La brodeuse de Winchester
de Tracy Chevalier

critiqué par Pascale Ew., le 12 avril 2021
( - 57 ans)


La note:  étoiles
Histoire d'une émancipation
Dans l’Angleterre de l’entre-deux guerres, qu’il est difficile pour une « vieille fille » de trouver sa place et sa légitimité. Violet quitte sa mère acariâtre et tyrannique à 38 ans pour mener sa vie à Winchester. Elle peine à survivre avec son salaire de dactylo, mais fait quelques connaissances. Cela l’entraîne à devenir brodeuse dans un cercle très fermé et très exigeant réalisant des coussins pour la cathédrale. Violet se lie d’amitié avec quelques femmes et avec Arthur, un sonneur de cloches de quinze ans son aîné. Elle a perdu son fiancé dans la guerre, ainsi que son frère, et son père est décédé il y a peu.
Ce roman présente le petit côté désuet qu’affectionne Tracy Chevalier. Elle y conte le quotidien de personnages qui nous deviennent attachants. Violet se sent en trop dans une société où le rôle de la femme se réduit à son mari et ses enfants, où les hommes ne sont plus assez nombreux et où rien n’est prévu pour qu’une femme vive de manière autonome. Violet se débat entre la précarité, le danger d’être une proie, le qu’en-dira-t-on et le corset de la surveillance et de la curiosité malsaine. Elle devra faire preuve de beaucoup de volonté pour se défaire de ce carcan et suivre sa route.
L’auteure parle tellement bien de la broderie qu’elle m’a presque donné envie de m’y mettre !
Une femme excédentaire 8 étoiles

Violet Speedwell est une célibataire de 38 ans ; en 1932, elle est ce que l’on nomme une "vieille fille".
La guerre a décimé les hommes, n’épargnant pas la famille Speedwell en emportant l’un de ses fils ainsi que le fiancé de Violet. Le dernier de la fratrie, Tom, marié et père de famille, a quitté la maison où elle se retrouve seule avec son irascible mère. Elle décide alors de quitter Southampton et de s’installer dans l’anonymat de Winchester.
Elle habite dans une pension, est sténo-dactylo dans le bureau d’une assurance où son salaire lui laisse à peine de quoi manger.
Impressionnée par la cathédrale, elle découvre les Brodeuses de Winchester. Et décidera malgré toutes les embûches d’assister aux réunions et de devenir brodeuse.
Les semaines passant, Violet rencontre de nouvelles personnes, se fait des ami-e-s, peut enfin avoir une vie personnelle même si sa liberté est parfois difficile à assumer pour une femme dont la mission, quand elle est seule, est de s’occuper de sa mère avec une abnégation contrainte, et de se conduire le plus discrètement possible.

Comme à son habitude, Tracy Chevalier dresse de très beaux portraits de femmes, analysant justement les règles de bienséance, les codes d’une époque, et le sort soumis des femmes.
On ressent de la tendresse pour l’attachante Violet, de l’admiration pour son courage pas seulement dans les épreuves mais dans son attitude de faire face aux regards des autres, aux convenances établies.
Une lecture très agréable.

Marvic - Normandie - 66 ans - 26 juin 2023