Les chevaliers du royaume de David Camus
Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques
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Regards croisés
Les Éditions Robert Laffont et la FNAC viennent de sortir en librairie (le 14 février 2005) un imposant roman, déjà présenté tambour battant (sous le titre de Miles Christi) à la dernière Foire du Livre de Francfort. Roman dont il est attendu un vif et tonitruant succès populaire. Ce roman, vaste fresque politico-religieuse, est le premier roman d’un jeune romancier : David Camus, petit-fils d’Albert Camus, comme l’annonçait tout dernièrement le journal Les Échos dans sa rubrique « Livres » du 10 janvier.
Grand amateur de science-fiction, auteur d’une nouvelle parue en 1998 dans le numéro 11 de la revue Galaxies, sous le titre : « La nuit des petits hommes verts », David Camus, sous ses airs calmes et sérieux, aime les frissons et en découdre ! Mais déjà, longtemps avant de se lancer dans l’écriture (mais aussi la traduction, l’édition et la réalisation cinématographique), il avait indirectement participé, sous pseudonyme, à l’élaboration de jeux de rôles autour du Moyen Âge. Jeux qui lui ont fourni, quelques années plus tard, la trame toute trouvée de son futur roman. Un roman épique tout entier ancré dans la période qui annonce le début de la troisième croisade. Pour les chrétiens, la plus cruelle des croisades, celle qui a suivi la prise de Jérusalem et qui a marqué la « Terre Sainte » des stigmates de la haine.
Et un roman d’actualité !
Dès les premiers chapitres de cette somme (25 chapitres en tout, sans compter le prologue et l'épilogue), le lecteur est plongé dans le « bruit et la fureur » de la bataille d’Hattîn (près du lac Tibériade, en Galilée), menée par Saladin contre les croisés et les soldats du Christ. Nous sommes au XIIe siècle (4 juillet 1187). Saladin le sunnite sortira vainqueur de ce tumulte qui sème la déroute au cœur des armées franques, entraîne la prise de Jérusalem (le 2 octobre) et provoquera la troisième croisade (proclamée le 29 octobre 1187 par le pape Grégoire VIII).
L’action du roman commence in « medias res ». C'est-à-dire, ici, en pleine bataille. Une bataille décrite de main de maître par son auteur, dont la devise personnelle est : « N’écris que ce que tu vois ». Avec un réalisme qui n’a rien à envier aux descriptions de la bataille d’Eylau dans Le Colonel Chabert de Balzac (dont David Camus est un avide lecteur), ou à la déroute de la Bérézina dans le roman Guerre et paix de Tolstoï.
Voilà donc le lecteur errant, non pas dans Césarée, mais au milieu des cadavres en putréfaction qui jonchent le sable du désert. Sous un soleil cuisant, enseveli sous les corps mutilés de ses compagnons d’armes, surgit Morgennes, moine hospitalier, blessé à mort. À qui reste pourtant suffisamment de force et d’esprit pour échanger avec le malheureux évêque d’Acre, Rufinus, son point de vue sur la situation des croisés. Le moine hospitalier renaîtra cependant de ses cendres. Prêt à s'adonner à de nouvelles quêtes. À s'engager dans de nouveaux combats. Avec l’aide de la miraculeuse Crucifère (étymologiquement « la porteuse de croix »), sa redoutable et vaillante épée, héritée de Baudouin IV et du roi Amaury. D'ailleurs fort convoitée. Quant à Rufinus, il ne fera pas long feu, et sa tête, transformée en une ricanante relique, sera elle aussi très recherchée. Outre l’épée Crucifère et la tête de l’évêque, d’autres objets-signes se relaient dans le récit, dessinant d'étranges « arabesques » que le lecteur curieux se réjouira de décrypter.
Les personnages, très nombreux (il faut, comme dans les romans de Balzac ou les romans russes, se constituer des fiches pour y retrouver ses petits) sont, pour la plupart, historiquement campés. Tant du côté des Sarrasins que du côté des chrétiens. Dans cet univers de conflits essentiellement masculin, les femmes ont cependant leur rôle à jouer. Un rôle majeur, affirme David Camus. En particulier, la belle et noble Cassiopée. Dont les derniers chapitres dévoileront enfin tous les mystères.
On peut imaginer que ce roman, qui baigne constamment dans une encre scénaristique, donnera prochainement à voir dans les salles obscures une gigantomachie sur écran panoramique. Bien trempée. Dans laquelle il sera toutefois aisé de reconnaître, en plein carnage, les méchants chrétiens, ces hypocrites barbares. Gonflés des certitudes que leur donnent les dogmes sur lesquels ils s’appuient et pour lesquels ils se battent.
