Monte Carlo
de Helmut Newton

critiqué par JPGP, le 21 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Le Monte Carlo drôle mais inquiétant d'Helmut Newton
C’est en 1981 qu’Helmut Newton et son épouse s’installent à Monaco pour échapper à certaines obligations financières. Le « Rocher» qui est présenté souvent comme un paradis (et pas seulement fiscal) apparaît triste et noir en dépit du soleil. « Monaco n’est ni une ville, ni une station thermale, ni un lieu de villégiature » écrit Newton assommé par les barrières de béton des hôtels, les boutiques de luxes et les yachts. Il s’habitue néanmoins à l’opulente cité.

Elle va devenir le prétexte à des séries d’étranges mises en scène des plages, chantiers, piscines, toits d’hôtel et musée Océanographique compris. Pendant vingt ans, le photographe s’y amuse avec ses mannequins, la mode, la criminalité et une quasi pornographie canaille. Il y a là une scène de meurtre dans un hôtel, des prostituées mi punk mi dark qui font de la retape, une naïade (pour toute compagnie elle chérit une poupée gonflable). A la vertu se substitue le vice, au plaisir l’ennui, à la lumière l’ombre, à la paix l’épouvante.

Cela n’empêche en rien le photographe de magnifier le corps des nymphes habillées ou non. Mais toujours avec élégance. Ce monde reste volontairement factice et interdit sauf à qui possède l’argent nécessaire aux fruits plus ou moins défendus. La somptuosité et l’humour avancent de concert en des cérémoniaux délétères. Ils génèrent un plaisir mordant tant par l’appât des corps que des situations. Et si l’érotisme est présent, Newton a soin de rappeler qu’il n’est pas seulement dans la plastique : « L’érotisme, c’est le visage. Pas le sexe ». Voire… Sa posture de dandy amusé, amuseur offre là un mixage de luxe et de grossièreté, de vulgarité et de volupté.

Jean-Paul Gavard-Perret