Ethiopiques de Léopold Sédar Senghor
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

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Célébration de la culture africaine
« Ethiopiques » est un recueil de poèmes qui poursuit ce que Senghor a déjà initié, rendre sa gloire à l’Afrique, dépeindre ses grandes figures historiques et mythiques. Le titre du recueil rappelle certains titres de recueils antiques comme si l’on plongeait dans les origines de l’Afrique et que les récits évoqués pouvaient se ranger dans la même catégorie que les mythes antiques, comme celui de la reine de Saba ou de Chaka. Senghor réveille certains souvenirs ou éclaire le lecteur peu accoutumé à l’histoire africaine.
Le poète redore l’image de ce continent en allant à l’encontre de l’image qu’en a l’Occident. Il ne cherche pas pour autant à attaquer avec virulence les colons, mais il donne à voir la richesse de ce continent tant dans ses paysages, que dans les personnes qui le font vivre. Le poète emploie de nombreux termes ancrés dans l’Afrique, ce qui donne une couleur locale, mais surtout fait rêver le lecteur. Ses versets ont un rythme qui nous fait voyager en s’enfonçant dans une Afrique lumineuse et épique. Il y a de la grandeur dans ces personnages et dans ces évocations. Dans l’un des poèmes, le poète choisit la forme du dialogue dans lequel intervient aussi le chœur, comme s’il voulait hisser la culture africaine au rang de cette culture gréco-romaine que nous regardons avec déférence.
Sous chaque titre de poème, figure un instrument de musique, censé accompagner le texte, renouant ainsi avec les origines de la poésie lyrique en la déplaçant vers des sonorités plus chaudes liées au continent africain. Cette musicalité, on la perçoit dans le rythme de Senghor, dans sa façon de lier ses images et ses remarques. Si le lecteur s’abandonne au phrasé du poète, il pourra vraiment apprécier la beauté de cette langue qu’il a ciselée.
Dans son dernier poème, il parle de la négritude et de son travail, de la visée de ses poèmes et de sa façon de composer avec le réel. Je suis totalement séduit par la poésie de Senghor. Elle n’est pas toujours facile à appréhender, peut-être aussi parce qu’on n’est pas familiers de certaines figures dont il parle. Et cela contribue à charmer le lecteur de ce recueil, qui ne cherche pas à être de la poésie française mâtinée d’Afrique. Les poèmes sont écrits en français mais ils nous sortent de notre zone de confort et nous devons aller vers cette Afrique pour y chercher certains indices pour la compréhension. Il y a une empreinte africaine indélébile, une nouvelle langue travaillée par le poète, envoûtante et riche.
Extrait de « Chaka » :
« … Je voyais les peuples du Sud comme une fourmilière de silence
Au travail. Le travail est saint, mais le travail n’est plus le geste
Le tam-tam ni la voix ne rythment plus les gestes des saisons.
Peuples du Sud dans les chantiers, les ports les mines les manufactures
Et le soir ségrégés dans les kraals de la misère.
Et les peuples entassent des montagnes d’or noir d’or rouge - et ils
crèvent de faim
Et je vis un matin, sortant de la brume de l’aube, la forêt des têtes
laineuses
Les bras fanés le ventre cave, des yeux et des lèvres immenses
appelant un dieu impossible
Pouvais-je rester sourd à tant de souffrances bafouées ? … »
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