L'inventeur de Miguel Bonnefoy

L'inventeur de Miguel Bonnefoy

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par TRIEB, le 11 novembre 2022 (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 73 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 651ème position).
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L'INVENTEUR SINGULIER

Miguel Bonnefoy est un auteur qui aime nous familiariser avec des destins extraordinaires : celui de la famille de Michel René Lonsonier, contraint de quitter son Jura natal au milieu du 19ème siècle, après que l’épidémie de phylloxéra a tué la vigne, pour s’installer au Chili ; dans Héritage. Dans Sucre noir, Severo Bracamonte part à recherche d’un trésor dans un village des Caraïbes. C’est l’occasion de brosser un tableau du passé de cette région, d’hommes en proie à leurs désirs, à des revers de fortune aussi.

Miguel Bonnefoy ne déroge pas à cette règle dans son nouveau roman : L’inventeur. Il y décrit le parcours d’Augustin Mouchot, fils de serrurier, professeur de mathématiques, qui découvre l’énergie solaire au beau milieu du XIXe siècle. Les étapes de la mise au point de cette invention sont abondamment relatées dans le récit. Elles sont marquées par les difficultés rencontrées par Mouchot pour faire connaître son invention, la populariser auprès des dirigeants et sommités du moment : « Une excitation, mêlée de craintes, gonfla son cœur. Il ouvrit les fenêtres et les volets, leva le poing et le tendit vers le ciel, comme s’il voulait provoquer le soleil en duel. (…) À le voir ainsi, sortant de son petit appartement d’Alençon, le pas pressé et enfantin, personne n’imaginait que cet homme anonyme et quelconque ferait un jour la une des journaux et qu’on l’appellerait le « Prométhée moderne. »
Ce qui frappe dans le récit de Miguel Bonnefoy, c’est le côté ordinaire de cet homme, sa modestie, ses craintes de ne pas bénéficier d’un bon carnet d’adresses, ses interrogations sur la validité réelle de son invention. Cet homme, nous dit Miguel Bonnefoy, a besoin d’un assentiment, d’une confirmation, d’un signe extérieur : « Il fut inondé d’une joie immense. Non pas d’une joie épiphanique (…) mais d’une joie plus silencieuse et plus mesurée, comme celle que donne la confirmation d’une vocation. »
Augustin Mouchot bénéficiera des circonstances pour imposer son invention, la médiatiser, comme nous dirions aujourd’hui ; ce sera lors de l’Exposition universelle de 1878 à Paris, il est consacré en compagnie de son collaborateur : « En quelques jours, le couple Mouchot-Pifre se plaça devant un triomphe inattendu, au centre de toutes les conversations. Le 31 octobre, le jury leur remit la médaille d’or de l’Exposition universelle. »
Conduit à expérimenter son invention en Algérie, Augustin Mouchot est toujours traversé par des interrogations, des doutes divers. Miguel Bonnefoy nous rend ainsi ce personnage tout autant sympathique, humain mais emblématique. Il va recontacter Abel Pifre, pour accepter sa proposition de rachat du brevet de son invention, non sans s’entendre dire par ce dernier : » Tu seras toujours le père de cette invention. »
La découverte de l’énergie solaire était-elle prématurée dans ce temps où l’on se tourne résolument vers le charbon ? Qu’il fût desservi par les travers du moment ne nous dissuade nullement d’apprécier cet homme dans son humanité. Le roman de Miguel Bonnefoy y réussit très bien, se plaçant dans la lignée de ses précédents récits pour réussir un portrait d’une ambition, des combats d’un homme dans son époque : un inventeur.

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Grandeur et décadence

7 étoiles

Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 75 ans) - 23 août 2024

Génie méconnu, Augustin Mouchot, vers la fin du XIXème siècle, invente une machine utilisant les rayons du soleil, pouvant être utilisée dans l'industrie ainsi que dans l'armée.
Jouant de chance et de malchance lors de ses démonstrations (notamment selon les caprices de la météo), Mouchot finit par convaincre les plus hautes instances, et obtient un véritable triomphe à l'Exposition Universelle de Paris en 1878.
Mais Mouchot est un homme malade, mauvais gestionnaire, ambitieux au sens négatif du terme. Les hasards de la vie le font sombrer dans la misère, et pour l'industrie le charbon, puis plus tard le pétrole, sont des énergies bien meilleur marché (ce qu'on ne dirait peut-être pas aujourd'hui...).
Miguel Bonnefoy a beaucoup romancé, la vie réelle de son héros étant largement méconnue. Mais cela rend la lecture agréable et fluide. Avec quelques maladresses toutefois, comment peut-on écrire cet illogisme : "Il passa plus de temps à regretter son retour qu'à trouver un appartement"...
Mais le plus gros défaut de ce livre est que l'auteur nous décrit avec force détails des machines complexes, et qu'elles aient réellement existé ou pas n'a peut-être pas grande importance. Par contre il est impossible de les imaginer concrètement, alors qu'un simple croquis ou dessin aurait tout de suite permis d'avoir une idée suffisamment précise de ces gigantesques ensembles de miroirs et chaudrons.

Un précurseur sans éclat

5 étoiles

Critique de Elko (Niort, Inscrit le 23 mars 2010, 48 ans) - 29 octobre 2023

Je ne conteste pas la qualité d'écriture de l'auteur. Mais je me suis ennuyé. Augustin Mouchot, l'inventeur, n'est pas un homme charismatique, sa vie apparait paradoxalement fade et austère (je dis paradoxalement puisqu'il a quand même croisé l'empereur et voyagé en Algérie) et ses découvertes semblaient déjà dans l'air du temps (il a précédé de quelques années d'autres chercheurs qui travaillaient aussi sur l'énergie solaire). Son parcours, ses choix et ses recherches montrent davantage un homme entêté qu'un esprit brillant.

Plus intéressantes sont la présentation du milieu scientifique de l'époque et la réflexion sur la découverte finalement ancienne du potentiel de l'énergie solaire, malheureusement étouffée par la suprématie du charbon.

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