Scarlett
de François-Guillaume Lorrain

critiqué par Poet75, le 28 avril 2025
(Paris - 68 ans)


La note:  étoiles
La difficile réalisation d'un film mythique
L’auteur ayant laissé libre cours à son imagination, il s’agit bien d’un roman, quoique fondé sur des faits bien réels, ceux qui présidèrent à la réalisation d’un des films parmi les plus mythiques de l’histoire du cinéma, Gone with the Wind, en français Autant en emporte le vent. Manifestement fort bien documenté, François-Guillaume Lorrain raconte d’une plume alerte les événements qui entourèrent la conception, l’exécution et la promotion d’un film dont son producteur, David O. Selznick, en mégalomane qu’il était, voulait qu’il soit le plus grand film de tous les temps.
Alors que l’on considérait généralement que le public se désintéressait de ce qui concernait la guerre de Sécession, l’étonnant succès remporté par le copieux roman de Margaret Mitchell dès sa publication en 1936 persuada Selznick d’en acquérir les droits. Commença alors le long processus qui conduisit à la réalisation d’un film qui ne sortit sur les écrans qu’en 1939. Le roman comprenant plus de mille pages, il fallut le concours de multiples scénaristes pour aboutir, non sans peine et non sans beaucoup d’élagages, à un script final satisfaisant.
Mais l’écriture du scénario ne fut qu’un des aspects des difficultés rencontrées par Selznick et ses coopérateurs. Il y eut, bien sûr, le choix du réalisateur. L’élu, George Cukor, dut d’ailleurs être remercié en cours de tournage pour être remplacé par Victor Fleming. Cependant, c’est le choix des acteurs et actrices qui causa le plus d’embarras, en particulier pour ce qui concernait l’acteur principal, qui devait jouer Rhett Butler, et l’actrice principale, qui devait jouer Scarlett O’Hara.
Pour le premier, ce fut relativement simple. Si le nom de Gary Cooper fut un temps évoqué, l’on ne tarda pas à se persuader que Clark Gable était l’homme de la situation. C’est le choix de l’actrice à qui l’on confierait le rôle de Scarlett qui posa les difficultés les plus grandes, au point que le tournage du film commença avant même que le nom de l’actrice principale fut fixé. Il faut dire que, le roman ayant passionné des foules de lecteurs et surtout de lectrices, tout le monde s’en mêla, si bien que de nombreux noms furent évoqués. Qui serait la Scarlett idéale ? Marlene Dietrich ? Greta Garbo ? Bette Davis ? Lana Turner ? Paulette Goddard ? Katharine Hepburn ? Et ainsi de suite… Selznick accepta même l’organisation d’un concours de jeunes talents destiné à élire la perle rare, celle qui saurait incarner le personnage de la jeune Sudiste dans le respect de toutes ses complexités. Comme on le sait, en fin de compte, in extremis, c’est une Anglaise qui n’avait alors joué que dans quelques films britanniques médiocres mais s’était illustrée au théâtre, c’est Vivien Leigh qui, par un heureux concours de circonstances autant que par sa volonté, décrocha le rôle de sa vie.
François-Guillaume Lorrain fait d’elle l’héroïne de son roman. Elle est au cœur du récit, bien davantage que Selznick, Clark Gable et tous les autres…, sauf peut-être (et l’on en saura gré à l’auteur) Hattie McDaniel, l’actrice noire qui fut désignée pour interpréter le rôle de Mammy, la domestique de Scarlett. Sa place est loin d’être négligeable dans le récit de François-Guillaume Lorrain, elle qui, comme ses congénères, fut en butte au racisme toujours à l’œuvre aux États-Unis, mais fut également durement critiquée par ceux des Noirs qui considéraient qu’elle aurait dû s’abstenir de jouer ce rôle. Elle n’en remporta pas moins un Oscar, qu’elle reçut alors que sa table avait été soigneusement séparée de celle des Blancs à l’occasion de la cérémonie. Elle aussi, quoi qu’il en fut, elle est, avec Vivien Leigh, l’autre héroïne du roman de François-Guillaume Lorrain.