Bye Bye Blondie
de Virginie Despentes

critiqué par CCRIDER, le 27 novembre 2004
(OTHIS - 76 ans)


La note:  étoiles
Triste histoire , triste bouquin ...
Gloria est une vieille gamine caractérielle et capricieuse qui retrouve par hasard un ancien amour rencontré vingt ans plus tôt , lors d'un séjour en asile psychiatrique . Tout les sépare , le milieu d'origine , il est plein aux as et vient d'une famille bourgeoise , elle est prolo et érémiste , la vie , il a réussi à la télé , elle zone dans les bars , se cuite et se came . Et pourtant , ils s'aiment ... et feront à nouveau un bout de chemin ensemble . Intrigue rebattue , la bluette romantique cucul , l'historiette à la Delly revue Harlequin ou Nous Deux ...
Despentes pourtant a l'air de connaître la recette , elle a beau pétrir allègrement en se torturant des neurones passablement fatigués , délayer pendant 330 pages sur ses états d'âme de femelle indécrottablement romantique , carburer au scotch et à la Kro , pimenter au bedo et à la coke et nous assourdir de musiques aussi snobs qu'improbables , à l'arrivée le lecteur n'a droit qu'à un brouet bien insipide .
Et pourtant , elle fait des efforts , elle n'oublie pas les gros mots , les abus de langage "caillera" qui amusent tant nos bobos décadents des beaux quartiers . Et rien n'en sort , rien ne vibre vraiment . "La story d'une taspé keuponne qui s'retrouve chez des bourges qui la calculent pas ..."
N'importe qui peut déblatérer dans un français approximatif et ça ne donnera pas forcément un style . N'est pas Bukowsky , Miller ou Céline qui veut ! Melle Despentes n'est au plus que la nouvelle Sagan , c'est à dire pas grand chose . Le bouquin est sans grand intérêt , sorte de littérature kleenex , aussitôt lu , aussitôt oublié . On regrette le temps qu'on y a passé et on se dit qu'une nouvelle de 30 pages bien tournées aurait largement suffi . On se demande pourquoi et comment Grasset publie ça en le présentant comme " le livre le plus émouvant de Virginie Despentes " . Désolé , mais je n'ai pas été ému .
Romance et collier à clous 7 étoiles

Ce livre présente une femme caractérielle en rupture de mâle, un présentateur de télévision trop sympathique pour être honnête, le tout dans une province peinte sans pittoresque frelaté. Gloria manque d'être écrasée en pleine rue à Nancy par Eric, un amour de jeunesse rencontré en hôpital psychiatrique ce qui n'est pas banal. Il leur semblait déjà que leur amour était hors-norme, en dehors des sentiers battus du sentiment. Eric est devenu vedette du petit écran, une sorte de gendre idéal de la télévision 2004, un bon petit garçon que les vieilles dames et les ménagères de moins de cinquante ans ont envie de prendre dans leurs bras quand il raconte sa vie si malheureuse derrière les sunlights, Benjamin Castaldi comme on a pu le lire mais aussi Guillaume Depardieu. Leur histoire continue donc...
On est frappé par le fait que Despentes s'assagit, devient plus mûre mais pas forcément moins acerbe. C'est un peu du Frédéric Dard post-moderne, écrit sans effets de style ni de manches. Comme beaucoup de trentenaires, et même punk, son héroïne subit le complexe de Peter Pan. Elle entre dans le même schéma d'infantilisation car dire des gros mots devant les autres n'est pas se rebeller. Ici, la révolte est un peu formatée comme l'époque est pleine de grisaille. La violence, contrairement aux personnages de "Baise Moi" n'est ici même pas une voie de sortie. S'il est connu que Virginie Despentes mène maintenant une vie moins "déviante" selon la morale communément admise, il n'en reste pas moins que sa plume garde de la vigueur.

