Les sentiers obscurs de Karachi
de Olivier Truc

critiqué par Tistou, le 7 novembre 2023
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Enquête sur un drame pas vraiment expliqué
Le drame, c’est l’attentat à la bombe, en 2002 à Karachi, du bus qui emmène des techniciens français de leur hôtel à leur lieu de travail ; mise au point d’un sous-marin acheté à la France par le Pakistan. Ils venaient de la base nautique de Cherbourg, ils sont 14 à mourir.
C’est lors d’une résidence d’écriture à Karachi en 2016, en marge du Festival de Littérature de la ville, que l’idée germe dans le cerveau d’Olivier Truc.

Ce roman n’aurait jamais vu le jour sans ma rencontre avec des Pakistanais, certains ayant requis l’anonymat. J’ai en mémoire une conversation à bord d’un rickshaw dans une ruelle encombrée et bruyante de Karachi qui joua un rôle déterminant. La démarche est assez simple. En France on connait l’affaire, plus ou moins. Karachi rime avec rétrocommissions. Et le point de vue pakistanais ?

Olivier Truc raconte donc cette affaire, ses tenants et aboutissants, qui ont conduit à l’attentat. Sous forme romancée, très facile à lire et pas didactique pour un sou. En cela c’est bien l’Olivier Truc que l’on connait dans sa série de polars « La police des rennes » (rappelons qu’Olivier Truc est journaliste basé à Stockholm).
Il fait mener l’enquête vingt ans après par Jeff Kerral, un jeune journaliste localier, bien immergé dans l’atmosphère du drame puisque aussi bien son père que l’ex-meilleur ami de celui-ci étaient des employés du chantier naval. Jeff Kerral va se rendre vingt ans plus tard sur les lieux fort de quelques noms et adresses confiées par des anciens. Cela va donner l’occasion de très belles pages sur la mise en place de l’atmosphère pakistanaise, de Karachi, de ses problèmes toujours bien présents (vous savez « l’Orient compliqué » auprès duquel on vient avec des idées simples cher à De Gaulle …).

»La vingtaine d’hommes arrivés dans deux minibus marchaient vers le centre de Mubarak village. Un homme en tenue traditionnelle grise à la barbe orange teinte au henné tenait un mégaphone et scandait des slogans que les autres répétaient. Zikri kafir ! Zikri kafir ! Le ton était agressif, les poings tendus hargneux.
Jef n’avait eu que le temps de suivre Firaq en courant pour contourner les manifestants. Le médecin plaqua Jef contre une cabane, le temps que le groupe passe le long du puits, en direction de la maison de récitation. La soudaine vivacité de ce petit homme frêle perçu jusqu’à présent comme une victime fataliste étonna Jef.
- Ce sont des militants de la Jamiat Ulema-e-Islam, l’Assemblée du clergé islamique. Des extrémistes. »

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L’Histoire se pare des atours d’un roman classique dans sa forme, mais agrémentée de considérations plus purement journalistiques (d’investigation) passionnantes. Ca fait de Les sentiers obscurs de Karachi une lecture très riche et néanmoins facile.