Les Aurores montréales
de Monique Proulx

critiqué par Cuné, le 2 décembre 2004
( - 57 ans)


La note:  étoiles
Coup de coeur !
Recueil de 27 nouvelles, les Aurores Montréales nous décrit Montréal à travers la multiplicité de ses habitants. L'écriture est brillante, bluffante, les dénouements souvent inattendus, le ton général impressionnant. Je savais que j'allais aimer Monique Proulx à travers toutes les critiques que j'ai pu en lire, je ne m'attendais pas pour autant à prendre cette claque au visage. C'est excellent !

Ma nouvelle préférée c'est Rouge et blanc, qui est une lettre qu'une jeune femme inuit adresse dans l'absolu à la déesse Aattaentsic, au sortir d'une tentative de suicide. 3 pages et demie, qui disent tellement de choses de plus que les mots. Par exemple :

"Je veux nous voir comme ils nous voient. Je veux mettre leurs yeux froids dans mes yeux pour regarder ce que nous sommes devenus, sans ciller et sans m'effondrer. [ ...] Je veux voir avec leurs yeux comment ils arrivent à nous condamner au lieu de nous plaindre."

Peut-être aussi Fucking bourgeois. Parce qu'elle est remplie d'élégance et de raffinement, et injuste dans son final. Toutes ces évocations gastronomiques m'ont donné l'eau à la bouche, c'est puissamment évocateur.

Sans oublier Madame Bovary, qui est très forte, très caustique.

Bref, toutes ces nouvelles sont passionnantes, actuelles, fines, et Monique Proulx vient d'entrer dans mon panthéon. A lire !!
Mille visages 9 étoiles

Montréal hallucinant. Montréal imprévisible. Montréal rouge vif, Montréal ironique. Montréal en action et surtout incroyablement vivant. Les aurores montréales, portraits d'une ville aux mille visages. Monique Proulx signe ici une oeuvre d'une grande pertinence.

Steph-9 - - 34 ans - 15 mars 2010


Portraits justes 8 étoiles

Toutes les nouvelles étaient excellentes, certaines m’ont plus marqué. J’ai eu la gorge nouée en lisant Jouer avec un chat (la fragilité de la vie, j’ai toujours tendance à être sensible quand il s’agit d’animaux), L’enfance de l’art m’a estomaqué (on ne peut la lire sans être affecté) et Oui or No (l'éternel dilemme québécois). Les histoires Léa et Paul (le milieu - début - fin d’une liaison) et Madame Bovary (le fameux bovarysme, on n’y échappe jamais!) sont celles dont j’ai le plus connecté.

C’est si vrai. Des nouvelles sur Montréal, mais on y retrouve des thèmes universels : la perte de l’innocence, l’immigration, la pauvreté, le désespoir, le manque d’amour et la peur de la mort.

Une lecture dont on en ressort secoué. Oui, à lire!

Nance - - - ans - 18 décembre 2007


Une découverte. 10 étoiles

J'admire les écrivains qui en quelques pages disent tout, et c'est le cas ici. Pas un mot superflu, c'est net et précis mais cela prend aux tripes. Les fins de nouvelles sont toujours surprenantes et déroutantes. Je pense à "L'enfance de l'art" qui laisse abasourdi. D'autres sont plus heureuses " Gris et blanc" ou souligne la stupidité d'un certain milieu intellectuel " Français, françaises". "Madame Bovary" est un chef-d'œuvre d'observation d'une bourgeoisie, prise au piège de ses rêves et pour qui le retour sur terre ne sera pas sans désillusions. J'ai beaucoup aimé également "Jouer avec le chat", qui nous rappelle que le temps passe et que la mort nous guette.
A noter, cette trouvaille qui est pleine d'humour dans "Français, françaises" les éditions Galligrasseuil".

Eireann 32 - Lorient - 77 ans - 27 février 2005


Nouvelles d'ici 10 étoiles

Je comprends exactement le sentiment que Cuné évoque en parlant de « claque au visage » Car j’ai vécu moi aussi la même expérience. En lisant les premiers textes, j’ai immédiatement fait un lien avec les nouvelles d’Anna Gavalda, mais celles de Monique Proulx ont un ton beaucoup plus incisif. En fait, je dirais que son écriture est carrément dévastatrice.

Quel talent pour distiller l’essence de Montréal. Le regard qu’elle porte est juste et exprime toute la complexité de cette ville, mosaïque culturelle, grande dame sale, ambivalente, généreuse et festive, que je croyais pourtant insaisissable. Ce n’est certainement pas un recueil carte postale. L’auteure utilise la métropole comme toile de fond, mais ce sont les personnages, infiniment humains dans leurs faiblesses, qui rendent l’ensemble si bouleversant d’authenticité. J’ai adoré.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 55 ans - 8 février 2005


Montréal à la carte 9 étoiles

Monique Proulx est l'un de mes auteurs préférés. J'ai lu toutes ses oeuvres. Aurores montréales est la plus sociologique de toutes. L'auteure trace un portrait vraiment ressemblant de ce qu'est Montréal. Cette ville ne représente pas du tout le Québec. À moitié francophone, à moitié allophone, allez savoir ce qu'est Montréal quand on se fait chasser d'un restaurant parce que l'on parle français. Incident qui m'est arrivé. Monique Proulx donne une bonne idée de cette ville avec ses immigrants qui tentent de s'adapter à une population ambivalente alors que les gens de souche cherchent aussi à s'adapter à cette ville hétéroclite. Suis-je québécois ou canadien? Vrai dilemme shakespearien.

Ce recueil de nouvelles récupère toutes les icônes qui nous identifient : le métro, le cimetière de Côte-des-Neiges, la rue Sainte-Catherine au coin de St-Laurent qui rassemble tous les paumés dans des bars cheap (mal famés) et dans les bouis-bouis qui vendent de la pizza à la pointe. L'auteure ne présente pas seulement les lieux qui nous réunissent comme le stade olympique ou les magasins comme Canadian Tire (on y vend pneus, plantes, peintures, vaisselle, vélos, baskets...), elle brosse aussi le tableau des relations que nous entretenons entre les différents groupes. À ce chapître, elle dresse la liste des craintes qui habitent les Montréalais. Finalement est-ce la neige qui pourrait nous rassembler? Ce serait bien si c'étaient les aurores boréales, mais elles sont invisibles à cause de l'éclairage de la ville. C'est l'essence humaine qui pourra tenir ensemble italiens, grecs, arabes, asiatiques, juifs, noirs, gens qui quittent la campagne, gens de souche, autochtones (presque absents de la ville), strip-teaseuses roumaines que le gouvernement fait venir au Canada aux frais des contribuables. Un vrai zoo humain où chacun tente de s'apprivoiser en se tapochant (tapoter pris dans un sens ironique) assez souvent, surtout quand les gangs parcourent les rues en quête de clients pour vendre leur came.

Ceux qui désirent visiter Montréal pour la première fois, ce recueil de nouvelles bat le Guide Michelin ou les oeuvres de Michel Tremblay qui nous promènent dans son quartier ouvrier, devenu aujourd'hui le quartier des parvenus de la culture, et dans les bars fréquentés par ceux qui ont des orientations sexuelles inverties. Et l'écriture de Monique Proulx a du chien à l'intérieur des normes linguistiques.

Libris québécis - Montréal - 82 ans - 2 décembre 2004