Les Chiens et les Loups de Irène Némirovsky

Les Chiens et les Loups de Irène Némirovsky

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Bachy, le 5 mars 2005 (Inscrit le 10 avril 2004, 61 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 513ème position).
Visites : 5 937  (depuis Novembre 2007)

Poids de société

« Les Chiens et les Loups » (1940) est un roman intimement lié au destin personnel de son auteur. Le poids de la société et la fatalité du destin sont au centre de ce roman qui évoque l'amour insensé de deux jeunes Juifs unis par un lointain souvenir. Ada, l’artiste révoltée, et Harry, le riche banquier, sont tragiquement attirés l'un vers l'autre. Rien ne pourra les réunir, si ce n'est le sentiment de leur propre perte.
Ada s’éclipsera pour sauver Harry et se sacrifiera pour que sa femme le reprenne comme époux et ainsi le sauver de la faillite et du déshonneur. Elle reçut ensuite un arrêt d’expulsion, avec un délai de huit jours pour les formalités indispensables. Ada obtint un visa pour un petit pays d’Europe Orientale. Elle mit alors au monde l’enfant de Harry et se sentit enfin heureuse !
Pas réjouissant ? Eh! bien si, justement. Par la grâce des mots de l’auteur, impeccablement choisis, qui excellent à traduire le champ ravagé des désirs oubliés, les prémonitions qui se dissolvent dans l’eau tiède des histoires ratées. Elle sait écrire les choses graves qui se passent quand rien n’a l’air de se passer. Ce qu’elle parvient à partager avec ses lecteurs tient de l’impalpable, du tragique sans langage, de la vérité toute crue, absolument pas spectaculaire mais qui fait saigner les coeurs. Du magnifique boulot d’auteur. Le mérite de l’auteur est de ne jamais tomber dans le misérabilisme et le pathos un peu facile. « Les Chiens et les Loups » est un roman grave et conséquent. Les mots y sont pesés, pondérés, estimés à leur juste valeur. Némirovsky Irène les lance sur le papier comme des uppercuts ; elle fait mouche. Elle écrit avec une arme à feu. On se trouve devant un lion en cage. L’écriture est agitée. Les mots vont et viennent, animaux dans ce caisson étroit : la société et ses injustices. Il y a de la violence dans ce verbe, mais une violence légitime, vengeresse et maîtrisée.

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Injustice sociale et judaïsme

8 étoiles

Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 2 décembre 2010

A défaut de trouver à la bibliothèque Chaleur du sang d'Irène Némirovsky, qui a reçu cette année le prix CL, j'ai dévoré celui-ci, choisi totalement au hasard. En effet, à la lecture des 4/5 quatrièmes de couverture des livres de cette auteur que j'ai pu dénicher, tous me semblaient aborder le même thème, à la même époque (début du vingtième siècle).
Sa plus grande qualité est dite : une lecture trépidante, attachante. Mais pas exceptionnelle non plus ; on en veut toujours plus, quand un roman nous plait vraiment, mais ne nous parait pas assez profond. Certains passages le sont, comme par exemple ceux qu'a cité Dirlandaise.

"Dans la maison, on considérait Ben et Ada avec une profonde méfiance, Ces jeunes gens qui ne semblaient pas savoir ce qu'était un repas chaud, un pot-au-feu, une soupe bien mijotée, ces jeunes gens qui parlaient une langue étrangère et passaient vite devant vous, les yeux baissés, comme s'ils avaient peur de vous, ils étaient ...ah! Ils étaient des étrangers... Voilà, ce mot disait tout."
Voici un extrait qui aborde les éléments clefs du roman : deux des trois personnages principaux, Ben et Ada. Est aussi évoqué en arrière plan Harry, représenté par cette maison bourgeoise qui s'étonne du comportement de deux pauvres enfants juifs. On suivra ces 3 personnages de l'enfance à leur vie d'adulte, dans toutes les étapes importantes de leur vie, mais aussi dans leur quotidien routinier.
Il y aura de la tendresse, sentiment très bien retranscrit, mais aussi de l'amour, agaçant comment souvent lorsqu'on essaie de le faire rimer avec toujours.

Un grand oui pour ce procès implicite de l'injustice sociale.

Fatalité du destin

10 étoiles

Critique de Dudule (Orléans, Inscrite le 11 mars 2005, - ans) - 17 novembre 2010

Roman sur la douleur de l'exil, de poids de la société, l'amour impossible entre Ada et Harry, attirés l'un vers l'autre mais dont rien ne peut les réunir. Roman avec des sentiments forts et bouleversants.

Chaque livre d'Irène Némirovsky est un enchantement, toujours écrit dans une superbe langue, un écrivain exceptionnel.

Richesse et pauvreté

8 étoiles

Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 18 octobre 2006

Un roman agréable qui se lit tout seul tellement c'est bien écrit. L'histoire se passe en 1912, en Ukraine et est plutôt banale. Une jeune femme juive issue des bas quartiers tombe amoureuse d'un congénère dont le père est un riche banquier. Elle l'admire de loin, n'ayant pas accès a son monde. Elle le retrouve des années plus tard a Paris...

Les chiens sont les bien nantis qui vivent dans la sécurité et le confort matériel. Leurs voisins sont les loups, ceux qui doivent lutter chaque jour pour survivre et qui affrontent la faim, la peur et la pauvreté.

Une histoire romanesque qui m'a plu mais que j'aurais aimée plus approfondie et détaillée. Irène Némirovsky aurait pu en faire un grand roman d'amour inoubliable mais c'est écrit en passant trop vite sur les événements ce qui enlève beaucoup de saveur au récit. Il reste que l'écriture est très belle et que c'est un beau moment de lecture. Il y a dans les premières pages du livre des passages admirables :

"Maintenant ils étaient heureux ; le courant d'air froid qui tombait sur leurs épaules, c'était la respiration glacée d'un iceberg frôlé dans les ténèbres ; le bruit des planches secouées, ces hardes, cette faim même qui les tenaillait, cela n'était plus la vérité, mais un roman, l'aventure, le rêve."

"Harry leva les yeux et reconnut l'enfant entrevue deux ans auparavant, l'enfant décoiffée, souillée de poussière, les mains déchirées, qui avait surgi brusquement d'un monde affreux, sordide, un monde de sueur, de saleté et de sang, si loin de lui et, malgré tout, si mystérieusement, si redoutablement lié a lui. Toute sa chair se hérissa comme celle d'un petit chien, bien nourri et soigné, qui entend dans une forêt le cri affamé des loups, ses frères sauvages."

"Car Dieu donne aux uns des chemins sûrs et paisibles, et, pour d'autres, des précipices s'ouvrent a chaque instant sous leurs pas, (...).

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