. Je ne vois rien d'autre, vraiment. Raphaël Enthoven, prof de philo version pour 'les nuls', règle ses comptes sentimentaux sur la place publique.

Vengeance envers le père, l'éditeur Jean-Paul Enthoven, pourtant solaire durant l'enfance de Raphaël. Puis de plus en plus méprisé par le fils, pour son autocomplaisance et son égocentrisme. Où l'on conclut qu'il s'agit bien là de caractères héréditaires. Avec, en option, un narcissisme qui frôle parfois le délire chez le fils. Oui, Raphaël se trouve très beau et se prend pour Proust (ne pas rire...).

Vengeance envers le beau-père, mari de la mère, psychanalyste violent et macho. Karatéka à ses heures perdues. Il serait tout prêt à faire un procès en diffamation à beau-fiston, paraît-il.

Vengeance envers la mère, décrite comme une dinde stupide et cruelle, totalement assujettie à son mari. Cette mère retrouvera grâce aux yeux de son fils une fois le beau-père quitté. Oedipe quand tu nous tiens...

Mais surtout, vengeance envers Justine Levy, sa première épouse, fille de Bernard-Henri Levy.
Et là, il se défoule le Raphaël. Il n'a jamais voulu de ce mariage d'opérette combinouillé par les deux pères, amis intimes. Ah bon ? Il s'agirait donc d'un mariage forcé ?

Justine Levy avait donné sa version de l'affaire dans 'Rien de grave', que j'avais lu et plutôt apprécié. Aucune parole réellement insultante, aucune obscénité envers son ex. Seule Carla Bruni en prenait pour son grade, version poupée Barbie accro à la chirurgie esthétique.

En revanche, Raphaël, lui, nous fait témoin des défécations de Justine, de ses pratiques sexuelles, et pour tout dire du dégoût qu'elle lui inspire. Elle se serait fait avorter à cinq mois de grossesse parce que : 'Elle ne s'était même par rendue compte qu'elle était enceinte. A cinq mois, putain !'. Euh… lui non plus ne s'est rendu compte de rien et se lavait les mains de cette grossesse. Et d'après elle, c'est lui qui ne voulait pas de cet enfant.

Le père de Justine, BHL, est décrit comme un has been ridicule, ruisselant de narcissisme et dont le goût du pouvoir ne reste plus à prouver. Certes, certes, mais il n'est pas bien élégant de mordre la main qui vous a introduit dans 'le grand monde', ou disons plutôt le monde friqué. La scène où il est convoqué chez BHL pour s'expliquer sur les rumeurs de liaisons avec Carla Bruni, alors qu'il est encore marié à Justine, atteint des sommets de lâcheté crasse. Raphaël nie tout en bloc et approuve BHL qui trouve que ce serait vraiment très très dégueulasse de faire ça à Justine. Il faut dire que BHL précise qu'il lui cassera très volontiers la gueule si il y a un mot de vrai dans ses rumeurs. Narcisse a frémi à l'idée d'un bleu sur son visage sublime.

Quant à l'épouse de BHL, Arielle Dombasle, elle est définitivement massacrée dans une scène se déroulant au bord de la piscine du palais BHLien de Marrakech grouillant de domestiques. Scène où il décrit les circonvolutions acrobatiques de la dame afin d'attirer le regard de son seigneur et maître de mari, tout en cachant tant bien que mal ses vieilles fesses sous un paréo.

Mais au-delà de cette longue scène de crime littéraire (520 p.) jonchée de six cadavres, il y a une lumière. Oui, Raphaël a eu une apparition. Plus lumineuse que la Vierge apparue à Bernadette Soubirous, c'est la vision de Carla Bruni en maillot de bain au bord de la fameuse piscine du palais BHLien de Marrakech, qui a foudroyé notre nigaud scribouillard. Carla Bruni et son petit cul pommelé, rien à voir avec le vieux cul de la Dombasle, n'est-ce pas.

Et tout ceci se passe sous les yeux de sa femme Justine, de son père compagnon de Carla Bruni et venu avec elle, de son beau-père BHL puant certes mais offrant généreusement des vacances de rêve à tout ce petit monde, et de la maîtresse de maison Arielle Dombasle (planquée sous son paréo, donc). Vous suivez toujours ?

Ah ben, moi je dis que c'est pas joli joli tout ça !

Le livre s'achève sur son premier séjour dans la propriété de Carla Bruni sur la Côte d'Azur, Il n'en revient pas de son aubaine, tellement ébloui qu'il en écarquille les yeux encore plus que d'habitude. Ne riez pas amis lecteurs, le sublime frôle bien souvent le grotesque.

Tant de vulgarité, de narcissisme, d'impudeur, d'étalage de fric façon nouveau riche, d'absence de tout sens moral, cela laisse pantois.

Il se dit que Raphaël Enthoven ne comprend pas les réactions négatives déclenchées par son livre. Papa serait blessé à mort, et BHL envisagerait de le suspendre à un croc de boucher style Sarkozy/Villepin. Je n'ose imaginer l'indignation d'Arielle Dombasle, entre deux trilles à la Castafiore.

Quant à Justine Levy, c'est bien la seule que je plains sincèrement. Aucune épouse, quelles que soient les raisons du divorce, ne devrait être traitée ainsi sur la place publique. En fait, je sais à quoi ce torchon imprimé me fait penser finalement : à une sex-tape revancharde balancée sur les réseaux sociaux. Nos footeux n'ont qu'à bien se tenir. Chez les diplômés aussi, on sait être classe.

Lecteurs, gagnez du temps, passez votre chemin.