Je mourrai sans avoir rendu tous les coups
de Fabien Thévenot

critiqué par Débézed, le 2 mai 2025
(Besançon - 78 ans)


La note:  étoiles
Odyssée à travers le désenchantement
Dans ce recueil de poésie composé de poèmes très libres et très denses, Fabien Thévenot propose un texte thérapeutique, comme un remède contre la déprime, le désenchantement voire le désespoir. Dans un monde empli de tourments, d’angoisse et d’inquiétude, il dénonce les erreurs, les errances, les errements des populations, et surtout de ceux qui gouvernent, plus ou moins bien, aux destinées de l’humanité : la destruction écologique, le sectarisme nationaliste ou religieux, la violence gratuite, la malbouffe, la désinformation, la publicité ingurgitée de force, la manipulation et tous les éléments qui perturbent le quotidien des populations tout autour de la planète. Il semble accusé les hommes de ne s‘être jamais comporté comme des adultes responsables : « Je suis passé / d’éternel ado / à homme mûr / sans atteindre la case adulte ».

La thérapie pour lui se trouve dans la poésie, les textes à lire et les textes écrits. « Tu lis pour te divertir / moi pour trouver / de bonnes raisons / de ne pas me foutre en l’air ». Lire pour retrouver le monde d’avant : « le gamin a demandé / comment c’était le / monde d’avant, le / monde d’avant internet / . », lire pour bousculer les idées reçues, changer les points de vue, récurer les méninges, … « je n’ouvre pas les livres / pour me faire raconter des histoires / j’ouvre les livres / pour me faire laminer l’esprit ». Il a pensé le monde tel qu’il voudrait le retrouver, un monde sain et silencieux qu’il décrit dans ces quatre vers : « mon idée du sacré / la solitude, le silence & la marche / les trois combinés pour / ne plus être qu’un corps qui avance et qui écrit ». L’objectif qu’il se fixe est « qu’il ne faut pas faire rentrer la vie dans la littérature / mais faire advenir la littérature dans la vie ».

Dans ce texte Fabien démontre, explique, comment il a changé sa personnalité, sa perception du monde, sa vie : « J’ai enterré / Fabien Thévenot / au pied d’un arbre /avec sa grosse besace de colère / & oublié / Les coordonnées GPS », « d’un coup / la réalité me saute au visage / m’attrape à la gorge… ». Le nouveau Fabien est né dans les mots, dans la poésie, il a oublié son amertume, ses déceptions, son désenchantement. Il a retrouvé le goût de l’amour, le goût du corps aimé, « les arômes, les / fluides, les excédents, le / surplus – je ne m’approprie / aucun fief – je cartographie juste / les lopins / de toi ».

Une suite de poèmes, une longue poésie comme une odyssée dans un monde en souffrance pour retrouver le goût de la vie et le goût de l’amour. Un texte fluide comme un ruisseau au printemps mais puissant comme un torrent après la fonte des neiges.