Que de longueurs et de diversions barbantes !

Un jeune Portugais s’engage dans l’armée de son pays et, en 1914, il est expédié avec son régiment dans les tranchées des Flandres pour renforcer les troupes anglaises. C’est une belle histoire et il s’y ajoute une histoire d’amour, assez belle et pas trop édulcorée. Donc, tout pour plaire ? Oui, mais non, pas tout à fait : il y a des longueurs et des diversions à n’en pas finir : quand, par exemple, un couple se retrouve sur une terrasse à Paris, nous avons droit à toute la conversation qui a duré toute l’après-midi : on parle du Louvre, de la Joconde, des merveilles du cubisme… C’est rasoir et ça fait tout un chapitre. Puis quand on est à la table d’un Français avec un officier Britannique et un officier Portugais, on parle cuisine pendant tout le repas. C’est sans intérêt et ça fait de nouveau tout un chapitre. Et c’est comme ça pendant tout le livre. Une autre fois on a droit à toute une conversation sur les philosophes, de Spinoza à Nietzsche en passant par Schopenhauer… C’est du réchauffé et c’est barbant. Et puis un peu plus loin c’est la grande révélation du siècle : Dieu n’existe pas ! Vrai de vrai, et on vous l’explique à n’en pas finir sur des pages et des pages. Ce livre de 575 pages aurait pu tenir en 200 pages. Il aurait alors mérité, peut-être, ses cinq étoiles.

Mais c’est une affaire de goût. Ceux qui me l’ont offert me l’ont présenté comme un livre sensationnel « que tu vas aimer, ça parle de guerre et c’est le genre que tu aimes ». Oui mais… Je ne supporte pas les longueurs et il y en a, en veux-tu, en voilà. On a l’impression que l’auteur s’est cru obligé de rallonger la sauce pour dépasser les 500 pages. Mais je sais que certains aiment ça. L’autre jour dans une librairie j’entendais une dame qui demandait un « gros livre, de quoi lire dans son avion pour un trajet de 18 heures ». La vendeuse aurait pu lui conseiller ce Dos Santos ; il dure longtemps. Moi je n’ai pas pris l’avion et ce livre m’a plus souvent ennuyé qu’amusé.

Le livre se divise en trois parties. La première raconte la vie des personnages, de leur famille, de leur milieu, au Portugal et en France. On fait leur connaissance en suivant leurs nombreuses conversations et leurs faits et gestes. Mais c’est toujours bourré d’un bois de rallonge ; on apprend, par exemple, comment se jouaient les matches de football au Portugal au début du siècle : quand le ballon tombait dans les tribunes, celui qui l’avait reçu filait avec et le match s’arrêtait. C’est amusant mais ça prend tout un chapitre.

La deuxième partie se passe pendant la Grande guerre sur le front des Flandres françaises et ça prend beaucoup plus d’intérêt. C’est encore une histoire de guerre mais ça raconte surtout la vie des malheureux Portugais qui se meurent d’ennui dans les tranchées encore plus que sous les coups des « sales Boches ». Ça raconte, en même temps la vie des planqués de l’arrière, officiers, agents de renseignements, ou pistonnés et parasites en tout genre. Cette deuxième partie est bien construite – d’après des faits authentiques, paraît-il – et malgré des longueurs, ça ne manque pas d’intérêt.

La troisième partie est, disons-le, bien meilleur. Les longueurs se font plus rares. La guerre a commencé pour de bon et l’histoire vire à la tragédie. Le dessous des cartes est révélé et c’est bien raconté. Il s’y mêle une histoire d’amour, tout en pudeur et en retenue entre gens qui, malgré la guerre, ont gardé leurs valeurs et le sens du devoir. C’est si rare dans un bouquin contemporain que j’en ai été tout ému. Et ça rachète le livre. S’il avait duré 200 pages au lieu de 575, je lui aurais mis 5 étoiles… Ou alors j’aurais dû prendre un avion pour un trajet de 18 heures.

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  Oubliés [Texte imprimé] J. R. Dos Santos traduit du portugais par Catherine Leterrier

  de Santos, José Rodrigues dos Leterrier, Catherine (Traducteur)
  HC éditions Hervé Chopin
  ISBN : 9782357207844 ; 22,50 € ; 17/10/2024 ; 576 p. ; Broché

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