Le procès Papon: Histoire d'une ignominie ordinaire
de Jean-Jacques Gandini

critiqué par Veneziano, le 26 juin 2025
(Paris - 47 ans)


La note:  étoiles
Génocide et responsabilité d'un haut fonctionnaire
Maurice Papon, haut fonctionnaire, a réussi à maintenir et agrandir son influence sous quatre régimes successifs. Ce qui aurait pu passer pour un sens inné de la diplomatie ou du stratège a masqué une exaction infamante, soit sa participation à l'organisation d'un convoi menant des juifs à la déportation. Il était alors secrétaire général de la préfecture de Gironde, le trajet étant allé de Bordeaux à Drancy puis Auschwitz. Maintenu par De Gaulle au nom de la réconciliation nationale qui l'a même haussé au rang de préfet de police de Paris, puis ministre sous Giscard, il a connu une carrière ascendante classique.
Cependant les descendants de déportés, à commencer par Michel Slitinsky, contribuent à faire connaître son passé trouble et à le faire condamner pour complicité de crime contre l'humanité, avec une peine de dix ans de réclusion criminelle. La sanction semble un peu faible, en raison d'un doute persistant sur sa connaissance de la solution finale, question centrale dans le procès en cours d'assise et dans le présent ouvrage. Après une très longue instruction la cour d'assises de Gironde s'est prononcée en 1998.
La Cour européenne des droits de l'Homme a condamné la France néanmoins pour une raison procédurale ; mais la décision de condamnation a déjà été acquise. Papon a tenté d'échapper à sa peine mais a été retrouvé, après une fuite en Suisse. Il n'est pas fait mention de l'arrêt du conseil d'Etat de 2002 établissant le partage de la responsabilité administrative entre l'Etat et lui-même.

L'historique du procès et des procédures, des passes d'armes, est retracé, de manière fort utile. Ce livre permet d'exercer le devoir de mémoire et devient un document utile sur le rôle des hauts fonctionnaires sur la commission de l'inacceptable. A méditer.