AmauryWatremez - Evreux - 55 ans - 13 décembre 2011


Moi, j'ai aimé. 8 étoiles

Faut-il donc que vous soyez tous des adultes pour ne pas vouloir -ne pas pouvoir?!- voir en Gloria le modèle type de la blessure trop béante, trop profonde, qui ne laisse plus place qu'à la colère? Faut-il donc que vous ayez oublié comme ça fait mal de se faire jeter, comme c'était beau les années punk, comme c'était classe d'écouter les Béruriers? Je n'ai pas connu tout ça, c'est vrai que je parle sans avoir pris connaissance du dossier. Ce livre, en tout cas, m'a touchée. Je vois la vague punk une fois qu'elle est passée, et j'ai acheté Bye Bye Blondie pour le nom du roman plus que pour sa 4e de couverture. Oeil désintéressé, prête à trouver n'importe quel récit de quelqu'un qui s'y croit, prête à lire en riant doucement d'être déçue. J'ai lu le bouquin quatre fois, sans décrocher, pour bien comprendre, pour bien m'imprégner entièrement de l'histoire improbable, invraisemblable d'Eric et Gloria. Alors oui, c'est vulgaire, mais ça colle tellement au personnage que j'oublie, je passe au dessus, je m'attache à Gloria et je me la joue psy de comptoir parce qu'elle me fascine, cette prolétaire déchirée qui n'arrive pas à aimer.
Ca m'a touchée parce que c'est criant de nostalgie profonde et sale, parce que c'est un conte de fée sans les fées dans un Nancy que je ne connais pas, parce que Motörhead et les Wampas, j'aime, aussi parce que j'ai un peu d'imagination. Je vois Gloria marcher dans les rues de Paris avec de tous les côtés l'image de celle qui l'incarne et ce slogan stupide, je vois la déception la colère la douleur la peur la maladie les addictions. Peut-être que je suis un peu voyeuse, peut-être que je suis un peu folle.
Bye Bye Blondie n'est peut-être pas un chef d'oeuvre de littérature comme on se plait à en citer chez les Français, mais c'est un livre qui se lit, se laisse lire et relire, avec un plaisir pour moi toujours intact.

Ashtray - - 40 ans - 30 décembre 2008


Paumée, vulgaire mais attachante 8 étoiles

L'écriture, parfois un peu crue m'a déplu au début mais ce bouquin est facile à lire et l'héroïne est très attachante, même si l'on ne se reconnaît pas forcément dans ce personnage.

Je trouve la critique principale un peu dure, mais c'est le droit absolu de son auteur. Même si dans l’ensemble je suis assez d’accord avec les propos de CCRIDER (amateur de jazz ?) je trouve réducteur et un peu facile de citer des auteurs archi « reconnus » pour descendre Virginie Despentes - et Françoise Sagan au passage.
J’ai quant à moi passé un bon moment à lire ce roman, il entre dans le cadre de ce que j’attends de la lecture. J’ai bien aimé cette écorchée vive à la « 37°2 le matin »…