Car le roman, en dépit de quelques figures chrétiennes emblématiques qui incarnent la voix de la sagesse, celle de Guillaume de Tyr par exemple, est pour l'essentiel assez manichéen. Et donne de surcroît l’entier avantage aux figures sarrasines. On pourra toujours rétorquer que David Camus respecte en cela les faits historiques. Mais, par-delà l’Histoire événementielle, pourquoi faire si peu de cas des données psychologiques et des mentalités propres à une époque ? Et, à lire David Camus, l’impression dominante qui se dégage est que, dans ce contexte précis, seuls les Sarrasins sont justes et loyaux. Une simplification qui n’est pas sans entraîner, du moins à la lecture de ce texte, un profond malaise. Voire un réel sentiment de révolte. Car, même si David Camus se dit profondément athée, on est en droit de s'étonner qu'il tienne pour négligeables - ou du moins non signifiantes - des sensibilités et croyances qui sont pourtant au coeur de son propre héritage culturel. On en vient du coup à imaginer que l’auteur s’ingénie (plus ou moins consciemment) à raviver de vieilles cendres toujours en activité et à jeter de l’huile sur le feu. Brûlot qui ne peut que contribuer à enflammer des conflits larvés. Mais, si je m’en tiens à la seule lecture en filigrane du communiqué présenté à Francfort par l’éditeur, la maison d’édition de David Camus privilégie sans doute le pactole qu’elle imagine pouvoir retirer de ce produit et de ses dérivés (une fresque cinématographique à la Oliver Stone ?), déclinables à volonté ! Sans trop s’encombrer d’éthique religieuse ni s'inquiéter des joutes qu'un tel roman risque de susciter. Business oblige !
Si les recherches historiques, inspirées des travaux du médiéviste Jean Flory (auteur de Guerre sainte, djihad, croisade, violence et religion dans le christianisme et l’islam, Points/Seuil, 2002), ont abondamment nourri le travail de l’auteur, les péripéties romanesques doivent également beaucoup au merveilleux et au fantastique médiéval propres aux romans de Chrétien de Troyes. Et à Perceval, son infatigable héros. Dont les aventures ont été interrompues, on le sait, par la mort de leur auteur. Qu’à cela ne tienne ! David Camus relève le défi et propose de fournir une suite au roman de Chrétien de Troyes sur le thème de la disparition de « La Vraie Croix ». Mystère à ce jour non élucidé par les historiens. Encore moins par l’auteur lui-même. Peut-être lui sera-t-il « donné la grâce » de découvrir ce mystère dans les opus prévus pour 2007 et les années suivantes. Car, selon lui, il reste de nombreuses pistes à exploiter ! Et des filons, aussi, sans aucun doute !
Les Chevaliers du Royaume, que David Camus se défend de présenter comme un roman violent, est donc bien à mes yeux un roman où la violence est en première ligne. Même si cette violence est parfois mâtinée de tendresse. Celles que véhiculent amour et amitié. Un roman dont la teneur risque cependant de dépasser la pensée et les intentions de son auteur. Et partant, d’alimenter et de raviver les braises incandescentes de la guerre sainte. Un roman qui pourrait faire couler beaucoup d’encre !
Le jeune écrivain s’interroge à voix haute: « Comment peut-on se battre au nom du Christ ? » Voilà bien de quoi relancer une polémique sur laquelle David Camus, on l’espère pour lui, aura eu tout loisir (ces derniers mois) d’affûter ses arguments !
Les éditions
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Les chevaliers du royaume [Texte imprimé], roman David Camus
de Camus, David
R. Laffont / HORS COLLECTION
ISBN : 9782221103173 ; 15,57 € ; 01/02/2005 ; 485 p. ; Broché
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Un bon divertissement
Critique de Byobinou (Rumilly (74), Inscrit le 22 février 2011, 55 ans) - 22 janvier 2013
Il faut conserver ce point continuellement l'esprit, sinon il est difficile d'entrer dans l'histoire.
Je n'ai pas été déstabilisé par la multiplicité des personnages, je trouve que chacun a sa place et enrichit l'intrigue, certes complexe (interférences des différents clans, tribus, etc... noms parfois difficiles à mémoriser).
Je n'ai contrairement à la critique principale, pas ressenti spécialement de manichéisme, ni de favoritisme pro-sarrasins. Certes Saladin parait comme un homme au dessus du lot (tout comme Morgennes, d'ailleurs) mais les horreurs, les exactions, les traitrises et les manipulations sont bien d'un bord comme de l'autre. Quelque part une réflexion à mener sur le poids et l'influence de la religion sur l'homme.
Enfin, pour ma part, il n'y a pas de suite possible... si l'on comprend l'analyse de Morgennes sur l'existence de la "vraie" Croix...
P.S. : je ne suis pas un amateur de livres "gores", aussi est-ce sans doute dans celui-là que j'ai lu le plus de têtes coupées, membres arrachés, et autres joyeusetés !
Vivement la suite...
Critique de King Arthur (, Inscrit le 26 octobre 2005, 44 ans) - 21 décembre 2005
J'avais entendu dire lors d'une interview de David Camus qu'il contait écrire une épopée à 5 volumes (la croix porte 4 extrémités et un centre, voilà pourquoi 5 volumes).
Moi, je dis : "vivement la suite" surtout que la fin du livre peut donner lieu à une suite...
Bof, bof, ...
Critique de Asgard (Liège, Inscrit le 14 juillet 2005, 46 ans) - 13 août 2005
De plus, on ne voit pas trop où l'auteur veut en venir. Les personnages ont-ils un but ? On a plutôt l'impression que chacun vit son aventure à son rythme et que l'ensemble forme un tout incohérent.
Une autre chose qui m'a gêné à la lecture du livre, c'est le mélange science-fiction et roman historique. Je trouve les 2 totalement incompatibles et j'aurais évité ce genre de mariage à la place de l'auteur.
Allez, je met quand même 2 étoiles car c'est le premier roman de l'auteur et le sujet avait tout pour être intéressant...
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