Pierre et Gilles - Les couleurs du temps
de Édouard Louis, Paul. B Preciado

critiqué par JPGP, le 14 janvier 2023
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Pierre et Gilles engagés
La traversée du miroir (souvent narcissique) de Pierre et Gilles possède un rapport particulier au langage plastique et parfois à l'époque comme le prouve leur dernier livre chez Templon. Par celui-là tout se passe. Les interpellations iconographiques montrent comment l’échange fonctionne selon divers registres entre l'époque et les deux artistes.

Ils montrent aussi la perception de l’autre, du différent . Toutefois ce nouveau livre se veut un rien (voire plus) historique, politique et archiviste. Pierre et Gilles deviennent des artistes engagés car avec "Les couleurs du temps" dont les portraits entre peinture et photographie, dévoile une qui témoigne des contradictions de notre époque.

Existe une courte série en hommage à l’Ukraine. "La Liberté" ou "La Guerre du blé" mettent en scène avec pudeur de jeunes Ukrainiens pleurant l’innocence et la paix perdues. Face à eux, un autoportrait masqué des artistes posant accroupis invite à veiller ensemble un univers en pleine déliquescence.

Mais le contenu est bien plus que politique. Il garde une autre ambition. Elle met au premier plan divers types de corsetages au nom de refoulés qui redeviennent monnaie courante et contre lesquels les artistes luttent en transformant certaines données immédiates de l'inconscience sourde et rampante.

Les artistes interprètent donc ce monde, le réinterprètent lorsque l’amour (celui qui ne souffre pas de castes) est en jeu. Le sentiment complexe et polymorphe n’est donc pas seulement montré en images mais concepts jusqu’à émettre l’hypothèse d’"un nouvel amour" comme disait Rimbaud et pour changer nos têtes.

Jean-Paul Gavard-Perret