L'enfant dans le taxi
de Sylvain Prudhomme

critiqué par Alma, le 27 février 2024
( - - ans)


La note:  étoiles
Le poids des non-dits au sein d'une famille
Le jour de l'enterrement de son grand père , Simon, le narrateur, apprend de la bouche d'un oncle par alliance que le défunt a depuis très longtemps un enfant caché : celui né de sa rencontre avec une jeune fille allemande alors qu'il était soldat des troupes françaises en Allemagne pendant la guerre. «Le «commandeur», «le patriarche» n'était pas irréprochable... . La famille le sait, mais on n'en parle pas . On a mis la faute sous le tapis «le crime c'est de parler, jamais de se taire.»

Cette nouvelle est pour lui une véritable «déflagration». «Je m'étais soudain retrouvé avec le bout d'un fil entre les doigts, l'extrémité d'une pelote sur laquelle j'avais aussitôt senti que je n'aurais qu'à tirer pour faire venir à moi le reste de l'histoire».
Simon se sent appelé à rechercher les traces de cet oncle caché duquel, sans le connaître, il se sent proche «J'ai pensé que j'étais le frère de M. dans l'ordre des condamnés au remodelage, à la fiction. Son frère dans l'ordre des intranquilles, des insatiables, des boiteux.»
Il est vrai que Simon vit alors une période difficile, il est en train de se séparer de sa compagne avec laquelle il a eu 2 enfants : une séparation faite dans la tristesse mais aussi dans la douceur .

Simon tentera alors de reconstituer grâce à des souvenirs lointains, des recherches sur Internet et des infos données par son oncle, le parcours de celui qu'il désignera , faute d'identité, par l'initiale M. Sa route route sera longue et chargée de surprises ….

L'ENFANT DANS LE TAXI, livre des hontes et des secrets, est, outre une une enquête sur le fils caché, une observation et une réflexion sur le poids des non dits au sein d'un microcosme familial , et surtout aussi un roman à l'écriture tout en longues phrases denses, bouillonnantes, en cascades, qui transportent irrésistiblement le lecteur dans les flots de pensées du narrateur .
à la recherche du passé 8 étoiles

Simon le narrateur, découvre le jour de la mort de son grand-père Luciano Malusci, que ce dernier a un fils caché M. qu’il a eu en Allemagne à la fin de la guerre au bord du lac de Constance en 1944 avec Liselotte H. une jeune fille allemande dont il était amoureux.
Alors Simon invente, émet des hypothèses, voit des ressemblances quand il n’y en a pas.
Il imagine une vie à ce demi-oncle et souhaite retrouver cet homme qui a maintenant 75 ans, contre l’avis de sa grand-mère et de sa mère.
" Comment te dire Simon. Comment te dire qu’il y a des décennies que j’essaie de m’arracher à toutes ces histoires de mon père… tu sais quoi au fond je crois que le passé, ça ne m’intéresse pas tant que ça."
Mais Simon, séparé de sa compagne, souffre de cette séparation, de cet inévitable repli sur sa propre famille, de sa solitude qui le fait réfléchir, s’interroger sur le sens de la vie, la sienne, celle de son grand-père qu’il découvre après sa mort…
"Je voudrais vivre dans un monde où les choses puissent se dire en face, la vérité s’affronter. Où chacun d’entre nous soit assez libre et fort pour accueillir la liberté des êtres qui l’entourent."

Un récit intéressant que cette quête d’un homme en peine, le déroulement de ses pensées ces questionnements mais aussi cet acharnement à retrouver ce fils caché de son grand-père.
Parfois gênée cependant par un manque de ponctuation, que j’avais déjà remarqué dans son roman Sur la route.

Marvic - Normandie - 66 ans - 28 août 2024


Ah ! Les secrets de famille ! 10 étoiles

Un secret de famille est un secret qui ne se confie qu’à une personne à la fois et toujours en ajoutant : surtout n’en dites rien à personne. Finalement toute la famille est au courant mais personne n’en parle. La paix des familles est à ce prix. Mais parfois, quand on enterre un ancien, les langues se délient et le secret passe d’une génération à l’autre.

C’est un peu l’histoire du livre et c’est même toute l’histoire du livre. Lors de l’enterrement du grand-père, le fameux secret est révélé à un des petits-fils de la famille ; et celui-ci ira pendant tout le livre à la découverte du secret. Alors il ne se passe pas grand-chose, ce n’est pas un roman d’action, c’est plutôt un roman de réflexion, avec de belles rencontres, beaucoup de digressions inattendues, des belles considérations sur le temps qui passe, des belles promenades dans la nature… Mais surtout, c’est merveilleusement bien raconté et merveilleusement bien écrit. C’est un peu le même genre de roman que les Patrick Modiano ou les Jean-Philippe Toussaint : il ne se passe pas grand-chose mais tout est bien réfléchi, tout est dit finement, et on se régale.

