La justice en question

Dans ce court opus, Christian Charrière-Bournazel prête sa plume à un condamné à la prison à perpétuité qui raconte son crime, son procès et les conditions de détention dans lesquelles il devra vivre le reste de sa vie, au moins le temps de la peine de sûreté qui lui a été infligée. Avant de prêter sa plume, l’auteur a été avocat, il a connu une très belle carrière au barreau de Paris dont il a été le bâtonnier parmi d’autres fonctions de portée nationale.

En rupture avec l’autre monde, celui du dehors, désespéré, pour ce donner un but, le narrateur décide d’écrire son journal sous la forme de lettres qu’il adresse à lui-même, le « Journal à un mort » dans lequel il raconte la promiscuité avec un autre condamné qui ronfle et pue, le mépris des gardiens, les violences infligées par les vrais maîtres des lieux, les condamnés les plus élevés dans la hiérarchie des détenus. Il raconte aussi sa lutte pour essayer de se faire entendre pour obtenir un nouveau procès car il pense ne pas avoir été écouté ou du moins ne pas avoir été entendu. Les faits qui lui sont reprochés sont pourtant d’une extrême gravité et appellent souvent la peine maximale.

Il essaie de trouver une façon d’occuper ce long temps dont il a été privé, il s’adonne à la lecture qu’il n’a que peu pratiquée jusqu’à son crime, il voudrait aider ceux dont le niveau scolaire est le plus faible pour qu’ils puissent être dans de meilleures conditions intellectuelles quand ils sortiront de l’enfer carcéral. On lui refuse tout contact avec les autres détenus sans la présence d’un maton, aucun ne veut faire des heures supplémentaire pour le bien des détenus. Le seul choix qu’il envisage réside dans cette alternative : « … me tuer ou apprivoiser ma souffrance pour le jour où je renaîtrai à la vie… ».

Il accepte de recevoir un ancien taulard devenu visiteur de prison avec lequel il échange sur la nature de leur forfait respectif, sur la vie en prison, sur l’acceptation de la peine, la résilience, la formation pour se bonifier. Mais, cette démarche ne le mène que vers le désespoir plus grand encore devant l’absence d’une issue possible et l’impossibilité d’envisager un après acceptable. Dans ces conditions à quoi bon s’améliorer, se bonifier, ?

Dans ce livre Christian Charrière-Bournazel pose tout d’abord le problème de la gestion carcérale, des conditions de détention et de la réinsertion des détenus. Vaste débat qui fait souvent l’objet de controverses dans les milieux politiques et dans les médias. Mais ce problème n’existerait pas si la détention n’existait pas. L’auteur évoque le problème d’une autre façon en posant des questions fondamentales : qui peut et a de droit de juger ? Qui peut quantifier une peine et définir les privations qui peuvent être infligées à un condamné ? La société ne peut-elle pas trouver une alternative à la détention ? Une autre façon d’aborder la faute et sa sanction n’est-elle pas envisageable ?

Ce livre est le fruit d’une longue carrière jonchée de nombreux procès ayant entraîné de lourdes condamnations et un véritable plaidoyer pour une autre façon d’aborder la justice et surtout une remise en cause des conditions de détentions des condamnés.

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  Perpétuité [Texte imprimé]

  de Charrière-Bournazel, Christian
  Éditions Marie Romaine
  ISBN : 9782494738317 ; 12,90 € ; 23/04/2025 ; 104 p. ; Broché

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