Amériques
de Tristan Alleman

critiqué par Débézed, le 21 avril 2025
(Besançon - 78 ans)


La note:  étoiles
Road trip en taxi
Ce livre a été écrit alors que Tristan n’avait que vingt ans, il n’est publié qu’aujourd’hui alors qu’il en a au moins trois fois plus. C’est un peu son « L’Attrape cœurs » à lui, son roman initiatique en littérature, un roman qui raconte des histoires floues mal définies, peuplées de personnages au contours incertains mais qui dégagent des émotions fortes. C’est un voyage à bord du taxi de Mozel, un voyage incertain, parfois proche du réel, souvent onirique, une allusion au périple nocturne de Travis Bickle dans « Taxi Driver ».

Dans son taxi Mozel plonge au cœur d’une petite ville qui évoque Hollywood, il embarque des personnages dont les noms évoquent des stars du cinéma de l’époque : Rita Hayworth, Cary Grant, Humphrey Bogart, Marylin Monroe, … et les emmène dans des road trips sans destination clairement définie. Il grimpe dans son taxi comme un cow-boy enfourche son mustang et part pour les grands espaces comme Kerouac traversait l’Amérique sur la N 66. C’est poétique, c’est cinématographie, on passe d’Hollywood au western avant d’avaler les grands espaces …
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Mozel comme Bickle est obsédé par une femme qu’il a prise à bord de son taxi et la recherche dans toute la ville et ailleurs jusqu’au cœur même de ses rêves et illusions. Cette femme c’est peut-être Aurélie ou Françoise les deux femmes qui reviennent régulièrement dans son histoire mais peut-être Aurélie et Françoise ne sont-elles qu’en seule et même femme qui le suit partout ? « Pour toi, …, ce sont juste des reflets d’amour. Tais-toi, écoute-moi. Une, nous sommes une, comme toutes les femmes de ta vie. Toutes nous emportons le monde là où il faut qu’il te soit ».

Dans ce texte Tristan réinvente la langue, il use de néologismes, de substantifs conjugués, de mots répétés pour mieux les asséner et lui donne même une odeur : celle du parfum Cristal qu’il retrouve partout, sur toutes les femmes qu’il charge dans son taxi. Pour moi, la lecture de ce texte a évoqué mes jeunes années, celles des sixties, du cinéma hollywoodien avec ses stars, ses cow-boys, ses pinups peroxydées, ses films mythiques, …

Ce texte c’est aussi un vaste mélange d’impressions, de sensations, d’émotions, … , qui évoque les textes de « Salinger, Brautigan, Kerouac, …, et des films comme Taxi driver notamment. Pour moi, cette lecture c’est ce qu’un teenager pouvait ressentir au siècle dernier à la lecture des romans à la mode et au visionnage des films en vogue… Un bout du rêve américain avant qu’il s’évapore sous la férule des marchands jamais rassasiés et des nationalistes étriqués dans leurs petites certitudes. « Parfois les souvenirs parlent à ma place, et ils disent des bêtises ». Peut-être ?