Les Enfants de la Volga
de Gouzel Iakhina

critiqué par Tistou, le 29 décembre 2021
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Second roman de Gouzel Iakhina
Gouzel Iakhina continue, avec Les enfants de la Volga, à creuser dans la veine ouverte avec Zouleikha ouvre les yeux. La veine du roman épique, qui a du souffle, et qui se penche sur l’histoire de la Russie périphérique, celle qui passe sous les radars parce que pas à Moscou, pas à St Petersbourg. Non, pas dans ces villes mais dans les confins profonds du pays, dans ces zones qui comptent « pour du beurre » aux yeux du pouvoir.
La traductrice, Maud Mabillard, replace le contexte dans une note préliminaire :

»Tout comme « Zouleikha ouvre les yeux », le précédent livre de Gouzel Iakhina, « Les enfants de la Volga » est un récit très romanesque, mais qui se réfère à des jalons historiques précis.
Il s’agit ici de l’histoire des Allemands de la Volga, venus dès la seconde moitié du XVIIIème siècle, sur l’invitation de la tsarine Catherine II, cultiver les rives du fleuve russe dans les environs de l’actuelle Saratov, et qui ont conservé leur langue et leur culture jusqu’au milieu du XXème siècle. »


Ca, c’est pour le contexte. Pour la période, on commence le roman vers 1920, ce qui va permettre de balayer tout ce qui suit derrière en Russie, puis URSS, avec notamment la révolution bolchevique et les actions qui s’ensuivent : collectivisations, famines, répressions, … Peu d’évènements heureux, on en conviendra !
Mais Les enfants de la Volga n’est pas un roman heureux. C’est un roman russe, de Gouzel Iakhina sur les conséquences d’une situation qui a existé du côté de Saratov, sur les bords de la Volga, et de l’interaction des évènements politiques avec cette situation particulière de ces Allemands implantés là.
Nous voyons ceci à travers les yeux de Jakob Bach, instituteur du petit village de Gnadenthal. Pas le profil du héros, plutôt celui de l’intello frêle pas à sa place dans ce rude milieu rural. Sa vie va basculer quand il va être « convoqué » par un riche fermier, vivant quasi reclus en face de Gnadenthal, sur l’autre rive de la Volga. Ses performances pédagogiques sont venues aux oreilles du « pater familias » qui veut donner un vernis intellectuel à Klara, sa jeune fille, qui a vécu jusqu’ici quasi recluse et à l’écart du monde. Et l’improbable arrive : Jakob et Klara tombent amoureux. Ce n’est pas vraiment ce qui était prévu par ledit « pater familias » et dès lors les drames vont s’enchaîner les uns derrière les autres. Et on est en Russie, où l’on ne fait pas les drames à moitié !
Gouzel Iakhina partant de cette situation initiale va l’exploiter pour tenter de décrire et d’expliquer les convulsions politiques et sociales qui ont affectées la Russie sur toute cette période post 1920 jusqu’à l’avènement de l’URSS.
Et si ma devise préférée est : « le pire n’est jamais sûr », il semble qu’en Russie elle n’ait pas cours !

Encore un grand roman de Gouzel Iakhina, pour un autre morceau, tragique, de l’histoire russe.