Mémoires du général baron de Marbot, Volume 1
de Jacques Garnier, Marcellin de Marbot

critiqué par Bolcho, le 11 mars 2005
(Bruxelles - 76 ans)


La note:  étoiles
guerres napoléoniennes
Marbot est un officier de armées napoléoniennes. Pas un maréchal d’Empire d’accord. Mieux que ça. Un écrivain. Et Napoléon l’a un jour chargé d’écrire « pour la défense de la gloire des armées françaises ». Ce qui n’empêche pas Marbot d’être parfois très critique, notamment en ce qui concerne la vilénie que fut la guerre en Espagne (« une atrocité, un acte odieux, que l’histoire a flétri et que la Providence ne tarda pas à punir, car ce fut la guerre d’Espagne qui prépara et amena la chute de Napoléon »).
Ces mémoires sont, ou bien mortellement ennuyeuses pour qui n’y verrait qu’une suite de récits de combats, de blessures, de chevauchées, ou absolument passionnantes parce que c’est toute une époque vue par un de ses acteurs. On y apprend plein de choses concrètes comme la manière d’écouter au loin (placer l’oreille sur un tambour posé à terre et entendre ainsi « le bruit lointain de la mousqueterie » ; bon, je vous accorde que c’est moins utile de nos jours) ou comme la relativité des choses (« j’avais un assez médiocre domestique, mais trois excellents chevaux »). C’est intéressant pour les faits de langue curieux qu’on y rencontre : des chevaux fatigués sont « sur les dents », les routes non empierrées sont dites « pas encore ferrées » (on trouve la même expression chez Dumas d’ailleurs ; d’où cela vient-il ?).
Et tous ces détails de la petite histoire qui nous permettent de mieux comprendre la grande :
- des destins exceptionnels comme celui de Thérèse Figueur (nommée « Sans-gêne » comme la célèbre maréchale Lefebvre) qui participe en première ligne à de nombreux combats, qui est blessée à plusieurs reprises puis devient gentiment « dame de compagnie » de Madame Augereau ;
- Napoléon n’a jamais su exactement quel était le nombre de ses combattants. Tous les chefs de corps lui annonçaient le chiffre officiel de leurs hommes alors qu’une grande partie d’entre eux traînant en arrière, qui simplement fatigué, qui battant la campagne pour ravitailler les copains. A ce propos, il est amusant d’aller voir les sources allemandes à propos des batailles : les chiffres annoncés (combattants, blessés, tués, etc) sont totalement différents ;
- les époques semblent parfois se mélanger. On n’est pas très loin du Moyen Age avec le siège de Saragosse et ça recommence à la prise de Ratisbonne : des porteurs d’échelles courent vers les remparts sous le feu des défenseurs et prennent la ville comme ça ;
- l’importance de la mode : « Les élégants de l’armée avaient adopté des pantalons d’une largeur démesurée, qui ne manquaient pas de grâce lorsqu’on était à cheval, mais qui étaient on ne peut plus embarrassants à pied ». Marbot raconte l’histoire de ce jeune officier chargé de courir pour transmettre un ordre et qui se prend les éperons dans son pantalon…
- de l’importance relative d’un cheval et d’un homme : Marbot aime beaucoup sa jument qui avait un grand défaut : « elle mordait comme un bouledogue ». Il raconte « on trouva le soir même sous ses pieds un palefrenier auquel elle avait arraché les entrailles à belles dents !... ». Mais ce n’est pas pour si peu qu’on allait s’en défaire…
- la guerre d’Espagne est sans doute le premier signe évident de la naissance d’un véritable sentiment national (Marbot est surpris et même choqué de cette haine bizarre qui anime les Espagnols alors que Prussiens, Autrichiens, Russes, Allemands sont des gens si charmants qui vous invitent à dîner joyeusement le soir, en pays occupé).

Ce premier tome se termine avec la bataille de Wagram à propos de laquelle Marbot nous livre ce détail que je n’avais lu nulle part ailleurs jusqu’ici :
« Lorsqu’un combat a lieu pendant l’été, il arrive souvent que les obus et les bourres de fusil mettent le feu aux blés déjà mûrs (…) Malheur aux troupes qui se laissaient atteindre ! La poudre contenue dans les gibernes et les caissons s’enflammait et portait la mort dans les rangs. On voyait donc des bataillons et même des régiments entiers, s’élancer au pas de course pour éviter l’incendie, et gagner des emplacements où le blé eût déjà été brûlé ; mais les hommes valides pouvaient seuls profiter de ce refuge. Quant aux militaires grièvement blessés, un grand nombre périrent dans les flammes et, parmi ceux que le feu n’atteignit pas, beaucoup passèrent plusieurs jours sur le champ de bataille, où la grande hauteur des moissons empêchait de les apercevoir. Ils vécurent pendant ce temps de grains de blé. (…) ceux sur lesquels l’incendie avait passé succombèrent presque tous, ce qui fit dire aux soldats que le feu de paille avait tué presque autant d’hommes que le feu du combat ».

Quelle époque !
MARBOT 10 étoiles

Bonjour à tous

déjà Bolcho à bien décrit la situation , on s'ennuie ferme ou on se délecte mais j'ai vraiment du mal à m'imaginer que l'on puisse s'ennuyer à lire Marbot

Marbot est avant tout un conteur , un narrateur hors pair , captivant et drôle de surcroit. C'est aussi un aventurier et un acteur qui a pris part aux évènements qu'il raconte , il a participé que à " l épopée napoléonienne " et plutôt plus que moins coté aventure , rebondissements , suspense ..etc c'est comparable à du Alexandre Dumas mais en mieux puisque tout est vrai

Conan doyle s'est largement inspiré des écrits de Marbot pour écrire les aventures du brigadier Gerard.

On peut lire ce Livre comme un roman d'aventures ce qui est le cas ou comme un journal , ou des mémoires ...ce qui est aussi le cas . Ce " gars la" en tout cas écrivait bien et je l'en remercie sincèrement.

p.....n d 'époque que je ne regrette pas vu le taux de mortalité et sacrés bonhommes et bonnes femmes.

à lire sans aucun doute

Johnthebee - - 59 ans - 12 décembre 2007