Nuit close de Philippe Leuckx
Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie
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Poèmes de deuil
Philippe, je le connais depuis quelques années maintenant, ce sont plutôt nos mots qui se croisent, les miens s’inclinant avec respect, ils n’ont ni le prestige ni l’élégance des siens, sur le blog de notre ami commun. Ainsi, je sais que Philippe a traversé des épreuves difficiles dont une au moins fut très douloureuse. Si je l’évoque aujourd’hui, alors que la pudeur me demanderait plutôt de la taire, c’est parce que j’en ai retrouvé la marque, la trace, l’odeur et d’autres stigmates dans ce recueil où Philippe rassemble uniquement des sizains, ce qui pour moi est rare, c’est la première fois que je lis un recueil composé exclusivement de cette forme de vers.
Cette « Nuit close » fait-elle référence à cette longue période d’attente angoissante et à cette toute aussi longue maladie qui a emporté une personne qui lui était particulièrement chère ? Les stigmates incrustés dans le texte semblent bien l’indiquer. On y retrouve, le souvenir des nuits d’angoisse qu’il a fallu affronter :
« On se rempare / comme on peut / on taille dans le noir / la limite du cri / l‘offrande à peine sûre / de ses poumons blessés ».
Et les doutes qui ne laissent pas espérer des jours plus sereins que les nuits d’angoisse : « On ne sait presque rien / des promesses de l’aube / … ».
Ce recueil est ainsi marqué des angoisses et des peurs de son auteur mais aussi de l’issue et de la fatalité dont il craint l’inéluctabilité. C’est de la poésie à l’état pur, écrue, sans aucun artifice. Le son, le rythme, les mots, les vers, tout est talent à l’état brut. Comment ne pas rester sous le charme quand on lit des vers comme celui-ci : « Laisse encore / l’empreinte / sur l’aube de tes jours / … ».
Au fil de ces sizains, on suit Philippe dans ce qui fut son calvaire à travers de qu’il a vécu, ce qu’il a vu, ce qu’il a senti, ressenti, ce qu’il a craint, ce qui pouvait advenir, ce qui est advenu… tout est émotion à l’état pur, originel, mais aussi beauté jusque dans la douleur !
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Le lent registre du coeur
Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 30 mars 2021
Où un homme comme enfermé dans sa nuit, à l’ombre de lui-même, retiré du monde, guette les signes extérieurs de vie et "les promesses de l’aube".
"Tu marches
dans le désert étoilé
sous les lampes
qui battent
à peine si le cœur
presse cette étrange lumière"
Il a pour seul viatique ses mots, son sang, cette "couleur du pauvre". Sa palette est pâle, le tableau sombre. Il vit à l’économie, de peu et du "rien qui tremble". "L’air [est] décontenancé, les jours [sont] longs. (…) La mémoire / pour un peu / est une voix aimante / en recel de visages."
"Nuit close
comme un fruit dispensé
par la main
qui a faim de paix
ce lait des meurtris
dans la bouche d’ombre"
Touché au plus profond, le poète ne cesse toutefois pas de s’exprimer dans "le lent registre du cœur".
Au "Vienne la nuit sonne l’heure"… d’Apollinaire, Leuckx répond :" Vienne la suie cette mue / des heures lentes…"
"La veine de nuit" bat si fort qu’on sent "l’aube [qui] vient", à telle enseigne qu’"on se prend à confondre / joie lumière". Et "la lampe toujours éveillé"e dans la nuit appelle la lumière, l’ouverture des portes du jour.
"Voilà
nuit presque dépareillée
on va recoudre les souffles
se prendre en mains
sans se retourner
le cœur voilé de vie"
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