Épiphanie de l'Alphabet de Maria Luisa Spaziani
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie , Littérature => Européenne non-francophone
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«Et je prie pour toi, j’ai toujours prié. Et ri et pleuré et blasphémé.»
«La cheminée»
Vieille tu me vois, et pauvre sans issue,
réduite à éclairer ma pièce
avec le peu de braises de ton souvenir.
Autre chose m’attend au tournant, tu le sais bien.
Qui a eu le soleil est aveugle.
Aveugle qui ne sait pas voir sa gloire.
Si elle est beaucoup plus connue dans nos pays du Nord, comme la traductrice en langue italienne de certains des plus grands écrivains français (Gustave FLAUBERT, André GIDE, Michel TOURNIER, Jean RACINE, Marguerite YOURCENAR…), en Italie, son pays natal, Mme. Maria Luisa SPAZIANI (1922 – 2014) est d’abord et avant tout… poétesse!
Ce n’est donc que rendre «justice» à celle qui fut une des plus grandes figures poétiques italiennes de la deuxième moitié du XXe S. que de faire paraître ce petit recueil de poèmes, composé d’une sélection de poèmes, choisis parmi les nombreuses publications de la poétesse entre les années 1954 et 1992. (1)
«Elle attend ton empreinte»
«L’indifférence est un enfer sans flammes.
Souviens-t ’en en choisissant
parmi mille teintes ton gris fatal.
Si le monde n’a pas de sens,
c’est toi le vrai coupable.
Elle attend ton empreinte
cette boule de cire.»
La poésie de Mme. SPAZIANI présente un style soutenu, exigeant, avec beaucoup de métaphores, le tout est très classique dans sa conception, mais avec une très belle langue. Elle ressemble à s’y méprendre à celle de M. Eugenio MONTALE (1896 – 1981 Prix Nobel de Littérature 1975) (2), qui était d'ailleurs son grand ami dans la vie... Elle possède un don incroyable de rendre précieuses les choses simples que nous rencontrons tous les jours.
«Paris dort. Un énorme silence
est descendu occuper chaque interstice
de tuiles et de murs. Chats et oiseaux
se taisent. Moi seule en sentinelle.
Août sans klaxons. Je survis
unique, peut-être. Je tiens dans mes bras
comme Sainte Geneviève ma ville
qui pointe du manteau, au fond du tableau.»
Il y a une grande force poétique dans les écrits de Mme. SPAZIANI (très bien restituée d’ailleurs par la traduction de Mme. Maria Luisa CALDOGNETTO et M. Jean PORTANTE), qui fait souvent allusion à l’ineffable, sans doute par choix à cause de l’impossibilité de la langue d’atteindre l’essence des choses.
«Aboie toi aussi contre la vie brève,
contre ce vent qui efface les vers
gravés, crucifiés dans la neige»
(…)
Le plus souvent l’autrice nous fait partager le monde de l’auteur, ses sensations existentielles et métaphysiques, elle nous parle du mystère de la vie.
«Les vaincus, étoiles mortes de l’Histoire,
du cimetière de Montmartre me lancent
avec des feux follets, avec des mots obscurs,
de désespérés messages.
Ainsi autrefois, de voilier en voilier,
alphabets de flambeaux, appels.
Le cimetière est un immense voilier
qui fait naufrage pour l’éternité.»
Pour finir cette trop courte recension, sur cette immense poétesse, comment puis-je vous restituer ne fut-ce que très partiellement, et certainement de manière très incomplète l’incommensurable talent de Maria Luisa SPAZIANI? Ainsi, si un jour vous vous visitez Arles, sur les traces de Vincent Van GOGH (1853 – 1890), vous direz que vous avez visité la ville et admiré les tableaux du peintre néerlandais, Mme. SPAZIANI, avec l’immense talent qui est le sien, elle dit ceci :
«A Vincent V. G.»
Toi qui un soir à Arles m’a prêté tes yeux
pour cueillir des lunes irradiantes entre étoiles nervines,
toi qui nous as faits gitans entre vagues de blé en fleur
et aux branches de sapins accrochais lanternes et miracles,
prends-moi encore par la main, frère si jamais j’en eus un,
et coupe-moi l’oreille encline aux leurres déviants,
la main qui caresse, le pied qui emporte ailleurs-
resplendisse absolu le cœur en châsse d’ex-voto,
un cœur qui se refuse, pensée contaminée,
qui se piétine soi-même, se pende entre rayons et girandoles,
perdre les amarres, écrase les réseaux de la raison,
filtre ses pépites des cascades infernales.
Toi qui peins le vent, apprends-moi à le chanter
avec des ultrasons de syllabes, sans jamais le nommer,
souffle rasant la page qui parle d’autre chose,
dieu qui plus brille dans le noir de qui le nie.
(1). : «Épiphanie de l’alphabet» propose des textes extraits de :
Le acque del Sabato (Les eaux du samedi), 1954.
Prix international «Byron», Londres.
Il gong (Le gong), 1962
Prix «Firenze».
Utilità della memoria (Utilité de la mémoire), 1966.
Prix «Carducci».
L’occhio del ciclone (L’œil du cyclone), 1970.
Prix «Citadella» et prix «Trieste».
Transito con catene (Transit avec des chaînes), 1977.
Prix «Vallombrosa».
Geometria des disordine (Géométrie du désordre), 1981.
Prix «Viareggio».
La Stella de libero arbitrio (L’étoile du libre-arbitre), 1986.
Prix «Pescara-Flaiano», prix «Città di Catanzaro» et prix «Città di Adelfia».
Torri di vedetta (Tour de garde), 1992.
Prix «Calliope», Rome.
(2). : Cf. ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vauteur/40325
Rappelons que le nom de Mme. Maria Luisa SPAZIANI a été proposé pour le Prix Nobel de Littérature en 1990, 1992 et 1997.
Les éditions
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Épiphanie de l'Alphabet
de Spaziani, Maria Luisa Portante, Jean (Traducteur) Caldognetto, Maria Luisa (Traducteur)
Editions PHI / Graphiti
ISBN : 9782879620688 ; 01/05/1997 ; 130 p. ; Poche
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