Le petit déjeuner des champions
de Kurt Vonnegut

critiqué par Septularisen, le 26 mars 2021
( - - ans)


La note:  étoiles
COMPLÈTEMENT DÉJANTÉ!
«Le petit déjeuner des champions » (1973), est avant tout l'histoire de la rencontre entre deux hommes, que tout oppose. Le premier est Kilgore Trout, obscur auteur de SF, très prolixe (il a publié 117 romans, tous plus déjantés les uns que les autres et plus de 2.000 nouvelles), mais n’a jamais réussi à véritablement percer et à vivre de ses écrits. Les seules publications qu’il a eues sont dans des revues pornographiques de bas de gamme. Il vit seul et passe ses soirées à discuter avec son seul ami, Bill, une perruche. Le second est Dwayne Hoover, c’est un riche homme d’affaires, qui possède de nombreux biens dans l’immobilier, la restauration et est concessionnaire de la marque de voiture Pontiac de sa petite ville de Midland City. Son unique ami est son chien Sparky.

Les deux vivant à des milliers de kilomètres l'un de l'autre et n'ayant aucun lien de parenté, n'avaient donc aucune chance de se rencontrer un jour. C'était sans compter sur Eliot Rosewater, un milliardaire excentrique et philanthrope, véritable fanatique des écrits de Kilgore Trout, et qui l'a donc invité à un festival d’art qu'il organise. Lequel par le plus grand des hasards, se tiens justement à Midland City!
L’arrivée de Kilgore Trout à Midland City et sa rencontre impromptue avec Dwayne Hoover, va définitivement bouleverser la tranquille vie de ce dernier et de la petite bourgade…

Kurt VONNEGUT Jr. (1922 – 2007) nous raconte ce livre comme si nous ne connaissions rien à ce monde et venions juste de débarquer d’une soucoupe volante! La preuve? Il se permet de mettre des dessins (oui, oui vous avez bien lu, des petites illustrations) de ce qu’il est en train de nous décrire entre deux paragraphes de son texte. Des fois que vous ne sachiez pas ce qu’est une poule, un serpent, un camion ou une pomme!

Mieux encore, en plus du récit des deux personnages principaux (et d’une foule d’autres secondaires, tous plus déjantés les uns que les autres…), il se permet même de briser le «quatrième mur» et de mettre en scène lui-même, dans son propre roman, en train de discuter avec ses personnages et de spéculer avec ceux-ci de leur avenir! Complètement déjanté vous dis-je!

Mais il y a plus, puisque c’est aussi une critique sociale acerbe et au vitriol de la société américaine de l’époque, avec tout ce qu’elle peut compter de racisme, de misogynie, d’artificiel, d’absurde, de capitaliste, etc. Le tout servi par une écriture d’un humour (parfois très noir) incroyable. On sourit des fois vraiment franchement et on se demande souvent où l’auteur a été chercher tout cela? C'est très simple et très facile à lire, avec des chapitres très courts.

Le texte est toutefois inégal. Certains passages sont enlevés, dans un style unique, beau, flamboyant, véritablement en «état de grâce»… Mais, parfois le tout devient très «lourd», avec trop de digressions, d'aphorismes, de circonvolutions et de détours, comme si l’auteur voulait en faire trop ou en rajoutait trop. Ainsi p. ex. sa manie de commencer à présenter tous les personnages masculins par les mensurations de leur sexe! Franchement à la longue cela devient (très) lassant!

Que dire de plus de ce roman qui ne ressemble à aucun autre? C’est surréaliste, drôle, dingue, dérangeant impertinent, efficace, absurde, excessif, cynique, piquant, naïf, tragique, comique, critique, candide, loufoque, amusant, satirique… En un mot? Typiquement américain!
Si certaines envolées lyriques de l’écrivain sont vraiment magnifiques, et son style unique et sans pareil, l’action tarde elle à venir, et sur la fin, l’histoire tourne un peu (beaucoup…) en rond et est très répétitive! Je n’hésite donc pas à dire qu’à certains moments je me suis ennuyé ferme et que je ne voyais pas l’heure que la fin de l’histoire arrive. Je n’ai pas beaucoup aimé non plus, la propension de l’auteur à se mettre en scène comme le «Dieu» tout puissant de l’histoire, avec droit de vie ou de mort sur chaque personnage et de nous raconter tout ce qui allait suivre dans le roman… De plus, la fin bâclée et expédiée en quelques pages, n'est vraiment pas à la hauteur du reste du roman, ni de ce que le lecteur attendait vraiment! Une très grande déception donc!

Pour conclure, je dirais que ce n’est certainement pas le livre à lire pour partir à la découverte du chantre de la «contre culture» américaine, par contre si vous avez aimé ses autres livres… Pourquoi pas?..