Dans les collines de Mandchourie
de Nicolas Baikov

critiqué par Kostog, le 28 juillet 2021
( - 52 ans)


La note:  étoiles
Ode au dieu tigre
Le livre de de Nicolas Baikov, classique de la littérature de voyage et d'aventures, demeure relativement peu connu. Publié en 1938 sous le titre Mes chasses dans la taïga de Mandchourie, il est réédité en 2000 sous son titre actuel.

Nicolas Baïkov, officier du tsar, explore au début du vingtième siècle les régions de Mandchourie situées entre Harbin et l'Extrême-Orient russe. Le récit est composé de courts récits de chasse dont le charme principal consiste dans la description d'une nature qui, à l'aube du vingtième siècle, conserve encore son aspect sauvage et qui grouille encore d'une faune abondante, dont le tigre de Sibérie est le représentant le plus impressionnant.

A lire Baikov, on a bien du mal à s'imaginer que celui-ci est officier de carrière. Il indique à plusieurs reprises qu'il vit de la vente des proies abattues. Outre l'aspect palpitant que peut prendre parfois la course au grand gibier, ce sont les rencontres humaines qui constituent la saveur du livre : chasseurs envoûtés par la vie rude et la nature sauvage de la taïga, coureurs des bois, cueilleurs de ginseng chinois, bandits des grands chemins. Dans presque tous les cas, ce sont des hommes qui ont préféré la vie solitaire à celle de la civilisation, le risque et l'aventure (parfois contrainte dans le cas des évadés des bagnes de Sibérie), à une vie plus assise.

Baikov dresse ces portraits avec bienveillance, mais sans cacher la violence de certains et la dureté des destins de ceux qui violent les lois de la taïga. L'hospitalité est la règle dans une région, où il faut parfois des heures pour trouver le moindre cabanon. Parfois le récit de chasse fait place aux croyances et aux contes locaux généralement racontés par quelque ermite de la forêt, mandchou ou chinois.

Le lecteur moderne sera forcément frappé par les récits de chasse au tigre de Sibérie, avec un pincement de coeur en songeant que cette espèce est aujourd'hui en voie de disparition, mais il n'est pire mésintelligence que l'anachronisme. Baikov. qui est par ailleurs un chasseur précautionneux pour son temps, pouvait difficilement porter le même regard que nous sur ces animaux et ces contrées que le vingtième siècle a considérablement transformées.

Le livre se termine par un récit qui évoque les heurs et le malheur d'un bandit et chef de guerre local, son arrestation par les troupes chinoises et enfin son exécution dont les détails semblent plutôt tirer vers les temps les plus anciens de de la dynastie Qing que vers la Première Guerre mondiale qui approche. Sans en dire plus, il s'agit d'un grand spectacle en technicolor...

Dans les collines de Mandchourie est un récit pour les lecteurs qui prisent l'aventure et que font rêver les paysages de cet Extrême-Orient insoumis.