Guet-apens rue des Juifs
de Anne Villemin-Sicherman

critiqué par Hamilcar, le 18 février 2021
(PARIS - 69 ans)


La note:  étoiles
Complots prérévolutionnaires
Avril 1770. Louis XV est au pouvoir. Dans la ville fortifiée de Metz, principale étape pour ceux venant de Prusse, l’intendant Charles Alexandre de Calonne est le premier magistrat de la cité, Louis de Conflans, maréchal d’Armentières étant le commandant en chef des Trois Evêchés.
Un mal effroyable s’abat sur les écuries de l’intendance. Plusieurs chevaux meurent et contaminent les plus valides. M. de Calonne demande à l’artiste-vétérinaire Augustin Duroch d’intervenir.
Jeune diplômé de l’école royale vétérinaire de Lyon, Duroch ne fait pas forcément l’unanimité auprès d’éleveurs habitués aux recours d’empiriques, sortes de rebouteux sorciers qui dispensent des soins plus ou moins crédibles. Mais sa compétence fera qu’il y trouvera sa place.
Bien évidemment, rien ne se fera sans mal, et la jalousie, voire l’inquiétude de certains ira jusqu’aux éliminations physique du marchand de chevaux Moshe, d’empiriques et de femmes dont une sorcière intervenante dans les écuries de l’intendance.
A cela se rajoutent les agressions et l’enlèvement dudit vétérinaire. Mais les circonstances ne sont pas forcément en faveur d’Augustin Duroch qui de victime se retrouve visé par l’enquête comme possible meurtrier.
Heureusement pour lui, il garde le soutien de l’intendant Calonne et du gouverneur d’Armentières.
Mais rien n’est simple. Calonne est l’objet d’une fronde venant du parlement de Metz, vite alimentée par les positions complotistes d’autres parlements de province. Mais l’autorité de Calonne ne faiblit pas et sa responsabilité ne faillit pas lorsqu’un autre complot se dessine, l’enlèvement de la jeune archiduchesse d’Autriche lors de son voyage pour Versailles. Il en est informé par un message chiffré que transportait le marchand de chevaux Moshe dans la doublure de son manteau. La Prusse voulait éviter le rapprochement de l’Autriche à la France par le futur mariage de Marie-Antoinette et du dauphin Louis.
Et c’est Augustin Duroch qui trouvera la clé du chiffrage.
Ce livre est passionnant de bout en bout. Les faits s’imbriquent les uns les autres avec cohérence. On se laisse porter par des évènements certes nombreux, mais crédibles.
Avec son élégance de style (quel bon usage du plus-que-parfait et des subjonctifs !) et l’érudition dont elle fait preuve, Anne Villemin-Sicherman nous invite dans l’univers des lumières, des complots, du quotidien prérévolutionnaire.
Et la cité de Metz trouve ici sa place, au-delà du simple décor. Elle est partie prenante de l’histoire et invite ceux qui ne la connaisse pas à la découverte de ses quartiers, de son microcosme au XIII° siècle.
Un bien bel écrin pour une histoire rondement menée.