La Balade du Grand Macabre de Michel De Ghelderode
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Théâtre
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La Mort et l'apocalypse joyeuse
« La Balade du Grand Macabre » est un texte nourri de multiples influences et projette le lecteur dans une époque ancienne. Un homme incarnant la Mort se rend en Breugellande afin de tuer tous les vivants. In annonce la fin de ce pays, voire même du monde. Cet homme arrive sur scène en chevauchant … un homme. Ghelderode a choisi la farce et cette pièce de théâtre n’attriste absolument pas le lecteur. On y rencontre des hommes très portés sur la boisson, Sire Goulave le prince de cet état à la fois faible et fort, des ministres irrespectueux, une femme très autoritaire et peu sympathique sous la plume de l’auteur, un philosophe, deux amants. Le passage d’une comète dans le ciel, la proximité avec le passage à l’an mil, entraînent cette supposition que l’apocalypse est proche, mais alors ce sera une apocalypse joyeuse avec ce dramaturge.
Cette pièce de théâtre regorge de trouvailles. L’écrivain s’inspire du monde de la farce, donc certaines tournures et certains termes ont quelque chose de joyeusement médiéval. De plus le dramaturge se plaît à faire des néologismes qui sauront faire sourire quand on en comprend la construction. L’édition Folio a des notes bien pratiques à ce sujet. Le cadre spatial est relié à Breugellande qui de façon transparente fait écho au peintre Brueghel dont les tableaux foisonnent de personnages, bon vivants, aimant la bonne chère et vivant dans un monde peu distingué et populaire comme nous le retrouvons dans cette pièce de théâtre. L’on a parfois l’impression de voir certains tableaux prendre vie sous la plume de cet auteur.
Le carnaval semble aussi une des matrices de « La Ballade du Grand macabre » car tout semble renversé : les ministres parlent avec irrespect au prince, la Mort perd de sa crédibilité, le peuple dans sa simplicité sort vainqueur … Cette pièce vise à faire sourire et emprunte à Ubu roi, aux textes médiévaux, aux farces. Le texte est riche et les phrases mêlent les registres de langue. Certains décalages propres à la farce sauront faire sourire. Il y a aussi beaucoup de fantaisie et de références religieuses joliment détournées. Dans un carnaval, le blasphème est assez commun.
Cette pièce de théâtre est un hymne à la vie. La démesure ne condamne pas ces hommes, au contraire elle inviterait à suivre le chemin qui est tracé par certains personnages rabelaisiens.
Je ne connaissais pas cet auteur qui a connu un vif succès dans les années 50, mais qui est moins lu à cause de son attitude vis-à-vis du régime nazi. Dans cette pièce de théâtre il n’est nullement question de cela. On peut critiquer l’homme mais lorsque l’œuvre n’alimente pas des idées nauséabondes il serait dommage de ne pas s’intéresser au caractère artistique de sa production. Cette pièce de théâtre est vraiment originale, débordante d’énergie et de jeux linguistiques et possède une dimension intertextuelle pas toujours facile à repérer.
Les éditions
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La Balade du grand macabre
de De Ghelderode, Michel
Gallimard
ISBN : 9782070416561 ; 9,20 € ; 04/12/2002 ; 231 p. ; Poche
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