Cartographie des salles d'attente
de Gilles Moraton

critiqué par Débézed, le 30 septembre 2024
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Absurde mais vraie
Ca fait déjà un temps certain que je n’ai pas lu un recueil de nouvelles de chez Cactus inébranlable éditions, j’ai été ravi de trouver celui-ci et d’avoir eu le plaisir de le lire. J’en remercie l’équipe éditoriale. J’ai d’abord été enchanté par la qualité de l’écriture de l’auteur : son texte est très dense, son vocabulaire est très riche, ses mots sont fort bien choisis, la ponctuation est généreuse et opportunément usitée. Ces textes sont très fluides mais aussi très intenses, ils expriment avec force ce que l’auteur veut dire : un monde insolite, incongru, des personnages improbables, des situations absurdes, des événements rocambolesques. Une parodie, une métaphore, une caricature, …, du monde et des peuples qui l’habitent. Plus que des textes absurdes, c’est plutôt une mise en scène de l’absurdité humaine que l’auteur met dans les mots qu’il utilise avec tant de talent.

Le mots, Gilles, il les aime comme il l’écrit dans l’une de ses nouvelles : « Je trouve peu d‘intérêt au commerce avec mes contemporains. Je ne perds pas l’usage de la parole, dans la solitude. Au contraire, je me sers des mots comme jamais. Je me les formule, avec une volonté de précision pour essayer de définir au mieux ce qui se passe en moi ». La solitude est l’un des thèmes qu’il évoque dans ce recueil, comme la guerre qu’il sait comment détourner, il conseille aux plus faibles de céder aux puissants pour les priver d’ennemis.

Avec ses mots, il aime aussi voyager sur un ilot du Pacifique sur lequel un marin connaît une aventure peu banale, Valparaiso qu’il s’interroge pour savoir si c’est une vile molle ou une ville dure, … Et voyager c’est franchir des frontières qu’il ne semble pas apprécier beaucoup, il dit celle qu l’on déplace sans jamais pouvoir concrétiser ce déplacement faute de fonctionnaires disponibles et puis celle qui traverse une auberge… celle-ci je la connais, elle est dans la Haut-Jura, elle a beaucoup servi aux contrebandiers et aussi aux passeurs pendant la dernière guerre. Je sais où elle est, je l’ai visitée.

Ce ne sont là que quelques exemples, ce recueil en comporte treize dont un qui évoque la recherche de John Lennon par une femme qui était jeune quand les Beatles démarraient leur carrière. Sous forme d’u clin d’œil, je citerai aussi le texte éponyme du recueil que j’ai lu, en partie, dans la salle d’accueil de mon dentiste pour dissiper mon appréhension de la roulette.

Je dois dire aussi que Gilles à une très belle culture qu’il met en valeur dans ce texte ou plutôt qui met en valeur son texte, qu’il a le sens de la formule, qu’il manie le paradoxe avec une grande habilité et qu’il sait jouer avec ses personnage pour les faire naviguer d’un texte dans l‘autres comme la maitresse du patron du garage Mercedes.