Lindy - Toulouse - 46 ans - 20 mars 2008


Du Despentes Craché 8 étoiles

J'aime surtout Virginie Despentes, la femme. Mais j'aime aussi Virginie Despentes l'auteure. Tout simplement car les personnages qu'elle dépeint lui ressemblent énormément, c'est à se demander si elle n'utilise pas ses propres anecdotes pour les faire vivre à ses personnages. J'aime son style, sa façon de dénoncer le monde, l'actualité, la société comme une anarchiste le ferait. Sa façon d'être féministe et pessimiste.
J'aime ByeBye Blondie, pour son côté irritant et grinçant, très loin des clichés de la littérature actuelle où tout le monde est beau, gentil et avec des carrières de rêve presque sans problèmes. Virginie Despentes nous propose des personnages à qui nous ne voudrions pas ressembler. Puisque beaucoup trop d'auteurs nous proposent une utopie comme mode de vie, Virginie Despentes va à l'encontre de cela, et nous propose l'anti-utopie. Mais n'est-elle pas plus proche de la réalité finalement ?
La quatrième de couverture indique que c'est le récit le plus émouvant de Virginie Despentes, et là, je ne crois pas. Il n'y a rien d'émouvant la dedans, c'est un récit plein de colère, autant par la description du personnage que par l'écriture. On ne peut être qu'irrité mais pas ému par un tel récit. Il ouvre de nombreuses sensations, la colère, le dégoût, la peur, l'anarchie mais pas un seul " beau sentiment ", la nostalgie par exemple n'est pas belle. Ce que Gloria regarde avec des yeux de manque et d'envie, ce sont ses soirées au bar à boire et se droguer, il n'y a rien de " romantique " là dedans.
Une critique cependant, vers la fin de l'ouvrage, le rythme se tasse, ça devient long de voir Gloria qui ne fait rien, ne devient rien, et ne cherche pas à devenir quelqu'un malgré toutes les possibilités qui s'offrent à elle. Alors on se lasse, se languissant la fin, et pensant tout bêtement qu'à la fin " un coup d'éclat " rattrapera cette lenteur. Cependant, aucun coup d'éclat sur la fin, et on est même très surpris que cela se finisse ainsi. Sans rien de bien important. Fin bâclée ?
On s'attend à lire une histoire d'amour qui va tout bouleverser, autant les personnages que les lecteurs. On s'attend à une histoire d'amour débordant de passion et de force. On ne se trompe pas jusqu'à la fin. L'histoire d'amour de ces adolescents est tout comme nous l'attendions : prêts à tout pour rester ensemble. Mais lorsque 20 ans plus tard, l'histoire d'amour recommence, le grain de folie est définitivement mort. Et à la fin, le couple s'enferme dans une banalité qui fait peur, bien loin de ce qu'on s'attendait en lisant la 4ième de couverture. C'est dommage. L'ouvrage aurait du se terminer par quelque chose de fort et de puissant. Peut-être au moment où ils sont prêts à sauter sur le rebord de la fenêtre. Là c'est fort, et là ça aurait été à la hauteur de Despentes. Mais la fin proposée est fade.
Je vais mettre cependant une bonne note à cet ouvrage, tout simplement parce que c'est du Despentes craché.

SydneY - - 37 ans - 8 novembre 2006


Un roman pour les fondus de connaissances socio-historiques 6 étoiles

Gloria est un symbole, celui de la modernité voire même celui de l'accélération de la modernité. Son personnage offre l'occasion d'apprécier et de prendre conscience du changement d'époque et de mentalité vers la fin du 20ème siècle. Gloria, tout comme Eric, présente un trouble psychologique et même si FREUD ou PIAGET ont posé les bases de la psychologie plus tôt dans le siècle, cette discipline dans les 80's est toute neuve et se porte le témoin de la transition, celle du glissement vers l'individualisme (le trouble psychologique est la maladie de l'individu constamment renvoyé à ses insuffisances en raison des exigences en permanence en crescendo dans la société). L'homme se fixe-t-il des buts qu'il ne parvient même pas à identifier?

D'un point de vue plus littéraire, le style de Virginie DESPENTES irrite par sa vulgarité et son rythme décadent. Néanmoins, ce dernier est au service de la caractéristique principale de Gloria : l'impulsivité. Le redondant langage franco-anglais illustre le "new age" et alerte le lecteur sur l'ouverture culturelle des frontières tant symbolique dans les 70's. Nous retrouvons l'idée du 1er paragraphe.

"Bye bye Blondie" est une histoire d'amour. Le récit en est optimiste en dépit de la relative difficulté qu'éprouvent les personnages à trouver l'équilibre dans leur relation amoureuse et sociale. D'une part la relation parvient à exister malgré la distance sociale qui sépare Eric et Gloria et d'autre part Virginie DESPENTES irrigue leur relation d'une force, une attirance que tous les deux ne contrôlent pas (le destin ne les a t-il pas fait se retrouver en plein trafic urbain sous une pluie battante?) et d'ailleurs une des dernières phrases du livre en est révélatrice : "Elle s'avoue, finalement, ce que tout son corps sait déjà : elle est chez elle, ici, à sa place, auprès de lui".

Le titre "Bye bye Blondie" résonne et les échos reviennent avec une force élastique. "Bye Bye" est une expression symétrique, un élastique qui relie Gloria et Eric pour la vie. Par ailleurs, l'utilisation de l'anglais pourrait être un moyen de détourner la trop rude signification française du "au revoir". "Bye bye" est au final un mot anglais dont la signification est artificielle ; à plus tard Gloria, à plus Eric....

Life is a book - - 42 ans - 10 mai 2006