Un pasteur protestant durant la Seconde Guerre mondiale... en Italie !

L’Italie est un pays profondément catholique. Je ne vous apprends rien. Il l’était encore plus avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Aussi serez-vous surpris, autant que je l’ai été, de découvrir que, notamment en Toscane, il y avait des petits foyers de protestantisme méthodiste. Oui, vous avez bien lu ! Il y avait, et il y a certainement encore, des protestants dans ce pays qui est le cœur du catholicisme.

Voici un « journal de guerre » tenu par un pasteur protestant, Sergio Carile, et annoté par son fils Paolo.
Ici, pas de scènes de bataille ou d’embuscades ! Pas de coups de main contre l’ennemi honni… Juste le témoignage d’un pasteur sur la vie de ceux qui subissaient la guerre se demandant s’ils vivraient un jour encore, s’ils trouveraient à manger, comment soigner les blessés et les malades...
Les souvenirs de Sergio Carile remontent à 1931 lorsque l’état fasciste cherchait parmi les protestants des agents « provocateurs ». Le pasteur se devait, peut-être plus que ses concitoyens, de rester dans les clous. Un pas de travers et les choses pouvaient fort mal tourner pour lui et sa communauté.
Ses rapports avec les religieux catholiques sont loin d’être au beau fixe puisque ceux-ci le considèrent comme un hérétique. On verra, au fil de la guerre, que, par exemple, après un bombardement, les curés se pressent d’aller confesser les blessés pour sauver leurs âmes… Plutôt que leurs vies. Notre pasteur se souciera davantage de l’inverse.
Ses relations avec les fascistes italiens au pouvoir sont tendues jusqu’à ce qu’il tombe sur un fasciste de haut rang, pour la région de Carrare, qui est lui-même méthodiste. Dans un pays en guerre, circuler, comme il souhaite le faire pour aller voir ses « frères » (les protestants méthodistes) nécessite de nombreux laisser-passer, autant des autorités italiennes que des Allemands très présents, et qui le seront de plus en plus au cours de la guerre.
Pour se déplacer, il ne dispose la plupart du temps que de son seul vélo qui s’use, qui s’use, au point qu’il n’est plus qu’un bout de ferraille avec des roues dont les chambres à air ont rendu l’âme depuis longtemps. Quant aux freins… Les pieds du pasteur au sol devront faire l’affaire.

S’il ne le dit pas ouvertement, il maudit les avions alliés qui viennent régulièrement mitrailler (ou bombarder) les villes et villages de sa région montagneuse de Toscane. Visiblement, ils ne s’intéressent pas qu’aux cibles militaires.

Notre pasteur doit se méfier de tout le monde : des fascistes, des Allemands… mais aussi des résistants ou prétendus tels. Difficile de savoir qui est qui dans ce conflit quand on vit dans des zones isolées difficiles d’accès.

Olivier Weyrich est décidément un éditeur que l’on trouve parfois là où on ne l’attend pas du tout. Editeur belge installé à Neufchâteau, il est connu pour ses remarquables collections « Les Plumes du Coq », « Noir Corbeau », « 1940 », « 1944 », « Esprit Jardin », et pour quelques magnifiques ouvrages sur la République Démocratique du Congo… Et d’autres collections encore… Le point commun entre toutes ces collections ? Des auteurs belges ou vivant en Belgique ! Mais de là à le voir publier un journal de guerre d’un pasteur italien, j’avoue avoir été très surpris, d’autant que l’éditeur a choisi un papier d’une remarquable qualité. (Personnellement, je suis très accro aux beaux papiers. Les toucher me procure une sensation bien agréable.) Serait-ce là le début d’une nouvelle collection ?

Un livre très intéressant pour tous les amateurs de témoignages de civils durant la Seconde Guerre mondiale, pour les protestants, pour les Italiens, particulièrement pour ceux de Toscane… Et pour tous les curieux désireux de sortir des sentiers battus.

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  Journal de guerre: Entre la Lunigiana et la Garfagnana, à travers la Ligne gothique

  de Carile, Sergio
  Weyrich Edition
  ISBN : 9782874897047 ; 24,90 € ; 09/05/2022 ; 288 p. ; Relié

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