Badjens
de Delphine Minoui

critiqué par CHALOT, le 1 octobre 2024
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
récit bouleversant
BADJENS


Elles est née fille, ce qui a lamenté son père qui, façonné par la propagande islamiste en Iran avait envisagé de faire avorter sa femme avant la naissance de Badjens. Il voulait un garçon et c'est une fille qui arrive !
Son père l'appelle Khadidja, du nom de la première femme du « prophète » pour laver son péché d'avoir envisagé d'éliminer ce bébé fille avant sa naissance,
Pour sa mère et pour tout le monde, cette fille prendra comme prénom, Bad-jens qui signifie mot à mot , mauvais genre et en persan, espiègle ou effrontée.
Badjens va se construire une identité de jeune fille qui combat un environnement familial et scolaire machiste et réactionnaire.
A l'école et dans la rue, elle sera qu'on veut qu'elle soit mais à la maison, c'est clair, elle est comme elle veut être.
C'est une résistance silencieuse, volontaire contre le voile imposée, résistance menée par toute une génération de jeunes filles qui refusent les mariages forcés, les violences faites aux femmes.
L'histoire de cette jeune fille qui commence par une naissance non désirée et qui se prolonge par un viol perpétré par un proche de la famille se termine dans cette localité de Chiraz à l'automne 2022. Badjens se trouve à l'avant-poste de la révolte de la jeunesse et notamment des jeunes filles à la suite de l'assassinat « légal » de cette autre iranienne qui avait un voile mal ajusté.
Cette histoire est bouleversante... Rien n'est gai même si le lecteur esquisse un sourire quand Badjens raconte que si l' homosexualité interdite en Iran et passible d'une exécution capitale, pour une Jeune fille « Il est plus facile d'avoir une petite copine puiisque les relations entre personnes du sexe opposé sont haram, « proscrites » avant le mariage »
Comme le dit sa copine Leyla : « il suffit d'inviter une camarade pour une soirée pyjama. Et hop, ni vu ni connu, tu finis la nuit dans son lit. »
Ce livre, véritable monologue intérieur nous colle à la peau .
Ce récit qui est rythmé, poétique à certains moments nous entraîne à une réflexion profonde sur la condition féminine et le féminisme qui continue à se développer même sous la chape de plomb de régimes intégristes !

Jean-François Chalot