C’est, finalement, une lecture intelligente et récréative de grande qualité, qui se lit facilement et toujours avec un sourire amusé tellement l’auteur a bien vu les réalités de la vie.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 18 juillet 2024


Les secrets de famille peinent à sortir ! 9 étoiles

L'enfant dans le taxi !

Il y a beaucoup de secrets de famille qui sont niés, cachés et qui parfois reprennent vie pour le meilleur et le pire .
A la fin de la guerre, en Allemagne, une femme allemande et un soldat français se sont trouvés et se sont aimés avec fougue.
La vie étant ce qu'elle est parfois, elle arrive à séparer très vite des amoureux qui ne se reverront plus.
Cette histoire que ne connaissent par les enfants et petits enfants de Malusci est dévoilée à Simon, l'un des petits fils le jour de l'enterrement du vieux monsieur.
Simon apprend ce même jour que son grand-père que son grand amour d'Allemagne avait eu un fils de cette union.
Qu'est-il devenu ?
A t-il essayé de retrouver son père ?
Celui-ci l'a t-il accepté ?
C'est alors que s'ouvre la quête de la vérité que mène Simon qui réussit à trouver une réponse à son interrogation légitime.
Durant la dernière guerre mondiale, plus de 400 000 enfants seraient nés d'une relation « illégitime » entre des « ennemis » , il y a a eu des naissances venant de viols mais aussi de beaucoup d'autres liées à de véritables liaisons amoureuses parfois profondes.

Ce roman tendre et sensible nous invite à une promenade dans le temps et à une réflexion sur la vie de ceux et de celles qu'on nomme improprement « des bâtards » !

S'agit-il là d'une fiction ou d'un roman inspiré par la vie de l'auteur, je l'ignore mais qu'importe, ce livre est aussi une ode à l'amour et un appel à réfléchir plusieurs fois avant de juger l'autre !

Jean-François Chalot

CHALOT - Vaux le Pénil - 76 ans - 6 avril 2024


Sylvain Prudhomme et la nuit sexuelle 10 étoiles

Llhéroïne première du livre a rencontré un jour de guerre un homme dont la silhouette se faufila dans le trait de lumière et vint se placer devant lui,debout dans l’ombre. Cette femme allemande lui a souri "fière d’avoir osé."
Elle a vu en six ans de guerre passer des soldats de toutes nationalités, des vaincus, prisonniers, réquisitionnés affectés aux récoltes, aux labours. Mais celui-ci (Malucci) était "d’une espèce inconnue" et qui vécut u temps dans sa famille.

Bientôt ils s’aimèrent - verbe dont le narrateur ne peut dire exactement quelle valeur il faut lui donner - mais toujours est-il qu'ils couchèrent ensemble sans savoir précisément où (grange, pré, chambre...) et e cela Maluci etcette femme gardèrent longtemps le souvenir. D'autant que de ce plaisir "naquit un enfant, qui vit toujours, là-bas, près du lac. Et que ce livre est comme un livre vers lui."

Et cette scène première poursuit le narrateur-auteur qui précise l'avoir déjà inséré il y a des années dans un autre livre mais "sans bien mesurer ce qui s’y jouait." C'est pourquoi il y revient dans un travail où au réel se substitue l'imagination, le fantasme, le rêve. Le tout entre innocence, gravité avec en filigrane le vertige de sa conséquence imprévue après que le désir ait subsumé les interdits, le scandale et ses conséquences durant des décennies ensuite. Mais comme ni Malucci ni cette femme ne sont plus là pour raconter l'auteur les remplace.

Il recommence par le début mais aussi à l’instant où toute l’histoire s’était remise à refaire surface en rejaillissant ((un après-midi de juillet lorsque la famille revenait du cimetière) des couches de silence sous lesquelles chacun tentait de la cacher, de l'oublier plus par une "accumulation de non-décisions plutôt que de vrais choix, quelque chose au fond comme une flemme, un ajournement toujours répété". Le principal acteur et conséquence de cette "aventure" fut laissé dans l'ignorance selon une injonction majeure " si je ne t’ai rien dit c’était pour ton bien."

L'auteur nous fait ainsi rejoindre bien des histoires de famille où se teire est beaucoup plus important de parler - ce qui serait tenu pour un crime. Le narrateur s'est retrouvé "avec le boutd’un fil entre les doigts, l’extrémité d’une pelote sur laquelle j’avais aussitôt senti que je n’aurais qu’à tirer pour faire venir à moi le reste de l’histoire."

Jean-Paul Gavard-Perret

JPGP - - 77 ans - 11 août 2023