Révolution et mensonge de Alexandre Soljenitsyne

Révolution et mensonge de Alexandre Soljenitsyne

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Essais

Critiqué par CC.RIDER, le 15 septembre 2024 (Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans)
La note : 9 étoiles
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Ah ça ira… ou pas…

Peut-on vraiment vivre sans mentir ? Un totalitarisme peut-il perdurer sans violence ni mensonge ? Et quid de la passivité de l’opinion publique, de sa collaboration avec un pouvoir inique alors qu’il suffirait qu’un nombre suffisant de personnes, sans même se dresser ouvertement, sans même descendre manifester dans la rue et encore moins aller affronter les forces de répression, se contente de ne plus obéir du tout pour que toute tyrannie s’effondre tel un château de cartes… Comment une simple révolte circonscrite à la seule ville de Saint Pétersbourg et sans aucun réel soutien du peuple, put-elle prendre une importance considérable et tout faire basculer en février 1917 ? Pourquoi le tsar Nicolas II abdiqua-t-il aussi facilement ? Pourquoi ne fut-il pas capable de s’appuyer sur la noblesse et l’armée ? Quels furent les points communs et les différences entre la révolution française et la révolution russe ?
« Révolution et mensonge » est un ouvrage regroupant trois essais de philosophie politique écrits par Alexandre Soljenitsyne en marge et en complément d’une de ses œuvres magistrales « La roue rouge ». Le premier « Vivre sans mentir », datant de 1974, s’attaque plus généralement aux problèmes de la soumission à l’autorité, de la lâcheté du public par calcul, manque de conviction voire par sottise pure et simple. On est dans le registre de la psychologie et de la manipulation des foules, voire celui de la « Servitude volontaire » si bien décrite par La Boétie. Dans le deuxième, « Leçons de février », écrit en 1983, l’auteur s’attache plus à la personnalité de Nicolas II, sa posture presque trop « chrétienne » lui interdisant de réagir en faisant couler le sang de son peuple, tout comme son côté petit bourgeois, soulagé d’être enfin débarrassé du fardeau du pouvoir et heureux de pouvoir retrouver sa petite vie de famille. Quant au troisième, il est peut-être le plus intéressant du point de vue historique (« Deux révolutions, la française et la russe », 1984). Les similitudes que le lecteur y découvrira sont innombrables. Deux monarques faibles, mal entourés, mal soutenus et peu réalistes. Un enchainement d’évènements étrangement parallèle, un emballement quasiment incontrôlable avec élimination des plus modérés (Mencheviks en Russie, Girondins en France) au profit des plus extrémistes (Bolcheviks et Montagnards). Même haine de la religion, même liquidation du clergé qui refuse de se soumettre. Même spoliation, même ruine et même effondrement du pays. Seule différence notable : en France, tout s’acheva par un Thermidor qui vit la Révolution dévorer ses enfants avant de passer la main à un dictateur qui s’improvisa empereur et répandit la guerre dans toute l’Europe (la comparaison Napoléon/Staline ne semble pas pertinente). Les Bolcheviks russes, très inspirés par la révolution française, surent habilement éviter le piège et faire durer leur pouvoir presque trois quarts de siècle avec des souffrances bien pires et des victimes en nombre nettement supérieur…

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